Les sirènes de Bagdad

"Il faut t'endurcir. Il faut savoir renoncer aux peines des autres ; elles ne sont bonnes ni pour eux ni pour toi. Tu es trop mal loti pour t'attendrir sur le sort d'autrui..." En vain. On ne naît pas brute, on le devient ; on ne naît pas sage, on apprend à l'être. Moi, je suis né dans la misère et la misère m'a élevé dans le partage.

Une brute reste une brute, même avec le sourire ; c’est dans le regard que l’âme décline sa vraie nature.

Quand on a rien, on fait avec - question de mentalité

Ça a toujours été ainsi ; quand on ne trouve pas un sens à un malheur, on lui invente un coupable.

C’était l’heure de la prière. Avec un groupe de mes hommes, nous avions rejoint une mosquée et nous nous étions mis à faire nos ablutions dans une petite cour dallée. L’imam, un personnage imposant vêtu d’une tunique flamboyante, s’était
alors approché de nous. « Que faites-vous là, jeunes gens ? » nous avait-il demandé. « Nous nous lavons pour la prière », lui avais-je répondu. « Croyez-vous que vos outres suffisent à vous purifier ? » s’était-il enquis. « Il faut bien faire ses ablutions avant de rejoindre la salle des prières », lui avais-je fait remarquer. Il avait alors tiré une figue toute belle et fraîche de sa poche, l’avait nettoyée laborieusement dans une tasse d’eau ; ensuite il l’avait ouverte sous nos yeux. La belle figue grouillait d’asticots. L’imam avait conclu : « Il ne s’agit pas de laver son corps, mais son âme, jeunes gens. Si vous êtes pourris de l’intérieur, ni les fleuves ni les océans ne sauraient vous désinfecter. »

Les peuples n’ont que les rois qu’ils méritent.

Nos matins se reconnaissaient à leurs bruits vétilleux, nos soirs à leurs sommeils sans attraits, et d’aucun n’auraient su dire à quoi servent les rêves lorsque les horizons sont nus.

Moi, je suis né dans la misère, et la misère m'a élevé dans le partage.

N’essayons pas de faire porter aux autres le chapeau que nous avons fabriqué de nos mains pour nous-mêmes.

Les Sirènes de Bagdad.
— Celles qui chantent ou bien celles des ambulances ?
— C’est à chacun de voir.