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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'aime lorsque la littérature s'immisce dans les angles morts de l'Histoire. Christian Kiefer choisit ici de mettre en lumière un fait plutôt méconnu ( également traité par Julie Otsuka dans l'excellent Quand l'empereur était un dieu ) : le terrible sort des nippo-américains durant la Deuxième Guerre mondiale après Pearl Harbor, basculant dans l'effroi lorsque paraît l'ordre exécutif de Roosevelt, le 9066. Plus de 110.000 citoyens américains d'origine japonaise, pourtant bien intégrés à la société, sont immédiatement internés de force dans des camps comme celui de Tule Lake en Californie, évoqué dans le livre.

A partir de cette toile de fond, Christian Kiefer tisse une structure narrative assez éblouissante, complexe par les chemins empruntés sur trois arcs temporels ( deuxième guerre mondiale, 1969 et 1983 ). Plutôt que d'alterner classiquement des chapitres distincts sur chaque période, l'auteur choisit de superposer passé et présent pour raconter deux familles qui cherchent à faire la paix avec leur passé, une blanche, une nippo-américaine.

Tout commence, superbe chapitre, avec le retour de Ray Takahashi, été 45, dans sa ville natale. Jeune GI, il revient du front d'Europe de l'Ouest. Il a combattu pour un pays qui a contraint sa famille à abandonner sa maison pour un camp d'internement, mais il veut revoir celle qu'il aime, sa voisine Helen Wilson. Il n'est pas le bienvenu, loin de là. Comme tous les Nippo-américains, il n'a plus sa place chez lui. On comprend assez vite que le narrateur ne connait pas Ray mais il enquête sur sa disparition durant ce même été à la demande d'une tante éloignée qui est la mère d'Helen. le narrateur, lui, revient de la guerre du Vietnam. Il ne découvrira la vérité sur Ray qu'en 1983, suite à la confrontation entre deux féroces matriarches, la mère de Ray et la mère d'Helen.

La façon dont l'auteur lève le voile sur la couche de secrets, déterre les trahisons, les mensonges et les traumatismes enfouis, brise les mythes et les silences est admirable. On comprend petit à petit personnalité, motivation et dynamique de chacun. L'histoire tragiquement imbriquée de ces deux familles est peuplée de fantômes ; tous, personnages, principaux ou secondaires, sont hantés, à commencer par le narrateur, tourmenté par les civils vietnamiens qu'il a tués ou fait tuer en appelant à la rescousse les avions F-4 Phantom qui ont bombardé sans relâche des villages.

En fait, s'il désarçonne au départ et peut agacer par sa façon d'annoncer qu'il va y avoir une révélation, le procédé narratif qui consiste à entremêler dans un même chapitre passé / présent prend progressivement tout son sens en mettant en lumière les cycles qui semblent piéger les personnages et plus largement les Etats-Unis : cycles de racisme, cycles de guerres, cycle de culpabilités et de peurs. Fantômes est un grand roman sur la culpabilité lié à un passé obsédant. Il fait réfléchir sur la façon que nous avons d'essayer, chaque jour, d'effacer des crimes passés, grands ou petits, qui ont durablement infléchi nos idéaux et valeurs ; ou comment nous prétendons les oublier alors qu'ils façonnent notre respiration même.

Un roman qui brise le coeur, à la rupture, mais dont on retient aussi la lumière du dernier chapitre, bouleversant, celui de l'apaisement avec soi et son passé. Magnifiquement romanesque.



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A sa démobilisation en 1945, l'Américain d'origine japonaise Ray Takahashi est accueilli avec défiance dans sa région natale, en Californie du Nord. Sa famille, expulsée et enfermée au camp de Tule Lake après l'attaque de Pearl Harbor en 1941, a dû s'exiler à Oakland après sa libération. Stupéfait du changement d'attitude de leurs anciens voisins et amis, désespéré de revoir leur fille Helen, sa petite amie, Ray s'attarde sur les lieux, puis disparaît sans laisser de traces. Vingt-quatre ans plus tard, John Frazier rentre traumatisé de la guerre du Vietnam et se lance dans l'écriture. Tombé par hasard sur l'histoire de Ray, il lui faut plusieurs décennies pour reconstituer les faits et découvrir ce qu'il est advenu de cet homme.


