L'un des livres sur la guerre d'indochine que chacun rêve de posséder. Il est intéressant à plusieurs titres.
le premier acte, c'est de faire une lecture croisée avec le livre de Bonnecarrere, celui qui a fait connaître Mattei. On a confirmation que Bonnecarrere était d'abord et avant tout un romancier et, donc, la lecture des deux se juxtapose à merveille : sur une même base, le texte est parfois assez ,voir très, différent mais toujours animé et passionnant.
Intéressant aussi car l'esprit baroud est très présent dans les têtes, dans les actes doublé par une forme particulière de l'esprit Legion (le demerden sie) ainsi que la manière de Mattei de traiter la guérilla et d'agir en contre guérilla avec les partisans et les populations
Intéressant enfin car Mattei est loin d'être un idiot : certes la 2ème guerre mondiale a tué sa carrière d'officier Saint Cyrien, confiné qu'il a été dans son offlag , mais pas sa réflexion . A plusieurs reprises il nous fait partager ses interrogations, ses doutes mais aussi ses certitudes et sa morale sur les guerres dites coloniales .
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Avant-hier, le 2e bataillon du 3e Étranger, qui avait reçu l’ordre d’évacuer That Khé, est arrivé à Na Cham sans se faire accrocher, en contournant par la forêt le piège du col de Lung Vaï. Après une courte halte, il est reparti pour de nouveaux combats, du pas lent et lourd de parade rythmé par une des plus vieilles chansons de marche de la Légion, Anne-Marie, dont l’auteur demeure aussi anonyme que celui du Boudin, aussi anonyme que n’importe quel légionnaire. Une bouffée d’orgueil et de tristesse m’a alors submergé : comment un pays capable d’attirer de tels hommes pour le servir peut-il si mal utiliser ces trésors de courage, d’intelligence et de dévouement ?
Nous nous acharnons à sauver l’empire d’une métropole qui n’aspire qu’à devenir une Suisse sans histoire, hors de l’histoire. Nos gouvernants — peu obéis, méprisés, mais toujours en place —, notre manière de conduire la guerre, le poids de la Chine, tout concourt à notre défaite. L’héroïsme du corps expéditionnaire, la fidélité et le courage des unités viêtnamiennes n’aboutiront qu’à retarder l’échéance.
Ils semblent posséder une foi, une volonté, ces richesses que les sociétés nanties ne parviennent plus à produire.
Je ressens l’impression désagréable de l’enfant toléré parmi les grandes personnes.