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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Premier des deux volumes autobiographiques de Deborah Levy sortis ces jours-ci, Ce que je ne veux pas savoir – traduit par Céline Leroy – revient sur trois lieux marquants de sa vie. Loin de l'exercice habituel d'exploration chronologique, l'auteure britannique fait de ces lieux des marqueurs décisifs de son parcours. Avec en toile de fond commune, des réponses sur ce qui l'a conduit à écrire et la construction de son engagement devenu permanent sur l'émancipation des femmes.

À Johannesburg et Durban durant son enfance, elle fera l'apprentissage de l'apartheid, jeune témoin étonnée de la ségrégation permanente, vécue dans l'absence d'un père enfermé pour son soutien à l'ANC. À l'image de Billie Boy, une perruche à qui elle veut redonner la liberté, elle comprendra qu'il faut du temps pour la prendre et s'envoler. L'Afrique du Sud, ce sont aussi de premières rencontres marquantes. Avec Melissa, la fille de sa Marraine Dory, qui lui enseigne que « les filles doivent parler haut et fort, puisque personne ne les écoute » ; ou avec Soeur Joan qui décèle son goût pour l'écriture et la lecture et l'y encourage.

L'adolescence de Déborah se passera en Angleterre, terre d'exil où la famille s'est réfugiée après la libération du père. Écrivant sans fin sur des serviettes en papier, elle se rêve « en exil de l'exil », s'interrogeant sur son pays réel et mûrissant davantage son envie de devenir écrivaine.

Ces fragments de parcours prennent sens lors d'un printemps à Majorque, où volontairement isolée dans un hôtel, elle prend le temps de l'introspection, femme « en fuite » s'interrogeant sur son avenir et revenant sur son passé. Que fait-on du savoir qui nous empêche de vivre ? Que fait-on de ce qu'on ne veut pas savoir ? Pourquoi écrire dans la rage quand tant d'autres écrivent dans le calme ? Pourquoi se résigner et vivre dans l'acceptation ne peut être le but de l'écrivain ? Ou encore, comment dépasser l'inévitable conditionnement des femmes à incarner des mères ?

Convoquant aussi bien Sand que Beauvoir, Woolf, Warhol ou Duras, Deborah Levy témoigne sans donner de leçon sur ce qui forge un destin de femme et d'écrivain au XXIe siècle. de quoi donner envie de se plonger rapidement dans le coût de la vie, le deuxième opus.
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👠Chronique👠

« Mais, de toute façon, quel intérêt y a-t-il à mettre des choses par écrit? »

