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Yu-kyeong Kim (Autre)Yeong-hee Lim (Traducteur)Stéphanie Follebouckt (Traducteur)
EAN : 9782809715446
471 pages
Editions Picquier (04/03/2021)
3.98/5   50 notes
Résumé :
Quelque part en Corée du Nord, un camion roule dans la nuit. Son chargement : un jeune journaliste et sa famille, jetés à l'arrière sans ménagement. Leur destination : un camp de prisonniers politiques enserré dans les montagnes. Wonho et sa famille vont connaître la faim, le froid, les privations, les corvées épuisantes, les persécutions. Jamais ils ne sauront pourquoi ils sont là. Un des chefs du camp va reconnaître dans la jeune femme une musicienne qu'il a secrè... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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Je trouve que l'image de la couverture est magnifiquement représentative du thème du livre. le barbelé représente l'homme tordu et totalitariste qui a créé un moule d'actes et de pensées autorisés et qui décide de ce qui peut être toléré ou pas, alors que l'oiseau symbolise la nature et la liberté, il peut s'envoler à sa guise au-delà des barbelés et ne connait pas de frontières.

Wonho est un jeune journaliste enthousiaste et prometteur mais qu'a-t-il pu dire ou faire contre le Parti de son pays, la Corée du Nord, pour être trimballé subitement, sans explication, à l'arrière d'une camionnette, tel un prisonnier ? Après avoir été conduits au Bowibu (service de renseignements nord-coréen), Wonho, sa mère et sa jeune épouse Su-ryeon quittent Pyongyang et tressautent des heures durant sur les mauvaises routes du pays sans connaître leur destination. Ils sont apeurés, inquiets et affamés avec pour tout repas une maigre boulette de farine de maïs qui leur a été jetée à chacun.
Vallées et montagnes se succèdent jusqu'à l'arrivée dans une vaste clairière éclairée crument par des projecteurs. Des tours de guets sortent des mitrailleuses, des barbelés hérissent la surface du sol. Les sanglots de sa femme et de sa mère. le regard de Wonho se pose sur les alentours, perçoit le scintillement des feuilles et le bruissement des bois si touffus, le gazouillement des oiseaux mêlés aux clapotis du cours d'eau en contrebas. « Se trouvent-ils seulement au fin fond des montagnes loin de la ville et non dans l'horrible enfer qu'il a imaginé ? » L'espoir se fraye un passage… Vite démenti par le ton cinglant des bowiwon, leurs regards haineux vis-à-vis de ces nouveaux prisonniers politiques, ces immondes réactionnaires. La zone de rééducation révolutionnaire va les engloutir.

Min-kyu, responsable du groupe numéro 1, consulte le dossier des ces arrivants. Cette photo, ce visage. Il reconnait en Su-ryeon la musicienne pour qui il nourrissait une passion restée dans l'ombre quatre années en arrière. La fiche indique « punition collective », son beau-père étant accusé de s'être converti au capitalisme et ayant fui en Corée du Sud. L'épouse, le fils et sa jeune femme sont donc complètement innocents et ignorants des raisons de leur arrestation.
Comment ne pas se soucier de la musicienne tant aimée, faire taire son coeur et sa pitié ? Toute compassion envers les détenus, ces ennemis considérés pire que des bêtes, est interdite. Des vies minables qui ne valent rien, Su-ryeon ne doit pas être traitée en tant qu'être humain mais Min-kyu s'en sent incapable.
Pour nourrir les siens, la jeune coréenne entièrement dévouée à sa famille, acceptera l'aide du responsable malgré les contreparties exigées.
Après la torture des privations, les douloureuses réprimandes humiliantes, la cabane se remplira de haine conjugale.
Cette cabane est un taudis aux planches pourries pleines de moisissures. Une cloche agressive perçant les tympans rythme les journées de labeur ; de la main d'oeuvre facile pour participer à l'effort révolutionnaire. Les chefs d'équipes, pourtant eux-mêmes prisonniers, redoublent de cruauté afin de conserver leur place et quelques avantages, ils font férocement valoir leur autorité à coups de fouet.
Les ordres menaçants, les saluts respectueux à prodiguer aux gardiens, les infamies, les situations avilissantes contrastent sur ce magnifique paysage boisé.

