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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Coup de coeur pour ce thriller qui se passe au début des années 30 au moment de la grande dépression dans l'East Texas gangrené par le racisme.
Deux femmes sont trouvées sauvagement assassinées et mutilées dans les marécages prés de la rivière Sabine et comme elles sont noires c'est pas bien grave pour les blancs du coin.
Une troisième femme, blanche cette fois, est retrouvée morte dans les mêmes conditions et cette fois c'est sérieux . Et bien sûr comme ça ne peut-être qu'un noir qui a commis ces crimes atroces le Klu Klu Klan, qui fait régner la terreur et se substitue souvent à la loi, intervient…
Le début de cette triste histoire qui dure 2 ans se déroule sous les yeux d'un garçon de 11 ans Harry, qui a trouvé la première victime en compagnie de sa soeur Thomasina dite Tom, 9 ans, alors qu'ils jouaient dans les marécages.
Harry, fils de Jacob, coiffeur, fermier et constable, chargé de représenter la loi si besoin est.
Jacob, pas toujours bien vu par certains, car considéré comme le copain des noirs parce qu'il traite ceux-ci avec respect mais qui reconnaît une part d'ombre en lui-même qui l'amènera involontairement à être à l'origine de la mort d'un innocent. Une tragédie dont il aura beaucoup de mal à se remettre.
Bouleversé par ce père qu'il ne reconnaît plus, Harry, aidé par sa mémé, une femme indépendante et pleine de fantaisie, essaye de retrouver le coupable qu'il ne trouvera finalement qu'incidemment et dans des circonstances dramatiques.
Un Harry émouvant, qui de nombreuses années après, âgé de plus de 80 ans et malade, attend la mort dans une maison de retraite et pour l'oublier un instant se remémore de douloureux souvenirs qui lui ont volé une partie de son enfance et fait perdre pas mal d'illusions.
Mais des souvenirs qui ,paradoxalement, lui réchauffent le coeur car il y retrouve toute sa famille qu'il aimait tant ainsi que son chien Tobby et cette nature devenue méconnaissable tellement elle a été défigurée.
Un roman sombre, sensible et puissant qui nous fait bien ressentir la pauvreté, le racisme et particulièrement la grande force des préjugés car comment expliquer autrement que dans leur jeunesse des gamins noirs et blancs jouent ensemble et pour certains même élevés par une femme noire qu'ils considèrent comme leur mère, puissent devenir racistes à l'âge adulte...
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Y en a qui trouvent des oeufs de Pâques et puis y en a qui trouvent des cadavres. Harry et sa petite soeur se situeraient plutôt dans la deuxième catégorie. Jamais bon d'aller trainer dans les marais. La mauvaise nouvelle, ce corps mutilé qui fait un peu tâche dans le paysage. La bonne, il est noir. Et dans cette région du Texas où le KKK sévit majoritairement, ce serait même plutôt Noël avant l'heure.
Le père de Harry est coiffeur de métier, constable à temps partiel. Pas de shérif à déclarer dans cette petite bourgade, trop de responsabilités.
Son défaut, vouloir faire la lumière sur ce qui apparaît être le crime d'un "ambulant " alors que n'importe quel nègre ferait l'affaire et occasionnerait ainsi une pendaison dans l'heure. C'est qu'on a placé très haut le niveau de marrade dans le coin.
La chance, ça va un temps. Aussi, dès que les macchabées commenceront à tirer sur le clair, les joyeux encagoulés et leur clique débilitante, paradoxalement, verront noir au point de réclamer enfin un coupable digne de ce nom !

Chacun connait l'univers impitoyable de Dallas, mais ça, c'était avant de percuter frontalement celui de Lansdale.
Un racisme pleinement reconnu et assumé, des crimes en série, des marais tout plein de gens qui font rarement marrer, amis de la gaudriole et de la dérision, bonsoir !

