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Citations sur Le Quai des brumes (36)

Nelly passait à travers l'existence comme une feuille morte, une feuille blonde balayée. Elle ne voyait rien, ne retenait rien. Son plaisir était de vivre une vie qu'elle inventait la nuit au "Lapin" devant quelques compagnons. Vie si éphémère qu'il suffisait d'un verre d'eau mêlé de rhum pour qu'elle s'évanouît dans la mémoire de la jeune fille.
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A la fin, il prit la parole, et faisant signe à son avocat de se taire momentanément, il s'écria : Hé ! oui, j'ai tué Norbert, bien entendu je l'ai tué, cela ne fait plus de doute, même pour moi, car j'ai cru longtemps que j'avais rêvé. Cependant, Messieurs les jurés, Norbert était un imbécile, ignorant comme une carpe, incapable de s'émouvoir devant un geste généreux, une belle pensée, un air de chanson, une rose peinte. Considérez l'extrême indigence morale de cet homme dont l'intérêt ne pouvait être que culinaire. En effet, Norbert n'était qu'un mouton, un mouton impossible à manger, mais dont la peau, néanmoins, pouvait avoir une valeur. A cette époque, j'avais besoin de dix mille francs. Alors qu'ai-je fait ? Mon Dieu, j'ai tué Norbert, comme on tue un mouton, pour se nourrir. Je tenais à vous donner mon point de vue, qui est complètement différent du vôtre.
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L'ombre de la nuit donnait au fleuve une apparence fantastique. Mais Ernst ne craignait rien, grâce à son costume, et surtout à ce masque merveilleux de la misère qui lui ouvrait toutes les portes de l'ombre et, au-delà de la nuit, toutes les portes de l'enfer, tel qu'il est humainement concevable.
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— Entends bien ce que je te dis : c'est très élégant pour quelqu'un de riche d'avoir faim. Un homme riche peut dire : "J'ai faim", et tout le monde trouvera ça sympathique. Mais toi, ou un autre, du moment que tu es pauvre, tu ne dois pas te vanter d'avoir faim. Ça fait mauvais effet. Tu entends.
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Vers midi Nelly se réveilla. Rabe la regardait dormir depuis plus d'une heure. Il frémissait de rage impuissante, car il n'aurait jamais pu dire, à cette jeune fille qui avait besoin de sommeil, de s'en aller. Il estimait peu la vie des autres et la sienne. Mais il respectait le sommeil, la faim et la soif qui rendent l'homme aussi simple, aussi violent et aussi pur qu'un animal quelconque.
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[...] ... Frédéric [le propriétaire du "Lapin Agile"] était descendu dans la petite salle. Sa femme s'occupait dans la cuisine et on entendait la bonne chanter en sourdine.

Rabe fumait toujours. Il était descendu lui aussi et, par la petite fenêtre du comptoir, il regardait la rue, la silhouette torturée de l'acacia et la neige qui tourbillonnait et lâchait ses flocons silencieux en bataillons légers et hardis.

Tout était blanc autour du petit cabaret et sur le toit des maisons et sur les arbres pétrifiés. On ne voyait même pas une trace de pas sur le sol. Tout le monde s'était enfermé chez soi et les plus inquiets, la tête raide sur l'oreiller, sentaient peser sur eux le mystique silence de la neige.

L'armée blanche s'était lancée à la conquête de Paris. Elle s'immisçait avec perfidie dans les cheminées et dans le cou des agents de police immobiles dans leur capote noire. Mais elle ne pouvait rien contre la chaleur du petit feu, et rien contre ce fait que Jean Rabe venait de boire un café qui lui donnait un courage neuf. ... [...]
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C'est très élégant pour quelqu'un de riche d'avoir faim. Un homme riche peut dire "J'ai faim" et tout le monde trouvera ça sympathique. Mais toi, ou un autre, du moment que tu es pauvre, tu ne dois jamais te vanter d'avoir faim. Ca fait mauvais effet.
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[...] ... - "Vous êtes tous des artistes (...)" dit l'homme, "moi, je ne suis pas artiste, je suis boucher aux environs de Paris, mais j'aime beaucoup les arts, la musique surtout, la grande musique même. J'aime particulièrement la musique religieuse. Ca m'élève l'âme et ça me pousse à toutes les extrémités. Nous avons tous une petite idée derrière la tête, tous, sans exception ; cette idée-là, nous la connaissons mal nous-mêmes, elle est comme un veau mort-né, un foetus, un poulet à ses débuts dans l'oeuf. Il faut éviter de trouver à ses dépens le produit qui donne à cette idée une vie normale et puissante, une puissance plus forte que celle que possède le boeuf dans sa tête et dans son cou. Une idée qui vous morcelle le raisonnement à coups de cornes. Voilà ce qu'il faut éviter de trouver. Pour les uns, c'est la femme, pour les autres, comme moi, c'est la musique qui donne de la volonté et du mouvement à cette arrière-pensée. Pour les plus vulgaires, c'est le sang. Le sang est un excellent révélateur de la force inconnue qui travaille le crâne des idiots. (...) Je tue tous les vendredis deux boeufs, deux veaux et trois moutons. Je connais la valeur du sang, ses reflets, son odeur et les idées qui se cognent les unes contre les autres entre les quatre murs de l'abattoir. C'est l'arrière-boutique de la pensée des hommes. Nous possédons tous, très loin dans l'arrière-boutique de notre pensée, un abattoir qui pue. Quelquefois, mais rarement, il sent bon. C'est également parce que nous possédons tous, vous le savez aussi bien que moi, un petit coin pour ranger ce qui reste d'un peu propre en nous-même. Il y a des souvenirs de famille" (il baissa la voix), "les enfants. De temps en temps, j'aime à regarder là-dedans. J'aime à mettre mes mains dans le linge propre et dans les fleurs desséchées qui sentent la tisane. J'ai besoin de fraîcheur dans mes mains quand je reviens de l'abattoir. ... [...]
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Ce que je sais, c'est que les hommes sont de plus en plus vaches. Ils s'excitent eux-mêmes au contact de leur propre vacherie. Je l'ai observé bien des fois et je n'espère rien de bon de mes observations.
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Ah! fit le soldat, il y a bien une place auprès du feu pour un copain de la Coloniale. J'ai de la neige dans le cou, dans mes godasses et jusque dans le creux de l'estomac. C'est ainsi que l'on conserve la viande pour traverser les tropiques, ajouta-t-il plaisamment.
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