On attend des détenus une totale soumission car l'ombre de l'envoi dans la vallée des spectres s'étend sur eux au moindre faux pas.
Dans ce camp errent des visages émaciés, des silhouettes squelettiques portant des haillons rapiécés de partout, des regards chargés d'angoisse. Des épis de maïs à piler pour toute nourriture, la faim constante les pousse à accepter tout avilissement, la raison fuyant devant la moindre bouchée de nourriture.
L'hiver, gravir la montagne dans la neige et sous le vent cinglant, l'envie d'en finir en se blottissant dans la poudre blanche et pourtant, survivre malgré tout et se soumettre à l'instant présent. Chez eux, le passé s'efface et l'avenir a disparu, seul l'instinct animal les fait tenir. La notion d'individu est avalée par les privations et les cruautés subies. Ne leur reste que le pouvoir d'adaptation et le désir de ne pas renoncer à cette survie comme unique signe de résistance face à l'abject. Ne pas s'avouer vaincu.

Même entre les dirigeants du camp, la méfiance des uns, la fausseté des autres gomment toute confiance et ne laissent planer qu'une indispensable prudence. On sent la chape de plomb imposée par la dictature à tous ses sujets, sans exception.
Les brimades, les tortures morales, le lavage de cerveau, la famine, réussissent à ôter l'orgueil et l'estime de soi.
Le mépris pour lui-même envahit Wonho. Cependant, à aucun moment il ne remet en question le modèle Nord-Coréen. Lui et sa famille ont juste eu la malchance de connaître de trop près l'un des camps de redressement. C'est stupéfiant, affolant, de découvrir le niveau d'endoctrinement atteint par ce genre de régime.
Avec Wonho, Kim Yu-kyeong, ayant elle-même fui son pays, nous éclaire péniblement sur cette inconditionnelle obéissance des Nord-Coréens, leur habitude du contrôle communiste, leur totale ignorance des droits de l'homme.

