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Dawn tome 2 sur 2
EAN : 9781607060253
144 pages
Image Comics (05/10/2010)
5/5   1 notes
Résumé :
Bridget, a young witch, takes her own life rather than fall prey to the enemies pursuing her. With her last breath, she summons Dawn, the goddess of birth and rebirth, the goddess she and other witches pray to. It's too late for Bridget, but Dawn finds her best friend Mary, another goddess worshipper and a teenage mother. Hunted by the same mysterious forces that have been systematically exterminating the other witches, Mary is in shock as her Goddess manifests hers... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce tome fait suite à Dawn Volume 1: Lucifers Halo (1995-1997) qu'il n'est pas indispensable d'avoir lu, mais c'est recommandé pour comprendre les allusions aux halos. Il comprend les 4 épisodes, initialement publiés par l'éditeur Sirius en 1999/2000, écrits, dessinés, encrés, mis en couleurs et lettrés par Joseph Michael Linsner. Il s'ouvre avec une courte introduction de l'auteur qui indique qu'il a ajouté une vingtaine de pages par rapport à l'édition originale pour étoffer et améliorer son histoire jusqu'à en être satisfait.

Mary vit chez sa mère. Elle a 16 ans et elle déjà mère d'un nourrisson. En ce dimanche matin, elle range son journal intime derrière des livres de sa bibliothèque et elle passe au salon. Sa mère est en fauteuil roulant. Elle est installée devant le poste de télévision, regardant un feuilleton, en attendant que ce soit l'heure de la messe télévisée. Mary lui indique qu'elle se rend à l'église pour assister à la célébration, et elle lui demande de jeter un coup d'oeil sur son bébé de temps à autre. Elle rejoint Bridget dans un parc de la ville. À l'abri des regards indiscrets, elles tracent un cercle dans le sol et récitent une prière chantant les louanges de la Déesse, celle qui leur a donné des roses et des chaines. Puis elles évoquent son amant Cernunnos, le seigneur de la mort, celui qui a préféré le cercle (de la vie) aux clous (de la croix). Elles sont interrompues par 2 hommes qui les traitent de sorcières. L'un d'eux jette un caillou qui atteint Bridget au front. Elles s'enfuient et prennent le bus pour revenir dans leur quartier.

Pendant le voyage, Bridget exprime sa rancoeur contre ces individus intolérants, et contre la religion dominante, patriarcale, misogyne, et la manière dont elle est instrumentalisée par la société. Mary exprime sa conviction dans les valeurs positives de la foi en la Déesse. Elles descendent du bus, et Bridget aperçoit leurs 2 agresseurs passant en voiture, l'un d'eux ayant une forme de démon avec des cornes. Elles se séparent, rentrant chacune de leur côté. Les 2 agresseurs choisissent de suivre Bridget plutôt que Mary. Cette dernière rentre dans une impasse désertée, trace un cercle au sol et se met à prier la Déesse, en l'évoquant par ses noms d'Aurora, Isis, Gaia, Cerriden. Elle décide de l'invoquer sur Terre en effectuant un sacrifice humain, en prenant sa propre vie. Son âme prend son essor et est accueillie par Cernunnos qui lui indique son sacrifice a été accepté et que la Déesse a entendu son appel. Quelques instants après, les 2 démons constatent qu'elle est morte. Quelques jours plus tard, Mary assiste à la cérémonie funéraire, et grimace en entendant le prêtre dire sa certitude que Bridget a rejoint Dieu et qu'elle aurait bien évidemment reconnu les errements de ses croyances en la Déesse.

Le premier tome avait laissé le lecteur un peu indécis entre une histoire et une narration très personnelle, et très séduisante, et une thématique sur la religion catholique, avec un point de vue original mais simpliste par certains côtés. L'introduction de l'auteur rassure le lecteur sur son investissement dans son oeuvre, tout en lui indiquant quelle est la nature du récit : entre conviction religieuse, spiritualité et ésotérisme. Ce thème apparaît dès la deuxième page du récit, avec la prière adressée à la Déesse. le lecteur découvre une sorte de court poème, véritablement une prière, écrit sur 3 dessins en double page. Il y est question de changement, de cycle de la vie et d'apprentissage. le texte n'est pas ridicule et les valeurs mises en avant sont louables : ce n'est pas un texte de remplissage avec un vernis new-age, mais une vraie profession de foi, avec une pique contre la religion catholique et le poids du sacrifice. Dès le premier dessin en double page, le lecteur (re)trouve la représentation très charnelle de Dawn/Aurora : un corps de femme épanoui, une mise en valeur de ses courbes et de sa chevelure rousse flamboyante. Par la suite, elle apparaît également en tenue de deuil stricte, dans son habit vert emblématique (celui de la couverture), ou encore en armure. JM Linsner a déclaré à plusieurs reprises qu'il est fasciné par les femmes à la forte personnalité, capable d'incarner tous les aspects de la féminité : de la séduction à la force guerrière, en passant par les accomplissements personnels. le déroulement du récit confirme cette vision de la femme, car ni Dawn ni Mary ne deviennent des objets ou des victimes pour susciter le plaisir masculin. À aucun moment ces représentations sexuées ne deviennent dégradantes ou avilissantes. Dawn dégage une présence impressionnante dans chaque case où elle apparaît, qui impose le respect à tous.