Près de 120 000 Japonais et Américains d'origine japonaise furent déportés en 1942 dans des camps de concentration aux Etats-Unis. Les deux tiers étaient des Nisei, des Japonais de seconde génération et donc de nationalité américaine, dont une partie s'engagea sous la bannière étoilée. Après plusieurs années de détention dans de pénibles conditions, leur libération s'accompagna de grandes difficultés de réinsertion. Beaucoup avaient tout perdu, mais ils restèrent aussi longtemps en butte à l'agressivité et à la discrimination. Il leur fallut attendre les années quatre-vingt pour que l'État américain commence à reconnaître ce préjudice et ses causes raciales, dans une nation depuis longtemps en proie au fantasme du péril jaune, et rendue paranoïaque par la guerre.


Fort d'une impressionnante documentation, l'auteur s'est inspiré de ce drame historique pour nous livrer une histoire romanesque, si habilement construite qu'elle prend toutes les apparences d'un récit autobiographique. En totale empathie avec des personnages plus vrais que nature, le lecteur est d'autant plus happé par la narration qu'il se retrouve bluffé par son absolue authenticité apparente, dans un exercice de parfaite illusion littéraire. Bâti autour d'une thématique historique déjà dramatique en soi, le récit crée une spirale infernale de plus en plus poignante, tandis que le narrateur découvre pas à pas, la plupart du temps quand ils semblent perdus à jamais, les secrets portés leur vie durant par les autres protagonistes. Tous les personnages sont restitués avec une grande finesse psychologique, leur logique et leurs motivations ne s'éclairant que progressivement, à mesure que le temps passé, la disparition des uns et des autres, et le poids des doutes et de la culpabilité, favorisent enfin la prise de recul et la libération de la parole.


Enchanté par la perfection architecturale du récit, par la profondeur des personnages et par la vérité de la restitution historique, c'est avec émotion que l'on se plonge dans cette narration addictive aux effets dramatiques en cascade. Rares sont les créations romanesques suscitant une telle impression de réalité. Coup de coeur.

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Fantômes repose sur les destins croisés de Ray Takahashi et de John Frazier.
Le premier, Ray Takahashi, a quitté sa terre californienne pour se battre en France et en Italie et, à son retour en 1945, bien des choses ont changé. Ses parents, après avoir été enfermés au camp de Tule Lake en raison de leurs origines nippones, suite à l'attaque de Pearl Harbor et à l'entrée en guerre des Etats-Unis, ne sont jamais revenus dans la petite bourgade où leurs enfants ont grandi. Ray croise quelques connaissances et doit encaisser des remarques désobligeantes, mais il se heurte surtout à l'animosité de Mrs Wilson, la voisine et amie de la famille qui, accompagnée de son mari, avait pourtant accueilli avec une grande bienveillance les parents de Ray bien avant que la guerre n'éclate.
Le deuxième, John Frazier, a vécu une autre guerre, celle du Vietnam, et, en 1969, il en revient bouleversé au point de vouloir retranscrire les événements auxquels il a participé. Il ne le sait pas encore, mais c'est une autre histoire qu'il va raconter, entraîné sur les routes par sa tante Evelyn qui semble décidée à se débarrasser d'un fardeau qui l'entrave depuis de nombreuses années.
Ils sont deux des fantômes qui hantent ce roman.
Je n'irai pas par quatre chemins, j'ai adoré ce texte que j'ai trouvé absolument brillant. L'histoire, bien sûr, est passionnante. Je m'attendais à plus de détails historiques mais j'ai assez rapidement compris que la petite histoire allait prendre le pas sur la grande, et que les destinées individuelles allaient raconter, de manière plus puissante que ne l'aurait fait n'importe quelle précision historique, la réalité de ces familles mises au ban, considérées comme des ennemis et injustement internées. le destin de Ray m'a profondément touchée, c'est un personnage pour lequel j'ai eu une tendresse spontanée, et il en va de même pour John, son double, son miroir, que la guerre a également arraché à sa jeunesse et qui m'a immédiatement paru intéressant et sympathique. Mais surtout, c'est la narration qui m'a subjuguée. Tout y est absolument parfait, chaque phrase semble être exactement à sa place, constituant un morceau du puzzle qu'est l'enquête déclenchée par le secret de la tante Evelyn. Les analepses, les effets d'annonce, toutes les allusions - par le personnage-narrateur qu'est John - au dévoilement progressif de l'histoire de Ray, à sa compréhension profonde, toutes les émotions qu'il laisse délicatement filtrer sans jamais trop en dire, sont une véritable réussite !