En ce début des années trente, Lansdale y décrit magistralement la délicate condition de noir perçu bien moins qu'une bête et tout juste bon à se balancer au bout d'une corde. Qu'y a t-il de plus détestable qu'un noir, un blanc qui épouse leur cause. Jacob, devenu shérif à temps plein et moderniste avant l'heure, s'y brûlera les ailes.
Le contexte est étouffant, la région n'incite pas au tourisme. L'auteur fait de ces marécages un personnage incontournable de ce grand roman, ajoutant encore un peu plus à ce sentiment d'oppression diffus au fil des pages.
Lansdale s'attache également à la perte de l'innocence. A ce virage de l'adolescence attaqué pleine bourre par un gamin insouciant qui vit là ses premières désillusions.

Attaquer Les Marécages, c'est se préparer à une sale apnée et une remontée sans paliers de décompression.
Quelques rares personnages viendront cependant apporter un peu de douceur dans ce monde de brutes mais de façon bien trop sporadique pour éprouver finalement la moindre empathie envers un genre humain en-dessous de tout.
Le constat est sans appel, noir c'est noir, il n'y a plus d'espoir...
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Une fois de plus je ne peux que mesurer la chance que j'ai d‘être accro au site Babelio. Sans ce site, et surtout sans ses nombreux membres, leurs avis et les challenges qu'on y trouve, jamais je ne serais sortie de ma zone de confort, et j'avoue que découvrir de nouveaux auteurs, j'adore ! J'adore d'autant plus quand la lecture devient un véritable coup de coeur ! Cela a été le cas pour ma part pour Les marécages de Joe R. Lansdale, auteur, dont à ma grande honte (si si, je vous assure que j'ai honte !), je ne connaissais même pas le nom…
Et là, je suis entrée tranquillement dans un univers poisseux, humide et surtout noir de chez noir avec ces marécages de l'est du Texas. Alors que je pensais que cet état était particulièrement sec, il a fallu que je revoie ma géographie pour mieux planter le décor et favoriser ma compréhension de l'histoire, car des marécages, il va y en avoir.
Nous allons plonger dans le passé par le biais des souvenirs d'un vieil homme Harry. Il se rappelle son enfance, dans cette terrible période des années 30, aussi appelée la Grande Dépression. Nous faisons donc la connaissance de la famille de Harry qui a onze ans à l'époque, de sa petite soeur Tom et de ses parents. le père, Jacob, peine à joindre les deux bouts et en plus d'être agriculteur, travaille comme coiffeur et fait office de constable.
Les deux enfants vont bientôt faire une découverte macabre en trouvant un cadavre de femme dans la foret. La victime était une femme noire et nous sommes dans un coin paumé du Texas où le Klu Klux Klan est bien présent et où les conditions des noirs n'ont pas beaucoup évolué depuis la guerre de Sécession. le seul officier de justice est Jacob et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il se trouve bien isolé au milieu d'une communauté blanche pour qui le coupable est tout désigné.
J'ai beaucoup aimé cette histoire vue à travers les yeux du jeune Harry et elle m'a tenue en haleine du début à la fin.
L'ambiance est sombre, je dirais même très noire, et l'auteur a restituer avec beaucoup de talent l'atmosphère de l'époque.
Une très belle découverte, et je ne rajouterais qu'une chose : j'ai bien l'intention de continuer ma découverte de l'oeuvre de Joe Lansdale, qui vient de se hisser sur le podium de mes auteurs favoris.



