Citations sur Des écrivains à la bibliothèque de la Sorbonne, tome 4 (7)
Un livre qu'on vient de lire entre aussitôt dans un compartiment de la mémoire que l'on peut assimiler à une sorte de salle d'attente. Pas encore vraiment rangé, pas encore installé dans le lent processus d'oubli qui va malgré tout le gagner, soit il s'éclipse très vite, soit il prolonge et densifie le réseau d'associations que sa lecture a fait surgir.
(Jean-Christophe Bailly, p. 101)
Dans l’humour la colère n’est pas annulée ou allégée mais transfigurée ; il donne à la colère une forme souveraine, ce n’est plus une passion.
(Arno Bertina, p. 46)
La bibliothèque est un jeu de patience, mais aussi un jeu de l’oie – sans puits ni prison –, une marelle, un labyrinthe (c'est connu) – sans autre destination ou issue que la satisfaction d'un désir de savoir, de connaître toujours recommencé, jamais exaucé –, tous jeux aussi tentants que le diable gisant dans chaque détail insoupçonné de ses méandres en relief, véritablement habités. Sans cette fascination d'un retour constant à une forme inédite d’origine, le jeu du lecteur serait différent.
(p. 11, extrait de l'introduction de Sylvie Gouttebaron, directrice de la Maison des écrivains et de la littérature)
Les poubelles de l’Histoire sont aussi intéressantes que ses vitrines.
(Arno Bertina, p. 40)
Lire, c'est aussi dessiner une constellation, établir des liens entre les différentes œuvres.
(Linda Lê, p. 19)
Doué d'une sorte de puissance occulte, aussi irrésistible que troublante, le livre, dans nos rêveries, est ce qui envoûte, nous jette hors de nous-mêmes. Il y a ainsi deux catégories de lecteurs : ceux qui se laissent charmer, au sens fort, par le livre, et ceux qui lui oppose un regard ironique, de manière à se ranger du côté des défiants, pour ne jamais se prosterner, comme Bruno Schultz, devant le « livre idolâtre ».
(Linda Lê, p. 16)
Malgré les circonstances, ces cinq textes sont des messages d’espoir ou des invitations à ne pas désespérer. Ils puisent dans la bibliothèque, cet « antre aux livres », dit Linda Lê, des sujets vastes et minuscules, en explorent les marges, les résistances, les constellations, les processus profonds qui œuvrent à son enrichissement ou au contraire la pousse à mettre fin à la vie des livres. Ils portent la trace de la volonté obstinée de traverser les périls, sans déni, mais en quête d'un avenir désirable. Ils semblent convoquer une communauté de lectrices et de lecteurs à venir, comme l'a fait la bibliothèque, qui, la crise durant, a continué à rassembler des œuvres et des documents du passé ou du présent pour les rendre accessibles aux étudiants et aux chercheurs d’aujourd’hui et de demain ; et qui, de nouveau, bruit joyeusement des silences de celles et ceux qui ont retrouvé le chemin de ces salles et de ses livres.
(pp. 8-9, extrait de la préface de Laurence Bobis, directrice de la Bibliothèque interuniversitaire de la Sorbonne)