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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Les Maximes, omnes miskīn,

Durant des siècles, les mortels n'avaient pour seule consolation existentielle que les Saintes Ecritures, et ne pouvaient déchiffrer l'âme humaine qu'à partir des exégèses et des paraboles sacrées, parfois déjà fragmentaires, comme sous la plume de Pascal dont les “Pensées” ne sont brèves que faute d'avoir été proprement rédigées du vivant de l'auteur.

Puis sont arrivés les “moralistes” de Vauvenargues à Chamfort au XVIIIe siècle, puis de Schopenhauer à Nietzsche au XIXe, et même plus proche de nous Cioran, mais le premier et le plus emblématique d'entre eux est sans conteste La Rochefoucauld, qui fait paraitre ses Maximes en 1664.

C'est avec ces pensées, maximes ou aphorismes, que l'aristocrate français du XVIIe siècle nous offre une alternative plus incarnée et sans folklore pour nos introspections laïques.

Il n'est pas très aisé bien sûr de résumer un ouvrage sans thème (ou cent thèmes…), en effet les traits les plus divers de nos personnalités, de nos rapports humains sont abordés, déshabillés, démasqués en seulement quelques caractères (comme dirait La Bruyère…), autant dire que François de la Rochefoucauld aurait fait fureur aujourd'hui avec ses “tweets”, tantôt drôles ou acerbes, et d'une limpidité et d'un péremptoire vertigineux.

Nous sommes loin des conseils des vieux sages comme Marc-Aurèle ou Confucius, il n'est plus question d'aider et de dicter une conduite, mais d'observer l'humain dans tous ses travers, de le décrire, de le dépeindre, de le juger, le critiquer. La Rochefoucauld traque toutes les hypocrisies du Grand Siècle, mais ce n'est pas gratuit car c'est bien notre faculté de jugement critique qui peut nous permettre à partir de ces Maximes, de corriger ou d'accepter notre sort et nos tares et de comprendre nos semblables.
Ce qui impressionne le plus c'est d'avoir pu ainsi croquer l'humain, ce que des années de psychanalyse aujourd'hui font accoucher, en quelques mots, magistralement agencés, dans une suite implacable, irréfragable…

Bon mais en fait pas toujours non plus! Par exemple, “Ceux qui s'appliquent trop aux petites choses deviennent ordinairement incapables des grandes” est-ce qu'on pourrait pas en tirer l'inverse conséquence ? C'est en s'occupant des petites choses avec le plus d'attention qu'on se prépare à s'occuper des grandes ? Et quand bien même François avait raison, ceux qui sont obsédés de la virgule dans un e-mail n'ont pas la “big picture” comme on dit dans la langue managériale, on a envie de dire tant mieux parce que c'est pas ce qu'on leur demande… Y a des grands manitous pour ça !

“Peu de maximes sont vraies à tous égards” écrivait Vauvenargues, jugé plus stoïcien que La Rochefoucauld (les deux hommes publient leurs maximes à moins de trente cinq ans tout de même…). Une maxime est aussi un parti pris, mais ce serait un exercice amusant ça, faire des contre-maximesDe La Rochefoucauld, allez qui commence ?

Qu'en pensez-vous ?
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Enfermées dans les cadres culturels de leur époque, leur brièveté incitant à la réflexion et la cohérence de leur construction : telles sont caractéristiques des maximes !
Cependant, « le point faible d'une maxime est de livrer un trait de la nature humaine en l'isolant avec la même rigueur que la tragédie enferme un caractère dans une fatalité (…). Toute maxime donne l'impression de quelque chose d'arrêté, et cette immobilité semble trahir la vie, essentiellement mobile ». (Gérard BAUER)

En relisant ce recueil, le constat est évident ! le pessimisme, de François de la Rochefoucauld, fondé sur la conviction que « les vertus se perdent dans l'intérêt comme les fleuves dans la mer » est inspiré de saint Augustin ; mais il tient son originalité du fait qu'il joint à une vaste culture humaniste, une expérience de l'amour et de l'honnêteté : derrière la morale systématiquement désabusée, un idéal de gloire, une confiance (presque honteuse) dans les valeurs humaines…

Par la pureté de la langue jusqu'à la préciosité parfois, les Maximes, de ce frondeur et d'homme d'épée (telle est l'étiquette dont il s'est toujours attaché à garder de son vivant), contribuent à donner une nuance personnelle à un genre nécessairement impersonnel.
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Critique d'Edith Mora dans son livre "François de la Rochefoucauld" chez Seghers, 1965 :
En réalité, ce qu'il voudrait implanter dans l'être profond de ceux pour lesquels il écrit, ce qui est, en définitive, pour lui, le véritable honneur de l'homme - du gentil-homme - c'est la lucidité : il ne faut pas se mentir à soi-même. Audacieuse, orgueilleuse morale, certes, que celle du for intérieur. Morale de cynique ou de martyr ? Elle peut être l'une et l'autre.

Et quel final laisse-t-il entrevoir à ceux qui auront le courage - le vrai courage - d'arracher de leur MOI la peau des apparences ? Quel espoir, après cette mise en pièces de la morale, usée mais qui semble solide encore ? ... Seulement l'honneur de SAVOIR.
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Au compte goutte des maximes composées, des sentences ou réflexions morales la mode des conversations intellectuelles tenues dans le salon de madame de Sablé que La Rochefoucaud aimait à fréquenter, répondant à un projet polémique élaboré au 17ème siècle, ou l'abandon d'un vieil idéal placé dans un contexte particulier. Il semble que le genre des pensées séparées se soient constitué en grande partie autour du problème de la valeur humaine.
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Lecture divertissante qui réserve de nombreux sourires et quelques éclats de rire...
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Un très bon recueil, qui semble toujours d'actualité, avec cependant quelques inégalités. Ces Maximes restent tout de même très agréable à lire et donnent beaucoup à réfléchir.
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François, duc De La Rochefoucauld (1613-1680) faisait partie de la très haute noblesse. Hostile à Richelieu et à Mazarin, il a participé à la Fronde, qui a été un grand échec. Passablement déçu voire aigri par la tournure des événements, il n'a pas eu la destinée qu'il espérait. Ce fut sans doute sa principale motivation pour rédiger ses "Maximes", qui sont empreintes de pessimisme et d'acidité. Ces brèves formules, parfois vengeresses et d'ailleurs pas toujours bien tournées, ne peuvent pas se lire toutes les unes après les autres. Il est possible d'en lire deux ou trois de temps en temps, au hasard, et de tomber ainsi sur une des maximes qui frappe juste.
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