Lecture Commune Polar Mars 2019
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Dans la chambre de sa maison de retraite, un vieil homme se souvient...
Nous sommes dans un coin reculé de l'Est du Texas, en 1933, dans une Amérique où s'éternise la Grande Dépression.
Deux enfants, Harry Collins le frère qui a treize ans et Tom la soeur qui a neuf ans adorent jouer tout près de chez eux, par-delà la grande forêt qui jouxte la propriété des parents et leurs quelques arpents. Jacob le père est coiffeur, il exerce aussi la fonction de constable de la petite ville de Pearl Creek, c'est-à-dire qu'il est une sorte de shérif.
Le reste du temps, lui et sa femme tiennent une petite ferme. C'est un couple aimant, harmonieux, ils essaient d'élever leurs enfants avec amour, dignité et rigueur, dans les valeurs qui les animent.
La narration se fait à hauteur de cet enfant, Harry, qui longtemps après, se souvient des événements...
Les parents de Harry et Tom sont des progressistes, autant dire qu'ils déparent dans le paysage sociologique du comté. Cela ne leur viendrait pas à l'idée de pas traiter les Noirs d'égal à égal. Pourtant, Jacob sait que sa réputation qu'on lui colle d'être « l'ami des Noirs » pourrait un jour lui jouer un mauvais tour, et ce ne sera pas alors son statut de constable qui le protègera... Ici c'est souvent encore la loi du Ku Klux Klan qui a le dernier mot : au mieux c'est du goudron et des plumes, au pire c'est une corde balancée à une haute branche ou bien un pneu qu'on arrosera d'essence...
Les marécages forment une aire de jeu formidable, peuplés de rougets, de tiques, de serpents et d'endroits aussi inquiétants que fantasmagoriques pour les enfants. Ceux-ci aiment s'y perdre, inventer des histoires, des univers, imaginer que ce personnage de légende qu'on surnomme l'Homme-Chèvre et qui se cache parmi les ombres des bayous vient les terroriser...
C'est là qu'un jour le jeune Harry et la petite Tom vont découvrir l'horreur au fond des marais : le cadavre d'une femme noire mutilée sauvagement.
Plus tard, un second cadavre tout aussi mutilé que le premier, cette fois encore d'une femme noire, est retrouvée de nouveau dans les marécages, la scène de crime semble ressembler à s'y méprendre à la première. L'enquête avance, piétine dans l'indifférence générale de la communauté blanche de Pearl Creek. « Tant que ce sont des femmes noires, qui plus est, des prostituées... » Ce sont ces mots sinistres, glaçants qui viennent aux oreilles de Jacob.
Et si c'était l'Homme-Chèvre, l'assassin ?
Mais un jour, c'est une femme blanche qu'on retrouve égorgée au fond des marais. Là le ton change dans l'opinion publique de la petite bourgade et les membres du Ku Klux Klan ne vont pas tarder à reprendre du service...
Les marécages, c'est une plongée en apnée dans l'Amérique profonde et poisseuse gangrenée par la ségrégation ordinaire.
Si ce thriller aux allures de roman noir tient toutes ses promesses dans une intrigue haletante, le paysage glauque et nauséabond de ces marécages représente bien le personnage principal, figurant comme une allégorie la communauté des hommes de ce sud des États-Unis des années trente... La toile de fond du récit devient vite une caisse de résonance assourdissante...
J'ai trouvé ici une force d'évocation puissante dans la façon de raconter une histoire, de dépeindre des personnages qui s'étoffent, se dévoilent, s'unissent, s'opposent, entrent en scène dans une dramaturgie qui nous tient en haleine. Heureusement, dans cette atmosphère oppressante, il y a la tendresse innocente de deux enfants qui découvrent l'horreur du monde des adultes, ils ont le chic pour mettre les pieds là où il ne faut pas, ou bien encore laisser traîner leurs oreilles, entendre des choses qui ne sont pas de leur âge. Mais surtout, il y a Mémé qui débarque inopinément et va donner un sérieux tour de force à cette enquête qui s'enlisait dans les sables mouvants du paysage environnant. Ah ! Comme j'ai adoré ce personnage aussi attachant que décoiffant... Et attention ! Il ne faut pas pousser Mémé dans les orties du bayou !
Les marécages, c'est ma première incursion dans l'univers romanesque d'un certain Joe R. Lansdale autour duquel je rôdais déjà depuis pas mal de temps. Inutile de vous dire que je reviendrai vite découvrir d'autres récits de cet écrivain qui m'a totalement séduit.

Southern trees bear strange fruit,
Blood on the leaves and blood at the root,
Black bodies swinging in the southern breeze,
Strange fruit hanging from the poplar trees.

Pastoral scene of the gallant south,
The bulging eyes and the twisted mouth,
Scent of magnolias, sweet and fresh,
Then the sudden smell of burning flesh.

Here is the fruit for the crows to pluck,
For the rain to gather, for the wind to suck,
For the sun to rot, for the trees to drop,
Here is a strange and bitter crop.