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Je remercie chaleureusement les Éditions Albin-Michel et sa collection « Terres d'Amérique » pour cette lecture et leur confiance !
« Fantômes » est signé Christian Kiefer et il paraît aux éditions Albin Michel dans la très belle collection « Terres d'Amérique. » C'est son troisième roman, et il confirme ici tout le talent de celui qui est salué, comme l'une des voix les plus prometteuses de la littérature américaine contemporaine. « Fantômes » c'est le récit fait par le narrateur John Frazier, un rescapé de la guerre du Vietnam, rentré au pays au printemps 1969. Il a vu des choses terribles là-bas. Sa grand-mère le recueille alors qu'il se débat contre les démons de l'alcool et de la drogue. C'est lui qui, au Vietnam, était chargé par radio de donner les coordonnées des positions Viêt-Cong pour que l'aviation les écrasent sous leurs bombes. Il a le souvenir gravé de ces femmes et de ces enfants morts suite à une fatale erreur de sa part. C'est un homme détruit et hanté qui s'attelle à écrire ce qu'il a vécu. Mais un autre sujet va bouleverser ce travail d'écriture et lui faire découvrir un destin tragique, celui du soldat Ray Takahashi. Ray ou Raymond est le fils d'immigrants japonais venus au début des années 1920 aux Etats-Unis. Hiro et Kiriko sont ses parents. Hiro, son père, était un simple ouvrier agricole qui travaillait de ferme en ferme à la cueillette des fruits et à l'entretien de ces mêmes arbres fruitiers. le destin des Takahashi va croiser celui des Wilson. Evelyn Wilson et Homer Wilson qui vont louer une partie de leurs terres aux Takahashi. Homer et Hiro s'entendent parfaitement. Ils sont même amis. Mais, pour Evelyn et Kimiko, un drame va faire basculer leur relation vers un trou béant. Evelyn a de la rancoeur, de l'amertume et une sourde colère contre les Takahashi. L'attaque de Pearl Harbor, en décembre 1941, va chambouler la destinée des deux familles. En mai 1942, les Takahashi sont contraints de rejoindre le camp d'internement de Tule Lake où ils resteront jusqu'à la fin de la guerre. Homer a trahi le serment fait à Hiro et loue sa terre à des blancs nouveaux venus. A l'été 1945, Ray rentre de la guerre en Europe où il a combattu les nazis, notamment à Anzio en Italie, puis en France et enfin en Allemagne. C'est un soldat revenu de toutes les horreurs, et qui espérait en s'engageant, voir les restrictions de liberté prises contre sa famille prendre fin. Malheureusement, ce ne fût pas le cas. Ray décide de retourner voir les Wilson pour comprendre le pourquoi de cette trahison. Il revient aussi pour Helen Wilson, sa petite amie, fille de Homer et Evelyn. Plusieurs secrets de famille hantent la relation entre les Takahashi et les Wilson. Ray disparaît et on ne retrouve plus trace de lui. Vingt-sept ans plus tard, Evelyn contacte John Frazier. Evelyn est la tante de ce dernier. John va vouloir comprendre le drame qui s'est noué et les non dits, les secrets des uns et des autres. Que cache Evelyn ? quelle douloureuse confession va t'elle faire en se rendant voir Kiriko, la mère de Ray, vingt-sept ans après sa disparition ? Pourquoi Evelyn souhaite t'elle parler ? Que s'est-il passé en cet été 1945 alors que le racisme anti japonais est à son paroxysme ? Tout en enquêtant, John va vouloir conjurer ses démons intérieurs aidé de sa grand-mère si aimante. C'est un récit poignant servi par une écriture d'une rare sensibilité, très poétique. « Fantômes » est un roman superbe sur le destin, le poids des tragédies, l'impossibilité de faire résilience quand on a côtoyé, de si près, la mort. C'est aussi un récit sur le poids des secrets, des non dits et ce besoin irrépressible d'étancher la soif de vérité. « Fantômes » nous parle du racisme ordinaire anti nippo-américain, de leur internement dans des camps parce qu'on les considéraient comme des ennemis de l'intérieur. C'est également, une tragique histoire d'amour adolescente. Jamais manichéen mais toujours au plus près de la vérité des consciences et des êtres, Christian Kiefer tisse la toile réussie d'un roman ambitieux, profondément sensible et douloureux. C'est beau, c'est triste, inspiré, magnifiquement romanesque. C'est une page sombre de l'histoire américaine qui défile sous nos yeux. Un auteur et un livre à découvrir absolument.
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Lorsque Ray Takahashi à la fin de la seconde guerre mondiale revient en Californie , la région où il a passé son enfance , il n'est pas le bienvenu , il est chassé sans plus d'explication de la maison où vit la famille amie, les Wilson., Homer qui avait accueilli le père de Ray, la mère Evelyn et les deux enfants, Jimmy et Helen qui était sa petite amie.