Parce que, de toute façon, il y a des choses qui ne s'écrive qu'avec le coeur et le recul de la maturité. Ce que je veux bien savoir, en revanche, c'est qu'est-ce que disent les écrits de nous, qu'est-ce que ça va chercher dans la mémoire et dans les oublis, vers quoi on tend à aller ainsi, vers soi?
Peut-être que ce soir, en relisant pour la enieme fois, Déborah Levy, je me dis que c'est quelque chose de l'entre-deux, entre rage et calme, entre authentique et illusion, entre deux âges et deux continents, entre appartenance et exil. Au point exact de l'hésitation. le désir d'écrire prenant le dessus sur les pensées limitantes, la femme se révèle au moment, précisément, de poser le stylo sur la feuille et de faire appel à sa réflexion…Et donc, ce soir, j'essaie de comprendre ce qu'elle ne veut pas savoir, alors que moi je brûle d'apprendre…
Certes, être témoin et vivre, la dépression, le racisme, la violence, l'oiseau en cage, le sexisme, ça laisse des traces sur le papier, le corps et l'esprit…Mais c'est « rudement bath » de lire aussi de l'émancipation, de la liberté, de la culture, et le cheminement personnel d'une autrice et d'une femme, en particulier…Invoquer les souvenirs, les plus grand.e.s écrivain.e.s, le désir, la transcendance de la lecture et de l'écriture, les questionnements muets, alors qu'elle n'a qu'une envie, celle de hurler. Parler fort pour se faire entendre dans ce monde de brutes. Parler fort parce qu'elle est assignee-femme, et qu'elle sait que ça change tout. Parler fort et créer des mots, des vérités qui s'écrivent au féminin et ne pas avoir à s'égosiller de le faire, ici ou ailleurs, c'était sans doute, le but de cette introspection…
Depuis toujours, je recherche, dans mes lectures, la féminité et la liberté. Avec cette trilogie, je peux déjà vous confier, sans la moindre hésitation que j'ai adhéré à la pétillance de Déborah Levy. Elle est vivifiante, solaire et affirmée. J'ai adoré la sensibilité, l'énergie, tous ses éclats. Ça se lit comme la confidence espiègle d'une amie chère, sans filtre et à coeur ouvert. Je ne saurai pas plus m'arrêter qu'elle, alors je vais peut-être vous laisser juger de l'intérêt à découvrir urgemment toute l'intelligence de sa plume et son engagement au travers de ces pages qui m'ont paru d'une brillance exquise!
Lien : https://fairystelphique.word..
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Touchant et plein de tendresse, ce premier volet de ce qui sera un triptyque permet à l'auteure de revenir sur les racines de son mal-être, d'une mélancolie ancrée en elle depuis ses plus jeunes années, passées en Afrique du Sud durant l'apartheid. Une rencontre à Majorque est ainsi prétexte à relater son enfance, entre douceur et amertume (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2021/06/26/ce-que-je-ne-veux-pas-savoir-le-cout-de-la-vie-deborah-levy/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Je ne suis pas toujours l'ordre et j'avais d'abord lu le deuxième volet de la trilogie de Déborah Levy, le coût de la vie, avant celui-ci. J'avais gardé un joli souvenir de la découverte de cette auteure et n'avais pas oublié ni son style, ni son ton, ni sa manière d'évoquer les sujets.
Ici il est question de son enfance en Afrique du Sud et comment l'apartheid est apparu à ses yeux d'enfant, avec les mots d'enfant et ce qu'elle en comprenait tout en incluant les images associées à cela,
Dans un premier temps j'ai été surprise par sa manière d'amener son sujet, un séjour à Majorque puis peu à peu la magie à opérer et je ne l'ai pas lâché.
Un récit pour évoquer le pourquoi de l'identité, du travail d'écrivaine, des lieux qui vous construisent et des rencontres significatives comme points de repère.
C'est court et cela se veut un style brut mais finalement beaucoup plus profond qu'il n'y paraît.
Je pense relire le coût des choses pour suivre la chronologie et après avoir découvert l'enfance je vais la retrouver femme et peut-être être mieux comprendre les traces laissées par son passé (et sans le connaître j'avais déjà beaucoup aimé son deuxième opus).
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Un jour la narratrice (l'auteure) réalise, alors qu'elle est sur un escalator qui monte, qu'elle ne peut réprimer ses larmes. Sans la nommer c'est la dépression qui laisse paraître ses marques. Elle prend un billet pour Majorque, fuit sa vie pour retrouver un lieu calme et sécurisant, loin du monde, loin des autres, comme George Sand le fit avec Chopin. Une fuite qui va la replonger dans ses souvenirs. Perdue entre passé et présent elle se cherche un avenir. Les souvenirs d'enfance affluent : l'Afrique du Sud natale, l'arrestation de son père, militant de l'ANC, ses 5 ans d'absence alors qu'elle n'est qu'une enfant qui ne comprend pas le monde des adultes, puis la fuite et l'exil en Angleterre.

« Ce que je ne veux pas savoir » est le premier volume d'une trilogie autobiographique de Déborah Levy. Publié en 2013 au Royaume-Uni, il n'est traduit en français qu'en 2020. Avec le deuxième volume, « le coût de la vie », il obtient le prix Femina Étranger 2020. le troisième opus est « État des lieux » publié en 2021.

Ce premier volet a pour sous-titre « réponse à George Orwell », et plus précisément à son texte où il expose les 4 raisons d'écrire pour un écrivain. Cette réponse, formulée une fois brièvement, on la devine au fil du récit. On découvre l'univers d'une enfant qui évolue dans un monde traversé par le racisme, la séparation des blancs et des noirs. Un monde cruel et injuste qui la privera de son père pendant cinq ans. Elle est témoin d'une société inégalitaire et tente de se construire. L'arrestation de son père la rend quasi muette. Les mots finiront par sortir, mais sur le papier. Et c'est avec les mots de l'enfance que l'auteure nous livre sa passion pour la littérature. le livre se termine sur les premières années de l'exil en Angleterre, cette nouvelle terre qu'elle souhaite faire sienne mais où elle se sent étrangère, et sur l'adolescence d'une fille solitaire qui trouve refuge dans les mots qu'elle jette sur des serviettes en papier dans un pub de Londres.