[Billie Holiday - Strange Fruit]

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Harry est en maison de retraite, pas grande chose à faire, à part ruminer des souvenirs de jeunesse,
comme le jour où il découvre, à l'âge de 13 ans, près de chez lui, le corps affreusement mutilé d'une femme dans les marécages.
La nouvelle se répand comme une trainée de poudre autour de son village du Texas et pour le KKK qui fait légion dans la région, y'a que les Noirs pour faire ça...
Pour eux, contrairement à son père qui fait office de shérif en plus de celui de coupe tif', la recherche du coupable, c'est du temps perdu...Pas pour le jeune Harry qui compte bien aider son père dans cette enquête qui s'enlise....
Joe R. Lansdale, déjà lu dans un autre registre plus fendard avec le duo Hap et Léonard. Avec ce roman noir qui galope dans le Texas du sud aux mains des cagoulés, fait pas bon avoir la peau mate, surtout quand il y a des meurtres. La corde te pend au nez...C'est ce que va découvrir le jeune Harry qui peut s'appuyer sur son père mi étoilé et sur sa mémé bien armée pour l'aider à lutter contre les nombreux préjugés des encagoulés et les légendes marécageuses qui embourbent le coin.
Avec Les marécages , on marche dans les pas de la nuit d'un chasseur de David Grubb avec en prime le KKK à nos trousses.
Du grand Landsdale qui te coupe la chique et le chou !
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Un roman si beau qu'il fait mal au ventre, tant il vous remue à l'intérieur. Un peu comme quand on tombe amoureux.

Se morfondant dans sa maison de retraite, Harry se souvient de cette année 1933 où, alors âgé d'une douzaine d'années, il a découvert le cadavre mutilé d'une femme dans les marécages jouxtant la propriété familiale. Il raconte comment son père, constable de ce minuscule patelin du Texas, a tenté de mener l'enquête sur ce crime, avec les moyens réduits de l'époque et dans un contexte de racisme décomplexé, et comment il a tenté de l'aider en jouant les apprentis détectives.

Plus qu'un livre policier à l'intrigue bien troussée et au suspense bien entretenu, c'est avant tout un roman d'ambiance et d'apprentissage, une féerie cauchemardesque qui sonne la fin de l'innocence et le glas du paradis perdu. Il y a un côté « Southern gothic », avec ses monstres fantasmés et réels, ses ciels étoilés et ses feux d'artifice, qui m'a fait penser à la poésie onirique de « La nuit du chasseur ». J'ai beaucoup aimé ses paysages sombres, humides et touffus, où bruissent les arbres et murmure la rivière, et où la Nature est souveraine. Mais on est aussi dans le Sud, au pays du Klan, des pactes avec le Diable, de la Grande Dépression, et Joe R. Lansdale décrit sans concession un monde dur, violent, et terriblement pauvre, où les femmes cousent leurs robes dans des sacs de pommes de terre.

Cependant, la puissance de cette histoire est qu'elle est racontée par un vieil homme qui a conservé une forme de candeur d'enfant. Sa narration est empreinte de nostalgie, elle a la saveur des dernières années d'innocence, quand le simple fait de se sentir en sécurité en famille confinait au bonheur : « On rentra à la maison en voiture, les vitres ouvertes ; le vent d'Octobre était frais et sentait bon la forêt. Repu de tarte et de limonade, j'étais heureux. » Avant que le monde des adultes ne saccage tout. J'ai rarement lu un livre qui aborde ce thème avec autant de justesse, et certaines réflexions d'Harry m'ont profondément émue.

C'est donc un roman qui m'a happée, difficile de le lâcher une fois commencé, et je l'ai refermé à regrets, j'aurais voulu ne jamais quitter Harry et ses souvenirs. Je ne connaissais pas cet auteur, qui m'a parfois fait penser à William Gay, mais il m'a émerveillée par son mélange de poésie, de douce mélancolie, et de réalisme suffocant. J'ai bien l'intention de découvrir ses autres romans, et je vous souhaite d'être aussi subjugués par celui-ci, que je l'ai été.

