Bien que les moeurs et les faits de l'art au XVIIIe siècle aient été, plus qu'au précédent, de nature à stimuler l'esprit d'observation et la verve des dessinateurs satiriques, trop souvent encore ceux-ci se renfermèrent dans les limites étroites d'attaques personnelles, aussi triviales dans le fond que dans la forme. C'est ainsi qu'ils prirent invariablement pour type de l'ignorance et de la stupidité l'âne, cet excellent âne, à qui ses longues oreilles prêtent bien quelque ridicule, mais qui rachète, à nos yeux, ce défaut par la finesse méditative de son regard et la philosophie de son allure. Parfois cependant, ils surent profiter avec quelque esprit des piquantes occasions que devaient fréquemment faire naître les expositions de peinture au Salon du Louvre, régularisées vers le commencement du siècle et a la série des pièces relatives à ces salons aurait ? peut-être mérité un chapitre spécial, si, pour ne pas interrompre l'ordre chronologique, nous n'avions préféré les citer chacune à sa date.
Comme la plupart des musées de province, le musée de Marseille est d’origine révolutionnaire. Il semble que la Révolution ait voulu compenser les désastres causés par les excès de ses fanatiques aux monuments de notre art national, en nous léguant les musées qui n'étaient possibles que par elle. Avant 1789, il existait en France des galeries d'amateurs, il n'existait pas de musées. Les objets d’art n'avaient pour garant de leur conservation que l'intérêt de la propriété ou le plaisir de la jouissance. Le roi lui-même ne possédait des tableaux qu'en sa qualité d'homme le plus riche de France, au même titre qu’il possédait une ménagerie d’animaux rares. C'était affaire de curiosité. Mais on ne songeait pas à l'utilité de conserver des objets d'art dans un but d'enseignement, pas plus qu'à celle d'entretenir des animaux exotiques dans un but d’acclimatation et de reproduction.
L'idée de l’utilité des œuvres d’art, idée conservatrice s’il en fut, est donc une idée révolutionnaire. Le 6 frimaire an VII, Heurtaut de La Neuville demanda au conseil des Cinq-Cents la fondation dans les provinces d'écoles de peinture, de sculpture et d'architecture, ainsi que l’établissement d’un dépôt d'objets d’art auprès de ces écoles. Telle est la première date de l’histoire des musées de province.