Et je me demande : qui a rêvé ? Qui a rêvé cette histoire ? Qui l’a imaginée ? Elle ? Lui ? Tous les deux ? Chacun pour l’autre ? Et à partir de quel moment leur vie réelle s’est-elle transformée en cette fantaisie perfide ?
L'érotisme, commercialement, est une chose ambiguë car si tout le monde convoite la vie érotique, tout le monde aussi la hait comme la cause de ses malheurs, de ses frustrations, de ses envies, de ses complexes, de ses souffrances.
Toute femme mesure le degré de son vieillissement à l'intérêt ou au désintérêt que les hommes manifestent pour son corps.
Deux êtres qui s’aiment, seuls, isolés du monde, c’est très beau. Mais de quoi nourriraient-ils leurs tête à tête ? Si méprisable que soit le monde, ils en ont besoin pour pouvoir se parler.
Gérer un silence exposé aux yeux des autres n’est pas chose facile.
J'imaginais la vie devant moi comme un arbre. Je l'appelais alors l'arbre des possibilités. Ce n'est que pendant un court moment qu'on voit la vie ainsi. Ensuite, elle apparait comme une route imposée une fois pour toutes, comme un tunnel d'où on ne peut pas sortir.
“Partir. Oui, c’est le seul dénouement possible, mais où aller ?”
Or, notre siècle nous a fait comprendre une chose énorme : l’homme n’est pas capable de changer le monde et ne le changera jamais
Je reçois les dossiers des gens qui recherchent un emploi chez nous. Je dois les recommander ou donner un avis négatif. Il y en a parmi eux qui, dans leur lettre, s'expriment en un langage si parfaitement moderne, avec tous les clichés, avec le jargon, avec tout l'optimisme obligatoire. Je n'ai pas besoin de les voir ni de leur parler pour les détester. Mais je sais que ce sont eux qui vont travailler bien et avec zèle. Et puis il y a ceux qui, certainement, en d'autres temps, se seraient consacrés à la philosophie, à l'histoire de l'art, à l'enseignement du français, mais aujourd'hui, faute de mieux, presque par désespoir, ils cherchent du travail chez nous. Je sais que secrètement ils méprisent le poste qu'ils sollicitent et qu'ils sont donc mes frères. Et je dois trancher.
A ces mots, il la reprend et, balancé sur les vagues de fantaisies qu'elle ne cesse de lui dire, il lui refait l'amour.
Puis, tout se calme; ne reste devant ses yeux que sa chemise rouge, froissée par leurs corps, à un coin du lit. Devant ses yeux à demi fermés, cette tache rouge se transforme en une plate-bande de roses et elle sent le parfum frêle presque oublié, le parfum de la rose désirant embrasser tous les hommes.