Mais surtout, ne lisez pas la 4e de couverture, qui en révèle bien trop ! Abordez cette lecture avec la même fraîcheur rémanente que Harry, et votre voyage n'en sera que plus (douloureusement) enchanteur.
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C'est officiel ce livre sera un de mes coups de coeur 2023.
Une critique enthousiaste de Foufoubella m'avait donné envie de découvrir ce livre. Ajoutez que l'auteur est sur la liste 2023 du challenge solidaire (donc c'est l'occasion de faire une bonne action en lisant !) et que le livre que je lis actuellement n'est pas franchement passionnant....
Bilan j'ai dévoré ces "Marécages". Foufoubella, dans sa critique, fait un parallèle avec "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur". Ca m'intrigue, c'est un livre que j'ai vivement apprécié. Mais ça me paraît toucher aussi à un monument....
En fait je confirme le parallèle : on est à hauteur d'enfant (le narrateur a 12 13 ans), on est dans le Texas des années 1930. Donc si la Guerre de Sécession a libéré les Noirs de l'esclavage, pour autant.....
.
Le héros, un vieux monsieur en fin de vie, se rappelle ses années et surtout cette année-là, quand, avec sa jeune soeur, il va découvrir le cadavre torturé d'une jeune femme noire.
Une enquête mais pas que. Une étude de la vie de l'époque (des Blancs, des Noirs et de leurs relations, enfin relations...), une fine analyse psychologique des personnages (je pense au père, une image magnifique mais pas magnifiée ! Il est présent avec ses réflexions, ses analyses, ses failles, ses erreurs....).
Un livre remarquable qui va parler du traitement que les Noirs subissent à l'époque. Un livre parfois oppressant, toujours sur le fil (tranchant). Un livre que j'ai déjà conseillé à toute ma famille. Un livre remarquable, marquant, beau en un mot.
Merci Foufoubella pour cette découverte !
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En revenant le long des berges de la Sabine, Harry, douze ans et Tom (Thomasina) sa petite soeur de huit ans découvre un petit tunnel fait de ronces, de branchages et à la sortie de ce tunnel une masse sombre, il s'agit d'un corps abîmé, coincé dans du barbelé et que la rivière, dans sa décrue, a laissé à l'air libre.... Jacob, leur père, coiffeur, agriculteur et constable de Marvel Creek, se charge des premières constatations. le corps est celui d'une prostituée noire, il y a eu viol, strangulation et, post-mortem, des blessures par arme tranchante, elle a par la suite, été attachée autour d'un buisson avec du fil barbelé. Cette nouvelle passe pratiquement inaperçue dans cette petite ville de l'East Texas, toujours marquée par le racisme - nous sommes en 1933 - et par la terrible dépression économique...Quand l'on retrouve tout aussi abimé, le corps d'un femme blanche - dont le sac à main a été repêché par Mose, un vieux noir habitant près de la Sabine - le climat change, les passions irrationnelles se réveillent et le Ku Klux klan entre en scène...

