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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
J'ai découvert l'existence de Christopher Marlowe dans un film, Shakespeare in Love, où le jeune homme apparaissait comme rival plus doué, ou plus chanceux, du jeune Shakespeare. Une seule de ses pièces est mentionnée : « Massacre à Paris », de même que l'assassinat du poète.
Puis j'ai appris qu'il a lancé le mythe moderne de Faust. Secouant tous ces éléments dans un sac, il en est sorti que je devais aller voir de plus près.

Un type intéressant, ce Marlowe. Érudit, c'est sûr ! Son savoir, que s'approprie le docteur Faustus, fuite de chacun de ses vers. Marlowe aligne citations latines non traduites et connaissances antiques ou astronomiques qui devaient laisser pantois le spectateur lambda et enchanter le biographe moderne. Visiblement anticonformiste, quoique n'hésitant pas à s'appuyer pour son succès sur l'antipapisme baignant l'Angleterre depuis que « l'Invincible Armada » espagnole était allée bouffer les pissenlits marins agrémentés au sel de mer par la racine. Ajoutons une carrière d'espion à la Beaumarchais, cela donne une idée de l'atypisme du personnage.

Et cette pièce fondatrice du mythe alors ? Au début Faust chante ses connaissances qui ne devaient guère être compréhensible par le spectateur, lui laissant une vague impression d'avoir affaire à une grosse tête. Mais Faust est blasé. Il se tourne vers la magie, convoque Méphistophélès et négocie son fameux marché : vingt-quatre ans de vie omnipotente contre son âme à Lucifer à la fin.
Faust devient-il omniscient ? Bof. Les réponses de Méphistophélès à ses questions sur les secrets de l'univers évoquent plutôt un enfumage qu'autre chose. En même temps, je pouvais difficilement m'attendre à voir le prince de l'Enfer énoncer la théorie du big-bang.

Le brave diable se révèle bien plus efficace dans la série de farces qui suit et qui m'a beaucoup amusé. Car Faust et Méphistophélès vont passer leur temps à humilier presque tout et quasi chacun. le pape est la première victime ; anticatholicisme oblige, on imagine les applaudissements du public londonien. Puis ce seront le charretier et le maquignon du coin. C'est sûr on se marre, et je ne m'en suis pas privé. Marlowe joue beaucoup avec les métamorphoses – il connait son Ovide l'animal – et je n'ai pas pu m'empêcher de faire un rapprochement avec le Songe d'une Nuit d'Été et sa tête d'âne apposée sur le corps du pauvre Bottom. Vu les dates, Shakespeare a piqué l'idée à Marlowe.

Mais le bon temps de Faust a une fin et il faut payer l'addition à Lucifer au dernier acte. On ne peut pas dire que le savant soit très impressionnant pour ses derniers sursauts. Il ferait plutôt pitié. J'avais plus apprécié l'arrogance humaine de Dom Juan face à la statue du commandeur.
J'ai eu également un peu de mal avec cette main de Dieu tendue vers le pêcheur suprême que représente Faust. Dieu lui accorde sa grâce, malgré tout ce qu'il a fait, mais le fait qu'il ait craché sur son nom pendant un quart de siècle. Mais bon, je ne suis pas protestant. La grâce accordée quelles que soient les actions de l'homme est un concept que je trouve dur à avaler.
Main tendue, encore faudrait-il que Faust puisse l'attraper, et Méphistophélès et Lucifer veillent au grain.

Impression globale ? Pas mal. Intéressant surtout parce que la pièce dit du temps où elle a été écrite et par la maîtrise de la farce.
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Au début de la pièce, Faust vend son âme au diable à Lucifer et Belzébuth, en échange de quoi, pendant vingt-cinq ans, le démon Méphistophélès sera à son service et à ses ordres. Tout au long des scènes, on voit comment il emploie son pouvoir : à jouer des tours pendables aux uns et aux autres, dont au Pape, et impressionner Charles Quint en faisant se produire devant lui Alexandre le Grand et sa maîtresse... A l'issue de la pièce, les vingt-cinq ans ont passé, et Faust prend conscience du destin qu'il va lui falloir affronter... Brrrr

Marlowe est contemporain de Shakespeare, et on retrouve chez lui l'humour, les jeux de mots et les "effets spéciaux" de son compatriote.