Il faut dire qu'après l'attaque de Pearl Harbor, les nippo-américains ont été envoyés de force dans des camps comme Tule Lake et peu d'entre eux ont pu retrouver leur maison ensuite.
Ray s'était engagé pour prouver son patriotisme et espérait que le sort de sa famille serait plus clément... Fin du premier chapitre.

L'histoire ensuite est racontée par John Frazier. de retour du la guerre du Vietnam, en 1969, il peine à retrouver une vie normale , il est accueilli par sa grand-mère . C'est là-bas qu'il rencontre sa tante, Evelyn Wilson , qu'il va apprendre une partie de l'histoire de Ray et faire la connaissance de Kiriko , la mère de Ray qui n'a jamais revu son fils.

Fantômes évoque les visions qui poursuivent ces jeunes hommes, anéantis par ce qu'ils ont vécu et fait ,que ce soit dans les tranchées en France ou dans la jungle du Vietnam, survolée par les avions F4- phantoms envoyés pour larguer leur bombes meurtrières . Et pour John, intéresser au destin de Ray est un fil qui relie des frères d'armes et qui lui donne une raison de surmonter sa culpabilité .

Fantômes, c'est aussi tous les secrets enfouis, les actes inavouables qui font s'affronter deux femmes puissantes par leur caractère et leur volonté farouche , Evelyn et Kiriko , remparts de protection de leur famille, et en apparence inébranlables .

John ne saura la vérité sur Ray que beaucoup plus tard et en fera un livre . J'ai cru pendant longtemps que c'était l'auteur lui-même qui racontait son histoire .

Admirablement construit, ce roman mêle des événements mal connus , comme l'emprisonnement des nippo-américains à travers l'histoire personnelle de deux familles et l'éternelle difficulté du "vivre ensemble" quand les origines et les cultures sont différentes lorsqu'il arrive un événement perturbateur.
Le rejet est plus facile que l'effort de compréhension et l'ouverture d'esprit .
L'âge avançant , l'approche de la mort avec , que l'on soit croyant ou non, l'examen rétrospectif sur ses actes, ses non-dits et leurs conséquences entraine une relativisation et un certain besoin de pardonner et de se faire pardonner .
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Ce livre débute par deux histoires, celle de Ray, soldat américain d'origine japonaise et qui s'engage dans la deuxième guerre mondiale; et celle de John, soldat américain d'origine européenne, qui s'engage pour la guerre du Vietnam. Parallèle étonnant. En recherchant la trace de Ray, John retrace l'histoire des camps nippo-américains. Après m'être un peu perdue au début de ce livre, j'ai finalement aimé la manière utilisée par l'auteur pour aborder ce thème. À son retour de la guerre Ray revient vers son quartier, sa famille n'habite plus la maison de son enfance, il ne retrouve pas ses amis et les parents refusent tout contact avec lui. Il va errer, on perd sa trace. L'auteur, par la plume de John Frazier, met admirablement en scène la stigmatisation subie par la communauté nippo-américaine pendant et après le deuxième conflit mondial. Il y a une belle amitié entre deux hommes, de lourds secrets de famille révélés trop tard, nous sommes pris dans l'atmosphère délétère de cette époque. Très prenant. Tension qui va crescendo. Belle construction. Ce livre est à placer en miroir à ceux de Julie Otseka, sur le même thème.
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Magnifique est le mot qui me vient à l'esprit. Un récit fait avec un style qui pour ma part a eu l'effet escompté. L'ouvrage est le premier écrit de l'auteur que je lis, je ne peux donc pas affirmer si il s'agit d'une constante dans ses romans, mais quel don ! Il arrive à rendre ce récit aussi tangible que les dires de nos anciens...