Dans ce roman bouleversant, instructif et douloureux, le calvaire de l'oppression politique se double d'un enfer familial. La nature humaine se dévoile face à la survie mais aussi face à la trahison amoureuse.
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En septembre 2011, un roman nord-coréen était traduit pour la première fois en français, aux éditions Actes Sud. Deux amis, non dénué de qualité littéraire, permettait de découvrir une facette inattendue d'un pays dont le quotidien nous est très peu connu. le camp de l'humiliation n'a pas grand chose à voir avec ce livre, rédigé par une romancière nord-coréenne qui a fui pour la Corée du Sud dans les années 2000 et qui écrit sous le pseudonyme de Kim Yu-kyeong. L'ouvrage décrit un véritable enfer, celui vécu par un journaliste nord-coréen, sa femme et sa mère, arrêtés pour des raisons inconnus d'eux et immédiatement transférés dans un camp de travail où les brimades sont monnaie courante et la survie la seule espérance possible. La romancière décrit cet univers avec un luxe de détails sidérant, s'insinuant dans l'intimité des ses trois personnages auxquels s'ajoute un autre, un gardien, qui a des vues sur la femme du journaliste. A la limite du supportable dans son compte-rendu des faits et gestes des prisonniers du camp, Kim Yu-kyeong y mêle une intrigue perverse où la suspicion et la haine viennent contaminer l'équilibre précaire de la famille internée. C'est une sorte de thriller ou de roman noir qui se déroule sous nos yeux, peu avare de scènes atroces où la dignité humaine n'a plus sa place. le dernier quart du livre est d'autant plus surprenant, dans un environnement différent (il serait criminel d'en dire plus) mais où certains des personnages du livre vont continuer à se déchirer. Au-delà de la dénonciation sans ambages du fonctionnement du régime de Pyongyang et de sa manière de traiter ses opposants politiques, qu'ils soient avérés ou non, le camp de l"humiliation vaut surtout pour ses qualités de narration et son sens du suspense, même si la dernière partie est un peu moins crédible que le reste. Mais elle est très romanesque et fait du livre autre chose qu'un simple (!) brulot anti Corée du Nord.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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Un roman nord-coréen assez récent paru chez Picquier aborde le sujet du sort de la population civile nord-coréenne dans les années 1990 . On peut imaginer que la situation n'a guère évolué depuis.
L'histoire fictive, bien qu'inspirée par des faits réels basés sur les témoignages recueillis par l'auteur, ainsi que sur ses propres expériences, raconte la déportation dans un camp de travail d'un jeune couple et de la mère de l'époux, sans que nul ne sache les raisons de cette sanction. Pas de condamnation par un tribunal (même improvisé), pas de sentence donc, sauf un débarquement au domicile du couple de deux policiers qui a ordre de les embarquer pour une destination inconnue.
La plus grande partie du roman est consacrée à la « vie » dans ce camp, puis à la fuite de l'époux Wonho, qui finit par être réfugié en Corée du Sud et retrouver sa femme (qu'on avait laissé pour morte au camp).
Puisque ceci est une chronique où l'on apporte son avis, je donne le mien : je n'ai pas été particulièrement ni remuée, ni bouleversée, ni attendrie (sauf par l'histoire du petit garçon). Alors j'imagine les réactions épouvantées des rares lecteurs de ces lignes.
Mais reprenons le début et le projet de l'auteure (ou ses intentions) : apporter un témoignage implacable sur l'infâmie, l'horreur absolue, l'humiliation, la déshumanisation complète de ces prisonniers. Mais son choix d'en faire une fiction, un roman avec des personnages fait (j'insiste à mes yeux) capoter le projet. Certes ce qu'elle décrit est abominable, barbare ; cependant, malheureusement, ce n'est pas nouveau (réplique : ce n'est pas une raison pour se taire ; réponse : oui, parlons-en) mais, ici, la romance gomme, affadit, les faits.
Car, le roman dégouline de situations et de personnages empreints d'un sentimentalisme mélodramatique qui m'ont sérieusement agacée et qui ont véritablement gâché ma lecture.
Ainsi, la relation triangulaire entre le couple et le bowiwon Chae, la première maternité, puis la seconde, le comportement du collègue de Chae, les bons prisonniers.
Et cette sorte de lassitude a été sans nul doute créée également par l'écriture. D'une part, elle est insupportable de répétitions (aussi bien dans les idées que dans le vocabulaire) , à force de vouloir donner moult détails qui cassent les émotions que pourrait ressentir le lecteur. D'autre part, elle relève d'un registre oral populaire (exemple : il y a, c'est, ça, que ce qu'on, etc…). Lourdeur et longueur pèsent et encombrent le récit qui perd ainsi la brutalité et la violence qu'il devrait porter.
Chronique sévère qui n'interdit pas de saluer l'auteure pour son travail.
Au sujet de la Corée du Nord, je recommande la lecture de « La Dénonciation « de Bandi paru chez Picquier également.
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Waouh que dire de ce roman à part que j'en suis sortie chamboulée. Je vous préviens d'avance, il faut s'accrocher !

Je me méfie toujours des ouvrages édités en Corée du Sud et écrit par des Nords-Coréens car il y a eu plusieurs fois des cas d'ouvrages commandés par le gouvernement du Sud dans un but purement politique et non littéraire ou encore humanitaire. Mais ce roman est particulier car il met l'humain en avant avant tout. On oublie pendant la majorité du roman que le camp se trouve en Corée du Nord et c'est un des points que j'ai aimé, le fait que l'humiliation d'êtres humains, la torture, l'acharnement soit au final universel.

L'écriture est simple mais nous plonge au coeur du psychisme de nos personnages en exposant tout, la moindre pensée intime, la moindre réflexion immonde... Nous suivons un trio : un mari et sa femme et un des gardiens du camp qui connaissait cette femme avant qu'elle soit déportée.

On est pris en apnée à certains moments à cause de la dureté de certaines scènes, des pensées abominables de certaines personnes et surtout de comment une famille qui s'aime autant peut parvenir à se déchirer à ce point là quand le seul mot qui règne dans leur esprit est "survie". Tous les personnages sont complexes et c'est surtout cela que j'ai aimé, rien n'est noir, rien n'est blanc mais tout est coloré en des nuances de gris. J'ai beaucoup aimé aussi de voir comment l'enfermement, le fait de devoir survivre à tout prix peut changer des êtres humains en quelque chose d'abject.

