La lame dès les premiers chapitres taille dans le vif : ça tabasse, ça fait mal, c'est saignant, violent. On pourrait se croire dans l'univers cher à
Mattias Köping : un meurtre de prostituée, de sombres histoires de traite des femmes, de drogue, de dealers dans une cité marseillaise mais très vite
Frédéric Mars va orienter son thriller autrement.
Frédéric Mars nous invite à un « drôle » de voyage : en premier lieu, un voyage dans le temps, puisque le roman débute en octobre 2031. Après la victoire du parti d'extrême droite, La France aux Français, la gouvernance de sa représentante, Laurence Varenne, le nouveau président français est un homme noir, de souche africaine : Bako Johnson.
2031, c'est demain. Et les références à notre actualité sont bien présentes : le président actuel,
Emmanuel Macron, l'extrême gauche avec
Jean-Luc Mélenchon, etc. Vous entendrez même parler des gilets jaunes et pas seulement. Et avec un peu d'imagination, si peu, on imagine très bien que cette France de demain n'est pas de la science-fiction mais une très légère anticipation.
Voyage disais-je. Nous allons aussi voyager et voir du pays. L'échiquier sur lequel
Frédéric Mars nous propose de jouer ne se limite pas à notre pays, c'est l'échiquier mondial qui est convoqué et plus particulièrement le continent africain, avec le Nigéria et sa capitale Lagos, ville qui peut hélas revendiquer maintenant sa place de capitale de la misère. Lagos, si vous avez regardé les actualités récemment, a fait parler d'elle avec le démantèlement d'une « usine à bébés » dans laquelle des femmes étaient retenues jusqu'à l'accouchement et leur nourrisson monnayer.
En 2031, Lagos est toujours une capitale où la pauvreté règne en maître et son corollaire, les trafics en tous genres, dès le plus jeune âge. Dans cet environnement hostile, Sékou Williams, jeune instituteur tente d'éduquer les enfants qui lui sont confiés. Sa vie et celle de sa famille vont se retrouver totalement chamboulées par une déferlante venue de l'océan, provoquant de nombreuses victimes et des milliers de personnes sans abri.
Cette lame va avoir des répercussions qui vont très vite dépasser les limites tant géographiques que politiques de nos principaux protagonistes.
Frédéric Mars, comme le montre la magnifique couverture du livre est aussi celle d'un couteau, qui peut menacer, trancher, tuer. Cette lame-là viendra ponctuer les histoires d'hommes, de femmes d'enfants qui vont s'entrecroiser.
500 et quelques pages, 77 chapitres courts, une construction ambitieuse, complexe mais qui ne perd jamais le lecteur et un final de haut vol, voilà ce que vous trouverez en lisant ce thriller lus que brillant.
J'ai particulièrement aimé le volet géopolitique de ce roman mais aussi tous les thèmes beaucoup plus large qui sont abordés ; qu'ils renvoient au côté obscur de l'être humain comme à sa face lumineuse et porteuse d'espoir : la trahison, la vengeance, la haine, la quête du pouvoir et donc aussi la force des promesses, l'engagement, l'amitié, l'amour, la famille.
Ce roman possède un souffle incroyable, il vous fera frémir, vous touchera et plus que tout, il vous fera réfléchir à la direction que pourrait prendre ce drôle de bateau sur lequel nous sommes tous embarqués.