J'ai beaucoup aimé cette pièce, et j'ai largement préféré la version de Marlowe à celle de Goethe.
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Marlowe nous livre ici une première trace écrite du mythe du docteur Faust, ancien compte allemand à tradition orale. le docteur Faust est un érudit allemand ayant étudié médecine, logique, religion et droit, qui trouve la vie beaucoup trop courte pour accumuler les connaissances de l'humanité. Sa frustration, et son avidité pour le savoir le pousse à conclure un pacte avec le diable. Cependant, celui-ci va le rattraper bien vite...
Une belle pièce pour appréhender ce personnage qui sera repris par une multitude d'auteurs...
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Je pense qu'il n'est pas nécessaire que je vous résume la pièce de Christopher Marlowe, vous connaissez tous l'histoire de Faust qui passe un pacte avec le diable. Ici nous avons à faire à la première version artistique du mythe. La première édition de la pièce de Marlowe date de 1604, c'est une version très probablement tronquée puisqu'il s'agit d'une retranscription de la pièce. Celle-ci a été réalisée après la mort de l'auteur qui décède le 30 mai 1593 suite à une rixe dans une taverne. Certaines des participantes à cette lecture commune ont lu une version ultérieure datant de 1616 qui est plus longue, des scènes y sont rajoutées, notamment une où Faust perd littéralement la tête ! (et qui a failli me la faire perdre aussi car je ne comprenais pas comment j'avais pu passer à côté d'une telle scène…) La pièce est tirée d'une histoire vraie qui fut racontée en 1587 sous le titre “L'histoire du Docteur Jean Faust” et imprimée par Iohann Spies à Francfort. Ce Docteur Jean Faust n'avait bien entendu pas passé un pacte avec le diable mais il était connu pour son utilisation de la magie. On peut souligner la grande proximité de date entre la publication de l'histoire de Jean Faust et celle de la pièce de Marlowe. le potentiel littéraire de ce récit a tout de suite été remarqué par Marlowe et sa pièce est le début de la création d'un mythe.

L'oeuvre de Marlowe s'ouvre sur un choeur à l'antique qui nous présente l'histoire. le destin de Faust ne fait déjà aucun doute puisqu'on nous parle d'Icare. Faust va lui aussi se brûler les ailes après avoir voulu en savoir trop. Il passe un pacte de 24 ans avec le diable car ses connaissances ne lui suffisent pas. Faust pense tout savoir sur ce que l'homme est en capacité d'apprendre. Son pacte doit lui assurer la gloire, le succès et l'argent. Il cède également à ses envies, aux tentations. Tous les péchés défilent devant lui, formant une ronde très amusante et se présentant à tour de rôle. Faust veut tout essayer et ne rien se refuser. Méphistophélès, l'intermédiaire du diable, lui offre donc des connaissances infinies sur la magie et le cosmos. “Oh ! C'est un univers de joie et de profit, d'honneur et de pouvoir, bien plus, d'omnipotence, que promet la Magie au chercheur studieux (…). Un bon magicien est un Dieu tout puissant ; donc, Faust, par ton cerveau puissant, deviens un Dieu !”

Et c'est bien cela que veut devenir Faust : un dieu. Il questionne la religion, la place de l'homme dans l'univers. La vision religieuse est pour lui trop réductrice. Comme Christopher Marlowe, Faust est athée, il ne reconnaît pas les préceptes moraux de la religion et se joue du pape grâce à la magie dans une scène fort cocasse. Il tourne en ridicule la religion et ses institutions. La différence entre le bien et le mal n'existe plus pour Faust malgré les fréquentes apparitions du bon et du mauvais anges. Il suit systématiquement la voix du mal. Une vie sans péché n'existe pas, tout le monde pêche. La religion est donc une vaste hypocrisie qu'il est inutile de suivre. Faust ne craint rien, ni personne. L'avertissement de Méphistophélès, avant la signature du pacte, ne l'arrête pas : “Mais l'enfer est ici ; je n'en suis point sorti. Crois-tu que, si j'ai vu le visage de Dieu, si j'ai goûté du ciel les éternelles joies, je ne suis pas réduit à souffrir mille enfers quand je me vois privé de ce bonheur sans fin ?” Faust se pense plus fort, plus malin et sacrifie son repos éternel.

Bien entendu quand l'heure est venue de respecter le pacte, Faust est pris de remords. La peur de l'enfer le saisit à la gorge. Les 24 années de magie, de débauche offertes par le diable, ont passé bien vite. Faust a dilapidé sa vie au profit de plaisirs éphémères mais un pacte avec le diable ne se brise pas. Comme celle d'Icare, la chute de Faust est inéluctable.

Il est difficile de juger de la construction de la pièce de Christopher Marlowe puisqu'elle est partielle. Certaines scènes de pur divertissement où n'apparait pas Faust n'ont pas grand intérêt. La pièce reste néanmoins intéressante puisqu'il s'agit de la première fiction portant sur ce personnage. L'accent est mis chez Marlowe sur la question du savoir et la négation de la morale religieuse. Ce sont bien entendu ses idées qu'il fait passer dans la bouche de Faust. le mythe sera repris au 19ème par Goethe qui finira de le rendre célèbre et extrêmement populaire.
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