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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce livre n'est pas un roman mais une histoire vraie romancée, un témoignage, un récit et même un essai tant il est riche en réflexions.
L'auteur (Carmen donc dans le livre) raconte comment, alors qu'elle était toute jeune et débutait son travail d'écrivain, elle s'est retrouvée enfermée dans une relation difficile parce que devenue réellement toxique, avec une autre jeune femme, qui était devenue sa compagne.
Cette jeune femme jolie, intelligente, amoureuse, s'est révélé, au fil du temps parano, jalouse, violente verbalement et capable des pires colères quasi inimaginables à soupçonner même parmi son entourage proche.
Cette maison rêvée où toutes les deux se retrouvent pour vivre librement leur amour, devient pour la narratrice (l'auteur donc) un lieu de souffrance. Sa compagne la déprécie sans cesse psychologiquement, puis elle affirme ensuite qu'elle a tout oublié des événements violents, et revient vers elle, toute souriante et aimante.
Mais les dérapages se multiplient, les crises de jalousie et de colère se succèdent pour un rien et la relation après être devenue étouffante, devient carrément toxique et insupportable.
Bien entendu, lors des "premières fois", la narratrice est sidérée : elle met du temps à comprendre que sa compagne veut la dominer ; elle ne réagit pas et se contente d'espérer retrouver un jour prochain celle qu'elle aime. Carmen ne sait plus où elle en est. Elle mettra des mois, elle qui est écrivain, à mettre des mots sur son ressenti et surtout sur son vécu.
Dans ce récit, qu'elle écrit des années après alors qu'elle a trouvé l'amour et vit une vie stable et heureuse avec sa nouvelle amie avec qui elle s'est mariée, l'auteur revient sur ces mois difficiles où elle a vu ses sentiments bafoués et son couple s'effondrer.
Elle nous livre ses réflexions d'aujourd'hui, étayées par de nombreux exemples concrets, sur la manière dont le harcèlement moral et la violence psychologique, se mettent en place peu à peu. Elle évoque aussi son ressenti face à cette alternance de "coups" et de réconciliations, tout à fait déstabilisants et qui fragilisent encore davantage celle qui les subit.
La maltraitance dans un couple homosexuel, je savais bien qu'elle existait mais ce livre nous la fait vivre à la fois différemment et de manière semblable que dans un couple hétéro. En effet la mise en place de la violence est la même et n'est pas que l'apanage des hommes. L'auteur brise les tabous à ce sujet, démontre que même les juges ne savent pas juger ces cas de maltraitance, sans se référer à ce qu'ils connaissent de la violence dans les couples hétéro, parce qu'ils n'acceptent pas, inconsciemment, que deux êtres de même sexe, puissent vivre ensemble une vraie sexualité.
En plus de son sujet fort intéressant qui ne peut que nous toucher, il faut noter que ce livre est très original et même carrément étonnant par sa construction littéraire que je n'avais encore jamais lu, ni vu auparavant dans un témoignage.
L'auteur bâtit en effet ses chapitres de différentes longueurs (parfois très courts quelques lignes à peine) en racontant les événements dans le désordre et "à la manière de"... C'est très étrange, car cela peut être "à la manière" d'un conte, d'un film d'horreur, d'un road movie, d'un vaccin, d'un manoir hanté, d'un naufrage, d'une cabane dans les bois, d'un mythe, d'un roman d'espionnage ou d'un voyage dans le temps, "d'un livre dont vous êtes le héros" ou....autre méthode.
Elle fait référence à des livres, des auteurs ou philosophes, classiques ou contemporains, des films connus ou moins connus et je suis bien certaine que je n'ai pas trouvé toutes les références en le lisant.
Mais qu'importe, cela donne du rythme au récit et nous permet surtout de rentrer dans cette histoire d'amour qui dérape, tout en gardant une certaine distance face à l'émotionnel et au contenu poignant de ce qu'elle nous raconte.
La seconde originalité de ce livre c'est que l'auteur parle de son histoire mais qu'en même temps, dans certains chapitres, elle s'adresse à celle qu'elle était à cette époque, il y a donc des années.
Peu à peu, sans forcément chercher à reconstituer les événements de manière chronologique car cela n'a aucune importance, le puzzle se met en forme.