Je ne vous en dirais pas plus mais la fin est juste waouh !
Lien : https://labullederealita.wor..
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Imaginez que du jour au lendemain, sans crier gare et sans rien n'y voir venir, vous, vos proches ou votre famille soyez déportés pour des raisons fallacieuses. du jour au lendemain, sans y comprendre les raisons, sans comprendre le pourquoi du comment, vous vous retrouvez avec une étiquette de danger pour la nation. Vous voila devenu une menace. Vous voilà dans le camp de l'humiliation.

C'est une histoire que j'ai trouvé prenante sous plusieurs aspects. Tout d'abord, les personnages qui évoluent au fil des années tout en subissant les pires humiliations possibles. j'ai été à moitié étonné de voir comment l'humain peut s'adapter pour survivre à l'innommable et ce quitte à devenir, lui-même, un bourreau. La manière dont évoluent les personnalités, les caractères, la psychologie, les sentiments de chacun accentue la pression psychologique de l'histoire. Là aussi, il y a un combat psychologique tellement intense qu'il finit par vous dévorer, lui aussi, de l'intérieur. C'est là carrément un point fort de l'histoire. Globalement, l'histoire est une véritable torture autant psychologique et physique. Elle vous roule dessus avec fracas et vous porte à l'inanition.

C'est une histoire où vous ne trouverez aucune dignité humaine ou très peu. C'est d'une cruauté inimaginable et pourtant cela existe bel et bien. Cela a existé, cela existe et cela continuera toujours d'exister... Et les seuls gestes de tendresse deviennent marchandages et manipulations.

Seul bémol. La dernière partie périclite un peu. La manière dont construction de l'histoire se termine change un peu la donne et montre, à mon humble avis, une forme de difficulté d'adaptation sociale après des années de traumatisme.

Globalement, c'est une histoire prenante qui dépeint une sorte de réalité dans un pays où rien ne filtre ou presque. Je me garderai, toutefois, un droit de réserve.
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Su-Reyon croit comprendre à présent pourquoi les habitants du camp tiennent autant à la vie, même s'il sont traités comme des bêtes. Ce n'est pas seulement pas par peur de la mort ou par instinct de conservation ; c'est parce qu'ils trouvent trop injuste ou révoltant de mourir si absurdement ; il s'agit là d'une forme de résistance admirable contre un pouvoir qui attente à la vie à tort et à travers. Les gens du camp frôlent la mort à tout moment, et pourtant ils font tout pour survivre

Page 181.
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Wonho comprend que lorsque les humains tombent au plus bas, ils oublient facilement le passé et le futur mais possèdent l’instinct incroyable de ses soumettre rapidement à la réalité présente. Au début, ils se lamentent sur leur destin ou ils ont la nostalgie de leur vie d’avant, mais ça ne dure pas longtemps. Le souci de l’avenir ne tarde pas non plus à disparaître. Ils n’ont pas le temps de penser au lendemain, encore moins à un futur lointain.
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On dit que ceux qui sont isolés dans cette vallée sont des criminels politiques criminels, politiques dangereux mais rien chez les gens d’ici ne laisse penser qu’ils le sont. Ils ne se soucient aucunement d’idéologie. Ils ne font que supporter péniblement chaque heure puis chaque jour, orientés vers la survie.
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La réalité juste sous leur nez est cruelle et leur serre la gorge. Même en consacrant toute leur énergie à l’instant présent, ils s’en sortent difficilement. Dans un bain public, tout le monde est nu et personne n’éprouve de honte. Il en est de même dans cette vallée : les comportements et les actes les plus lâches, les plus impudents et abjects qui soient, y sont considérés comme normaux.
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Les actes et les comportements les plus lâches, les plus impudents et abjects qui soient, y sont considérés comme normaux. Cet endroit pousse les gens à considérer la vie comme vide de sens et à éprouver de l'indifférence pour les autres et du mépris pour eux-mêmes.

Page 114.
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