L'écriture de Déborah Levy est fine, sensible, parfois sensuelle, toujours lumineuse. Elle a un don pour trouver le détail qui va matérialiser pour le lecteur les lieux qui ont fait ce qu'elle est devenue : un bonhomme de neige réalisé avec son père, le perroquet de sa tante, une marque sur le front d'un écolier, la coiffure d'une cousine.

Une jolie découverte qui donne envie de découvrir la suite.
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Il faut – me semble-t-il – avoir lu tout ce petit ouvrage 135 pages) pour en apprécier la portée. Il est de toute façon construit en boucle, avec un élément commun au début et à la fin.

Deborah Levy raconte d'abord la dépression qui l'assaille en Angleterre, où elle pleure comme une fontaine sur les escaliers roulants. Elle se réfugie à Majorque, où il neige en mars, dans un hôtel tenu par une femme. Elle rencontre un épicier chinois à qui elle va raconter quelques souvenirs de son enfance en Afrique du Sud et « en Exil » : l'image du bonhomme de neige construit avec son père et fondu, disparu, tout comme ce père arrêté et longuement emprisonné pour faire partie de l'ANC, l'African National Congress ; la petite fille qui parle peu et pas assez fort, dont sa cousine va essayer de libérer la voix (« Les filles doivent parler haut puisque personne ne les écoute de toute façon. ») ; l'oncle tellement différent de son père, raciste sans complexe ; l'apprentissage de la lecture et de l'écriture ; puis, à quinze ans, l'Exil en Angleterre, la naissance inconfortable de sa vocation d'écrivain, l'impression de n'appartenir ni à l'Afrique du Sud ni à « l'Ingerland ».

Au passage, nourrie par ses lectures de Marguerite Duras et de Virginia Woolf, Deborah Levy parle de la condition féminine, de la maternité, de la voix des femmes. Aucune amertume dans sa voix mais un constat lucide et décomplexé. La voix de l'écrivaine en devenir, puis de celle qui ne sait plus comment orienter sa vie, peut toucher tous ses lecteurs : comme le dit l'épicier chinois, « Parfois, dans la vie, la question n'est pas de savoir où commencer, mais où s'arrêter. » (p. 129)
Lien : https://desmotsetdesnotes.wo..
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Ce grand petit roman autobiographique de Deborah Levy nous convie à des parcelles de son enfance en Afrique du Sud en 1964, dans un climat d'apartheid et d'innocence ainsi qu'à son arrivée en Angleterre en 1974, période d'adolescence et de perte de cette innocence. Deborah Levy écrit ses réflexions de vie à Majorque, ce qui semble être un prélude à un recommencement. Elle se reconstruit au fil de l'écriture et les anecdotes parfois drôles, parfois tristes, sont toujours pleines d'enseignements. Bien hâte d'attaquer le coût de la vie, pour voir le tri qu'elle fait de sa vie et ce qu'elle garde dans ses bagages.
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Cet ouvrage est arrivé à point nommé dans mon quotidien, comme la pince à épiler pour retirer une écharde....
Deborah Levy nous fait plonger dans le tourbillon de souvenirs qui l'ont créée , façonnée pour devenir l'auteure et la femme qu'elle est. Son écriture fluide mais profonde nous permet d'envelopper les sentiments que cette enfant a traversés, sûre de son destin et comment s'en le vouloir , elle a gardé le cap de sa destinée.
A lire
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Lu après "Le coût de la vie", même si celui-ci parle plus de "l'avant" de son enfance, de son arrivée en pays étranger. Il a un peu moins le côté patchwork du précédent, c'est peut-être pour cela que je préfère un tantinet plus l'autre. Mais, pas très important. Ça reste du haut de gamme : sensible, fin, nous ouvrant les portes à de multiples réflexions, drôle, poignant juste ce qu'il faut. C'est son regard pertinent sur les événements banals de la vie qui nous porte. Elle nous ouvre une nouvelle fenêtre sur le quotidien, sur le monde. À garder et relire.
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En peu de mots et quelques évocations de son passé Deborah Levy dépeint magistralement le sentiment de perte de sens, du déracinement, de l'abandon.
Le voyage de Majorque à l'Afrique du Sud puis à l'Angleterre est jalonné de réflexions existentielles puissantes et universelles.
Un texte court profondément humain.
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