J'ai trouvé ce livre édifiant. Même s'il est question de souffrance dans une relation homosexuelle, même si l'auteur y parle de son expérience personnelle, il concerne tout le monde car il a un côté universel. Il peut être lu par tous et toutes car il explore remarquablement bien la mise en place de la violence psychologique qui peut advenir en amour comme en amitié d'ailleurs, et aussi les violences au sein des couples homosexuels qui sont finalement très rarement traitées encore aujourd'hui car tabous. Il casse aussi les clichés que nous pouvons avoir sur les relations au sein d'un couple homosexuel. Si dans les couples hétérosexuels, c'est le plus souvent l'homme qui fait preuve de violence, comment expliquons-nous que dans un couple homosexuel, une femme puisse faire de même...or la violence n'est pas que l'apanage des hommes, ce livre nous le prouve si vous en doutiez.
Je ne regrette pas d'avoir découvert cet auteur et sa plume. C'est un texte féministe et militant, dans lequel l'auteur s'adresse à nous avec réalisme et sensibilité, mais aussi les années aidant, avec une pointe d'autodérision. Je reconnais cependant avoir gardé une certaine distance en le lisant.
Ce livre-témoignage autobiographique a reçu plusieurs prix et été élu meilleur livre de l'année non-fiction en 2019 dans plusieurs pays.
Lien : https://www.bulledemanou.com..
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Le rêve virant au cauchemar, l'emprise de la violence dans le couple en général, et dans le couple lesbien en particulier, en un impressionnant tour de force littéraire à facettes techniques et à beautés humaines.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2021/08/30/note-de-lecture-dans-la-maison-revee-carmen-maria-machado/

Sept ans après la publication de sa toute première nouvelle, et deux ans après la publication de son premier recueil, « Son corps et autres célébrations », couronné par le prix Shirley Jackson et nommé à plusieurs autres prix littéraires prestigieux (dont le National Book Award), Carmen Maria Machado publiait en 2019 « Dans la Maison rêvée », traduit en français en août 2021 par Hélène Cohen chez Christian Bourgois. Bien que sobrement sous-titré « A memoir » dans sa version originale américaine, ces 350 pages représentent bien davantage qu'un « simple » récit autobiographique. Pour aborder avec une puissance inouïe le sujet doublement brûlant de la violence à l'intérieur du couple (avec tous les mécanismes tragiques et connus, mais si difficiles à auto-diagnostiquer en temps et en heure, d'acceptation de l'emprise et de culpabilité mal placée) d'une part, et de la violence à l'intérieur du couple lesbien d'autre part (dont elle documente avec minutie la monstrueuse difficulté supplémentaire que représente le simple fait de pouvoir penser cette violence, là où précisément la relation se construit individuellement, collectivement et socialement en rejet des scories les plus meurtrières du patriarcat), elle a construit un véritable thriller psychologique et intime, en utilisant toutes les ressources de son art de conteuse, de nouvelliste et de formatrice en création littéraire.

Elle nous offre ainsi une formidable progression de chapitres courts ou très courts « à la manière de », tous placés sous le signe d'une forme ou d'une inspiration littéraire particulière (ouverture, prologue, non-métaphore, picaresque, machine à mouvement perpétuel, exercice de point de vue, élément perturbateur, palais de la mémoire, voyage dans le temps, inconnue arrivant en ville, classique lesbien culte, célèbre mot de la fin, confession, rêve incarné, question de chance, road-trip à Savannah, roman sentimental, déjà-vu, roman d'apprentissage, classification des contes de fées, texte érotique, roman noir, utopie, fantasy, roman lesbien de seconde zone, pour n'en citer que quelques échantillons), fournissant chacun par leur titre un programme en soi, pour exorciser en beauté (et avec un art paradoxal du suspense) le calvaire vécu par elle, et pour le rendre exploitable par les lectrices qui seraient directement concernées, mais aussi par tous les autres, lectrices ou lecteurs, pour lesquels le déni des emprises de toute nature demeure si souvent d'actualité, même bien cachée. Et pour démontrer au passage, et de quelle manière, que l'art du récit sophistiqué constitue, maîtrisé comme ici, un medium ô combien plus puissant que n'importe quel essai jouant en trace directe et explicative. du grand art, intelligent et bouleversant, jouant à merveille de la détonation produite entre humour noir, violence, sensibilité et amour serein reconstruit ailleurs.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Pour décrire le chaos que provoque la violence conjugale au sein de son couple, C.M. Marchado choisit pour format une succession de textes courts, au ton, au style et à l'angle de vue différents. de ce qui pourrait être un procédé empreint de maladresse, l'auteure en fait la force de son livre.
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La naissance d'un couple, les émois du début d'une relation, puis insidieusement la violence qui s'installe, la brutalité, l'envie de faire mal...
L'histoire peut paraitre rebattue en littérature.
Cependant le récit que nous livre Carmen Maria Machado dans ce texte, c'est celui de la violence dans le couple qu'elle a formé quelques années auparavant avec la Femme de la Maison rêvée.
Et ce récit, c'est également celui d'un tabou, le tabou de la violence dans le milieu lesbien.