Il n'y a aucune action à proprement dit dans ce roman et pourtant l'intrigue est menée tambour battant au grès des pages qui se dévorent. Les personnages sont d'une efficacités sans pareils. le sujet est passionnant et terrible à la fois. L'angle d'attaque choisit par l'auteur lui donne des allures de saga familial ce qui le rend plus léger, plus digeste...

Vous l'aurez compris, j'ai adoré ce roman, l'histoire, l'écriture, les personnages, l'ambiance, tout en somme.
Je ne saurais que trop vous le conseiller, à condition que le sujet vous plaise évidemment.

Pour ma part, ce livre ne sera pas le dernier de l'auteur a passer entre mes mains, c'est une certitude.
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Ray Takahashi, soldat américain d'origine japonaise, a survécu à la guerre avec l'espoir de retrouver celle qu'il aime. Mais de retour dans sa ville natale, la belle Helen Wilson n'est pas là pour l'accueillir, pas plus que ses parents. Ray est seul et pire encore, il n'est plus le bienvenu chez lui. A la suite de l'attaque de Pearl Harbor, le sentiment anti-japonais s'est emparé des Etats-Unis. Les Nippo-Américains sont considérés comme des ennemis potentiels qu'il convient de neutraliser, c'est dans ce contexte que les parents de Ray ont été chassés de chez eux pour être internés dans un camp comme 110 000 autres Japonais à cette époque. L'histoire de Ray aurait pu s'arrêter là, le jeune homme partant rejoindre les siens pour reconstruire une vie ailleurs mais on perd toutes traces de l'ex-soldat à ce moment-là. Qu'est-il arrivé à Ray ? Seule Kimiko, sa mère, semble encore hantée par sa disparition 27 ans plus tard lorsqu'elle décide de reprendre contact avec Evelyn Wilson, la mère d'Helen. Avec l'aide de son neveu, John Frazier, jeune écrivain et vétéran de la guerre du Vietnam, Evelyn va devoir affronter les fantômes du passé. Quels liens unissaient les Takahashi et les Wilson ? Qu'est-il advenu de Ray ? A travers les paroles de sa tante et ses non-dits, John Frazier va mener l'enquête sur les secrets de famille et sur ce qui a tout lieu de ressembler à un drame familial.

Dans un roman de toute beauté, à la fois pudique, sensible et poignant, l'auteur nous livre un pan d'histoire américaine que je ne connaissais pas en y mêlant les affres de soldats revenus du front, blessés dans leur âme quand ça n'est pas dans leur chair. Roman sur l'absence avant tout, Fantômes est aussi un texte étonnamment lumineux bien que douloureux - et assez tortueux dans sa forme, il faut bien l'avouer - qui combat la bêtise, l'ignorance et la peur aveugle qui font le lit du racisme ordinaire. Un roman sur fond historique, plus que jamais d'actualité en Amérique comme chez nous hélas.
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WAHOU. C'est le seul mot qui m'est venu en tête quand, il y a quelques minutes, j'ai terminé ce roman de Christian Kiefer. Difficile de trouver les bons mots. J'aurais peut-être du attendre avant d'écrire ici mon avis mais j'avais peur que mes émotions m'échappent. Parce que c'est ça aussi, écrire une chronique. C'est parler avec son coeur.

