Rien ne m'émeut comme cette première clameur de vie qu'on ne voit point et qui court dans l'air sombre, si vite, si loin, avant qu'apparaisse à l'horizon la première clarté des jours d'hiver. Il me semble à cette heure glaciale de l'aube, que ce cri fuyant emporté par les plumes d'une bête est un soupir de l'âme du monde !
" On aime sa mère presque sans le savoir, et on ne s'aperçoit de toute profondeur des racines de cet amour qu'au moment de la séparation dernière "
– Voyons, Marchas, tu blagues ?
– Je ne blague jamais dans le service.
– Mais où diable veux-tu que j’en trouve, des femmes ?
– Où tu voudras. Il doit en rester deux ou trois dans le pays.
14 juillet. - Fête de la république. Je me suis promené par les rues. Les pétards et les drapeaux m'amusaient comme un enfant. C'est pourtant fort bête d'être joyeux, à date fixe, par décret du gouvernement. Le peuple est un troupeau imbécile, tantôt stupidement patient et tantôt férocement révolté. On lui dit "Amuse toi." Il s'amuse. On lui dit "Va te battre avec le voisin." Il va se battre. On lui dit "Vote pour l'Empereur." Il vote pour l'Empereur. Puis on lui dit "Vote pour la République." Et il vote pour la République.
– Voyons, Marchas, tu blagues ?
– Je ne blague jamais dans le service.
– Mais où diable veux-tu que j’en trouve, des femmes ?
– Où tu voudras. Il doit en rester deux ou trois dans le pays.
Certes, la solitude est dangereuse pour les intelligences qui travaillent. Il nous faut, autour de nous, des hommes qui pensent et qui parlent. Quand nous sommes seuls longtemps, nous peuplons le vide de fantômes.
Je suis malade, décidément ! Je me portais si bien le mois dernier ! J’ai la fièvre, une fièvre atroce, ou plutôt un énervement fiévreux, qui rend mon âme aussi souffrante que mon corps. J’ai sans cesse cette sensation affreuse d’un danger menaçant, cette appréhension d’un malheur qui vient ou de la mort qui approche, ce pressentiment qui est sans doute l’atteinte d’un mal inconnu, germant dans le sang et dans la chair.
"Nous sommes si infirmes, si désarmés, si ignorants, si petits, nous autres, sur ce grain de boue qui tourne délayé dans une goutte d'eau." P.66
"D'où viennent ces influences mystérieuses qui changent en découragement notre bonheur et notre confiance en détresse." P.34