En plusieurs variations, "La Maison rêvée à la manière de ...", Carmen Maria Machado déconstruit cette relation toxique, la dissèque, l'entoure de souvenirs ou de faits de société.
On sent que la jeune femme est sortie marquée de cette relation et qu'elle tournera difficilement une page dessus. La narration à la deuxième personne pour la femme qu'elle a été, et plus rarement à la première personne pour celle qu'elle est devenue, prouve la distance qu'elle essaie encore et toujours de mettre entre elle et son passé.

Au-delà de la sincérité du récit, ce sont les multiples variations qui frappent.
La construction est intelligente, subtile ; chaque chapitre colle au style littéraire qu'elle adopte. "La Maison rêvée à la manière du livre dont vous êtes le héros", notamment, est brillante ; glaçante mais brillante.
Les chapitres sont courts, défilent : "Allez encore un, oh et puis un autre, plus qu'un et c'est fini...". Et c'est ainsi que j'ai lu ce livre en une journée.
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Son corps et autres célébrations, le premier recueil de Carmen Maria Machado, avait été une véritable révélation. Thèmes très originaux, écriture directe et sans fard où la sexualité tenait une large part, expérimentations formelles tous azimuts…
Du coup, la curiosité était forte de savoir quelle formes et quelle direction allaient prendre cette Maison rêvée. Force est de reconnaître dès les premières pages que son autrice n'a pas mis d'eau dans son vin : si, cette fois-ci, le livre est purement – et presque « classiquement » – autobiographique avec le récit sans concession (et très cru quant à l'évocation de la sexualité) d'une relation toxique lesbienne qu'elle a vécu il y a plusieurs années, la construction fait preuve d'une inventivité ébouriffante.
Carmen Maria Machado structure en effet son récit sous forme d'un kaléidoscope de courts chapitres dont le titre et le contenu se réfère à ou reprend un genre littéraire ou cinématographique différent à chaque fois. Un principe presque vertigineux mais extrêmement bien maîtrisé, le postulat ne nuisant à aucun moment à la fluidité de la lecture.
Si on rajoute à cela le fait que l'autrice enrichit le sujet principal en évoquant notamment son côté presque tabou dans la littérature (comme si les relations homosexuelles et lesbiennes notamment ne pouvaient se concevoir sous le prisme de la maltraitance, qu'elle soit physique et/ou psychologique) ou les ponts qu'elle établit avec un naturel confondant entre son expérience et la mythologie des contes (dans d'étonnantes notes en bas de page), on tient là un livre riche, stimulant et, envers et contre tout, extrêmement émouvant.
Un véritable « tour de force ».
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L'auteure est amoureuse d'une femme qui se met progressivement à la maltraiter. Après un long travail notamment d'écriture, elle essaie ici de capturer l'essence de cette violence, sa malheureuse banalité, les dégâts persistants de l'emprise. Elle essaie de se souvenir, de s'approprier cette histoire et de la transmettre pour qu'elle puisse être utile à d'autres.

Un sacré bouquin ! Entre essai, témoignage et autofiction l'auteure a choisi de tendre à son arc toutes les cordes de la littérature pour percer le mystère de la maison rêvée. Ce lieu fonctionne comme une poupée gigogne angoissante qu'on ne cesse d'ouvrir pour en découvrir une autre, la même mais sous des habits un peu différents, au point d'en avoir le tournis. Cette série de fragments essaie de montrer les facettes d'une relation destructrice et de faire exister en littérature les violences domestiques entre femmes.

J'ai souvent eu le sentiment d'être face à un bouquin dont je sentais qu'il était truffé de références sans vraiment les maîtriser moi-même.
Un bouquin complexe, dense et remarquable.
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I finished this book in one day. Such an important book to be aware and understand abuse in queer relationships. It's a instant classic. Why not 5 stars ? I thought that sometimes the author dragged the length of the book by adding some (to me!!) unnecessary chapters or pop culture references.
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