C'est la première fois que je lis un roman de ce genre : qui n'est ni un thriller, ni un fantastique, ni même un feel-good… C'est un roman vrai, sincère, que j'ai trouvé extrêmement poétique et mélancolique. Au fil des pages, au fil des sauts dans le temps, on apprend à travers la plume de John, narrateur, l'histoire bien trop méconnue chez nous de la vie des soldats mais surtout de la vie des Japonais/Américains juste après l'attaque de Pearl Harbor. C'est avec son coeur que l'auteur, à travers son personnage, nous livre ses émotions. Fantômes est une histoire prenante, bouleversante qui, grâce à Ray Takahashi nous apprend la guerre vue de l'intérieure, l'intolérance, la peur de l'autre. L'écriture est magnifique, riche en descriptions des sentiments, un ras de marée d'humanité, c'est impressionnant.

J'ai appris beaucoup de choses durant ma lecture, lâchant de temps en temps mon livre pour faire des recherches sur le web, sur les camps d'internement comme Tule Lake, pour les américains d'origine japonaise par exemple ou plus généralement sur la guerre du pacifique que je n'avais vu qu'à travers les films. J'ai mis des images sur ce que je lisais et cela a véritablement renforcé mon ressenti, mes émotions. J'ai eu énormément d'affection pour John et son histoire personnelle de soldat brisé, pour sa grand-mère qui fait tout pour le relever, pour Mrs Takahashi, femme courageuse qui souffre en silence, pour Chiggers, compagnon d'arme et bien sûr pour Ray qui incarne de belles valeurs. J'ai essayé de comprendre la réaction de certains personnages, leur peur; Mais j'ai vite compris que je n'avais pas à juger. Je n'y étais pas et c'était il y a plus de 75 ans. J'ai eu le coeur serré, j'ai été et je suis toujours émue. Fantômes de Christian Kiefer est ce genre de roman. de ceux qui laissent une trace, qu'on n'oublie pas, c'est un hommage, une nécessité. Je suis profondément reconnaissante envers les Éditions Albin Michel de m'avoir permis de découvrir cette histoire épatante.

Bref, un livre rare et fort que je vous recommande vivement. Inutile d'y attendre des rebondissements à gogo, des actions incroyables, vous n'y trouverez que vérité et émotions, une réussite et un véritable coup de coeur.
Lien : https://black-books.fr/2021/..
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4ème de couv':"Été 1945 : lorsque le soldat américain d'origine japonaise Ray Takahashi rentre du front, personne n'est là pour l'accueillir en héros sur les terres de son enfance, dans le nord de la Californie. Ses parents, après avoir été expulsés et enfermés au camp de Tule Lake, vivent désormais à Oakland. Mais Ray veut comprendre pourquoi leurs anciens voisins et amis ont coupé les ponts avec eux, et surtout revoir leur fille Helen, sa petite amie. C'est à ce moment-là qu'il disparaît sans laisser de traces.
Printemps 1969: de retour du Vietnam, et hanté par les fantômes de la guerre, John Frazier cherche son salut à travers l'écriture d'un roman. En s'emparant accidentellement du destin de Ray, le jeune écrivain ignore tout des douloureux secrets qu'il s'apprête à exhumer.
En revenant sur l'histoire méconnue de dizaines de milliers de Nippo-Américains internés dans des camps après l'attaque de Pearl Harbor en 1941, Christian Kiefer tisse un drame familial poignant et lumineux, qui interroge notre rapport intime à la mémoire et au passé."

MON AVIS: le voyage a été douloureux mais très instructif. Et quelque part il y a une résonance dramatique avec notre époque actuelle .Et c'est une bonne chose de rappeler que le passé est censé nous instruire et nous empêcher de reproduire des erreurs terribles. Quand certains apprendront-ils? peut-être jamais hélas mais qu'importe j'aime ces récits sombres et poignants qui montrent l'âme humaine encore une fois dans tout ce qu'elle a de plus sombre, de minable et d'étriqué mais aussi de bienveillant.
A travers le récit de John, où se mêle son propre vécu, j'ai gouté à la peur, au mépris, à l'ignorance, au rejet et à l'incompréhension. A ces choix que certains font , sur de leur bon droit, mais qui ne tiennent aucun compte du ressenti ou de l'avis de ceux qu'ils se permettent de juger. C'est ainsi que nait l'injustice, le malheur et parfois la mort.
Il y a toujours de la beauté dans les histoires que nous raconte Christian Kiefer, dans la description des lieux et des personnes et aussi des âmes. C'est douloureux mais c'est beau.

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