Ayant compris les intentions de l'auteur, le lecteur peut mieux apprécier le déroulement du récit, à commencer par son intrigue. Suite au sacrifice de Bridget, Dawn s'incarne sur Terre et vient à l'aide de Mary. Derrière la manifestation des 2 démons harcelant Mary & Bridget, se cachent les agissements d'un télévangéliste, et de Lucifer lui-même (Ahura Mazda) que Dawn va devoir affronter. Dans ce récit, les affrontements physiques sont la manifestation matérielle d'affrontement idéologiques entre les personnages, montrant intelligemment comment les convictions des protagonistes se heurtent, comment leurs valeurs se transforment en stratégie. Lorsque le combat s'engage, le lecteur en prend plein les yeux. Ça commence doucement avec Dawn en robe de deuil maniant une dague ouvragée pour se défendre des 2 agresseurs. Lorsqu'elle revient avec une épée, Linsner lui offre 3 dessins successifs en double page, dans lesquels la beauté d'Aurora devient terrifiante, mêlée à la force de ses coups, à sa sauvagerie. Il en va de même lors du dessin en pleine page constituant l'affrontement entre Ahura Mazda et Aurora. Ces dessins sont magnifiques, tant pour le mouvement vif d'Aurora, que pour la riche mise en couleurs évoquant l'aérographe. L'artiste ne sacrifie rien au niveau de détails de la représentation, tout en combinant les traits de contour avec la couleur directe pour montrer les éléments du dessin. le lecteur est subjugué par la beauté plastique de ces images.

De page en page, le lecteur mesure à quel point la narration visuelle est très personnelle et beaucoup plus aboutie que dans le premier tome. Chaque élément est frappé du sceau de la personnalité de l'auteur, jusqu'au lettrage, un peu plus épais que dans les autres comics, avec des bords de phylactère gras et irrégulier. Il met en oeuvre les couleurs, passant d'un registre naturaliste (la séquence dans la chambre de Mary) à un registre impressionniste (la chevelure de Dawn devenant verte et servant de toile de fond à la page), mêlant mise en couleurs d'éléments détourés à la couleur directe, sans solution de continuité, avec une élégance rare. À quelques reprises, le récit passe dans une dimension plus spirituelle que physique, et les fonds sont alors habités par des camaïeux de nature expressionniste, reflétant l'état d'esprit d'un personnage ou les fluctuations des rapports de force de la conversation. L'artiste réalise donc une narration visuelle de type essentiellement descriptif, avec un degré de finition remarquable, pouvant glisser dans d'autres registres en fonction de la nature de la séquence. Il sait aussi bien faire s'incarner les protagonistes humains, en leur donnant une apparence crédible et unique, en les rendant expressifs, que donner une apparence plus impressionnante aux personnages relevant de la mythologie pour leur donner une dimension plus qu'humaine.

Au fil des séquences, le lecteur découvre de nombreuses scènes visuellement mémorables : l'apparence inquiétante de Cernunnos en ombre chinoise détouré par une lumière violette, la dernière séparation entre Bridget et Mary, la succession d'expressions sur le visage de Mary à la cérémonie funéraire, Dawn déchaînée contre un démon, Dawn offrant une larme à Ilmarinen, la rouerie du démon conseiller d'Ahura Mazda, l'assurance suffisante de ce dernier, la révélation terrifiante de la puissance réelle de Dawn face à Ilmarinen puis à Mary. le lecteur remarque également les éléments visuels propres à cet auteur : quelques touches gothiques (les chaînes, le cuir, le sang, les larmes, des éléments romantiques empreints de mélancolie et de tristesse, un motif de crâne sur les bas d'Aurora), des leitmotivs visuels très particuliers. Parmi ces derniers, le lecteur repère les larmes de Dawn avec des gouttes de sang prenant la même forme, la rose avec les épines de la tige, le halo circulaire, les masques de la comédie et de la tragédie, la poignée ouvragée de l'épée de Dawn, la serrure & la clef. Ces éléments viennent nourrirent l'ambiance globale de l'histoire, ainsi que ses thématiques.

Du fait de la richesse de la narration visuelle et de la cohérence des éléments entre eux, les ambitions de Joseph Michael Linsner prennent de la consistance, et son discours spirituel s'élève plus haute que la collection de phrases prêtes à penser sans profondeur. Il faut bien sûr un peu de temps à l'auteur pour pouvoir entrer dans son sujet : il commence donc par des clichés comme la femme utilisant une adoration à la déesse pour s'extirper d'un milieu trop corseté, le prêtre imbu de ses certitudes. À partir de là, il peut entamer sa réflexion en intégrant ses points de vue personnels. Il développe progressivement son credo sur la base d'une divinité féminine, lui permettant de mettre en évidence la dimension patriarcale de la religion chrétienne. Il intègre des éléments concrets comme la fin de la carrière de chanteur de Jim Morrison des Doors, mais aussi une approche trinaire de la femme comme vierge, reine et putain, et des images comme la main du diable (très beau passage). Il utilise le concept de la déesse et d'un culte associé pour mettre en avant les qualités morales qui lui semblent de nature à permettre le développement personnel et le respect des autres. La dernière scène entre Mary et sa mère permet de revenir sur les clichés de départ et de les remettre en question. Joseph Michael Linsner réussit son pari de réaliser une profession de foi personnelle, intelligente et honnête sous forme d'un comics.

Sur la base de la couverture, le lecteur peut craindre un comics exploitant l'image de la femme et servant une spiritualité en toc et racoleuse. À la lecture, il découvre une narration visuelle aussi riche que personnelle, une intrigue intéressante, et une réflexion sur la spiritualité, proposant un regard sur une approche morale et mystique de la vie intelligente et intéressante.
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