Dans cette Amérique blanche, rurale des années trente, difficile d'avoir la peau noire, la ségrégation est marquée entre les différents quartiers et entre les habitants, les noirs consultent le médecin noir et inimaginable qu'un blanc le consulte. Et c'est au travers des souvenir du narrateur Harry, enfant à l'époque que l'on fait connaissance intimement avec la mentalité de cette petite ville du Texas...Une ville où des meurtres de femmes noires n'intéressent personne, mais qui va s'enflammer lorsqu'une femme blanche sera l'une des victimes. le jeune Harry va, avec son père et même avec sa grand-mère, essayer de démêler les fils de ces meurtres et prendre conscience quelquefois douloureusement, de la confrontation de ces deux mondes. Un apprentissage où il va côtoyer les habitants, découvrir les tensions, le passé de quelques uns d'entre eux, des personnes attachantes et d'autres prêtes à tuer pour une couleur de peau ou les légendes encore vivaces comme cet Homme-chèvre qui semble habiter les marécages. Un passage à l'âge adulte violent et dramatique.
Les marécages est une première découverte des romans de Joe R. Lansdale, c'est plus un roman qui privilégie l'ambiance, un roman dans lequel le contexte prime sur l'enquête proprement dite, une lecture que j'ai beaucoup aimée, qui m'a ramenée comme d'autres babeliotes, dans l'univers de Harper Lee pour son sujet, ou de Ron Rash pour la tension dramatique.
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J'ai découvert Joe R. Lansdale il y a quelques années avec "Les enfants de l'eau noire" un roman qui m'avait marqué,  je l'ai retrouvé ici avec le même plaisir.
En fait, c'est un auteur, dans une vidéo pour le Quai du polar virtuel 2020, qui m'a donné envie de le sortir de ma PAL.
Lansdale fait partie de ces auteurs qui savent si bien décrire L'Amérique. Dans Les marécages,  il entraîne le lecteur dans l'East Texas au début des années 30, là où coule la rivière Sabine, cette eau qui charrie, outre le serpent mocassin (que je ne vous souhaite pas d'avoir aux pieds), quelques cadavres de jeunes femmes mutilés.
C'est Harry, aujourd'hui pensionnaire d'une maison de retraite, qui nous raconte son histoire.
Il avait 11 ans quand tout a commencé. Il vivait là avec son père coiffeur et constable à ses heures (sorte de shérif municipal) sa mère et sa petite soeur Tom (Thomasina) qui l'accompagne presque partout. C'est lui qui trouve le premier corps, un soir où il s'est perdu après une chasse à l'écureuil.
Parallèlement aux adultes, il va mener son enquête.
Pour lui, le principal suspect,  c'est... l'homme-chèvre... un bien mystérieux personnage. Une légende ?
Mais ici, il y a une autre justice,  celle du Klan.
Ici le coupable évident c'est le nègre.
Et quand blancs et noirs se côtoient de trop près...
Les marécages, c'est un vrai grand roman noir américain.
Des vies en noir et blanc. Des vies entre noirs et blancs. Des vies où tout n'est pas tout noir ou tout blanc...
Avec des personnages sculptés dans la terre du pays, chacun a son histoire, des histoires qui se croisent parfois.
L'Amérique en ce temps-là et en ces lieux, c'est des hommes et des femmes qui travaillent pour essayer d'échapper à la misère, une misère dans laquelle les gens de couleur, eux, vivent au quotidien.
On se contente de peu. le travail de la terre, la pêche, la chasse pour se nourrir.
La violence est toujours présente, attisée par la haine de l'autre. La peur. L'égoïsme. La bêtise.
Ici les enfants sont matures avant l'âge, il faut dire que le monde que leur offrent les adultes, n'a rien de réjouissant.
Ce n'est pas que d'aujourd'hui que le monde est fou, en ce temps-là,  déjà... et Joe R. Lansdale, dans ce thriller, sait dramatiquement vous le rappeler.
Moi, je vous le dit : Il faut lire Les marécages.
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J'ai beaucoup apprécié ce roman et trouvé très efficace le choix du narrateur. Il s'agit d'un octogénaire qui se remémore un épisode de son enfance dans les marécages de l'East Texas, au bord de la Sabine. Ce procédé permet à l'auteur de raconter son histoire avec à la fois le regard innocent de l'enfant, le recul de l'adulte et la sagesse du vieillard. Cela donne d'intéressants dialogues entre le père, constable par défaut, et l'enfant fasciné par l'enquête, une complicité de l'enfant avec les personnes âgées (sa mamie, Mose, Maggie), un décalage entre ce que comprend l'enfant et ce qui est dit (surtout au sujet de la sexualité). Cela permet de restituer l'atmosphère glauque et malsaine des années 30 dans un coin où il ne faisait pas bon du tout être noir, au point qu'il était mal vu, et même très risqué de s'intéresser aux causes de la mort d'un noir. Ordonner une autopsie, c'était déjà beaucoup pour des ségrégationnistes, même quand le crime était particulièrement tordu et inquiétant. Alors enquêter, même si ce n'était qu'avec des moyens très limités… c'était trop dans une région où les valeurs dominantes étaient celles du KuKluxKlan. Même les enfants blancs élevés avec les noirs, qui les voyaient comme leurs meilleurs amis, qui apprenaient à pêcher ensemble, finissaient par avoir honte de leurs anciennes amitiés et même par les haïr. Cette ambiance est bien rendue, avec des personnages crédibles et attachants. Seule la fin de la résolution de l'enquête pêche par un côté Club des Cinq vers la fin, lorsque les enfants se retrouvent sans adulte avec le meurtrier au trousse. Cela n'enlève cependant rien aux grandes qualités de ce roman.
J'ai vu que ce roman était aussi classé en nature writing, genre dont j'ai du mal à cerner les contours. S'il relève de ce genre, je pense que j'aime bien.
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