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sur 617 notes
Enfin ! Enfin une oeuvre que je peux qualifier de culte car elle remplit tous les critères au-delà de l'imaginable. Il en aura fallu du temps à Scott McCloud qui n'avait plus rien réalisé depuis L'Art Invisible où il nous enseignait les rudiments de la bande dessinée. C'était un peu comme un professeur qui n'avait rien à son actif. Cependant, je veux bien attendre si c'est pour réaliser ce chef d'oeuvre aussi magnifique que la beauté du diable.

J'ai abordé la lecture du Sculpteur sans m'attendre à grand chose de particulier. Et c'est là qu'arrive la grande surprise. Nous avons une oeuvre qui frise la perfection graphique et narrative. C'est comme la grâce ! La technique employée par l'auteur impressionne véritablement. le thème sera celui de l'art et la création mais sous un angle plus personnel et intime.

Nous avons un jeune homme -David Smith- à qui rien ne réussit. Il faut dire qu'il n'a pas eu de chance dans sa vie avec la perte tragique des membres de sa famille. Il ne sait pas parler aux femmes et son meilleur ami est homo. Il semble être totalement paumé. On a pitié pour lui car on sent qu'il a envie de se réaliser pour son art -la sculpture- jusqu'à l'extrême. Il va rencontrer un homme qui va changer à jamais le court de son destin en lui offrant un pouvoir spécial de création. le mythe de Faust est complètement revisité de la manière la plus moderne et originale. le temps sera désormais compté. Par ailleurs, le lecteur va vivre l'une des plus belles et déchirantes histoires d'amour.

Tout cela est magnifié par le trait riche et précis de l'auteur qui n'a décidément plus rien à prouver. le sculpteur est tout simplement magistral. Je suis un lecteur râleur qui n'hésite pas à descendre la médiocrité. Or en l'occurrence, j'ai fait la rencontre avec un roman graphique exceptionnel de par sa maîtrise et son aboutissement. Je l'ai emprunté tout d'abord puis sitôt terminé, je me suis précipité chez le libraire pour l'acquérir absolument. Ce sont des choses qui ne m'arrivent généralement pas. Aurais-je également vendu mon âme au diable ?
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David Smith, un nom banal et commun, il y en a d'ailleurs des centaines dans l'annuaire.
Mais chaque personne est unique, chaque vie est fragile et précieuse.
David Smith est un jeune homme qui ne va pas bien, il ne vit que pour l'art, pour ses sculptures, mais à 26 ans, son avenir professionnel est déjà derrière lui.
Il n'a plus de famille, plus beaucoup d'amis, pas d'argent, aucun projet et plus beaucoup de rêves…
Il n'a que sa rage, sa frustration et sa colère, quand un pacte étrange, absurde mais tellement tentant lui est proposé, comme sur un plateau.
Il pourra sculpter tout ce qu'il veut à mains nues en échange de sa vie, dans un nombre de jours définis.

Si vous avez du temps (la bande dessinée fait presque 500 pages) n'hésitez pas à vous lancer dans « le sculpteur », un roman graphique riche, dense, palpitant, éprouvant et émouvant.
L'auteur nous parle de ce que c'est de se sentir artiste, de ne vivre que pour cela, de sacrifier tout le reste à son art, même quand l'art en question n'est pas apprécié, pas reconnu.
Il nous parle aussi et surtout de la vie, de ce qu'on en fait, de ce qui est important, de ce qui semble vital ou insignifiant, mais qui constitue le quotidien.
Il nous parle de nos rêves, de nos envies, de nos désirs les plus fous, du temps qui passe, de celui qu'on savoure chaque jour, ou de celui qu'on gâche parce qu'on n'en profite pas.

On referme ce livre avec l'envie d'irrépressible d'aller embrasser son amoureux, d'aller respirer l'odeur de l‘herbe coupée dans le jardin, d'appeler sa soeur au téléphone, de caresser son chat, de faire ces petites choses toutes simples qui donnent le sourire et nous rendent heureux quelques instants, quelques tous petits moments certes, mais qui, additionnés les uns aux autres, font de notre vie un patchwork de jolis souvenirs et nous rend unique.
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Seul dans une brasserie, perdu dans ses pensées, David regarde ses mains. Quand un homme l'interpelle et s'assoit à côté de lui, il est surpris de reconnaître son oncle Harry. C'est alors qu'il lui confie qu'il vient de se faire virer du fast-food dans lequel il bossait et que sa carrière de sculpteur a malheureusement pris fin il y a de cela 5 ans alors qu'elle avait si bien commencé. le vieil homme n'est pas venu les mains vides puisqu'il a apporté avec lui un comic que David avait dessiné étant jeune. Sur ces pages, il reconnaît "Superfille" qui n'est autre que sa soeur Suzy, "Autre-man", son père et "Superskulteur" , lui-même. Dans ce comic, il s'imaginait pouvoir modeler tout ce qu'il touchait avec ses mains. Lorsque la serveuse revient leur proposer autre chose à boire, oncle Harry lui demande si elle connaît l'homme en face de lui. Elle s'extasie aussitôt lorsqu'elle reconnaît David Smith, le sculpteur. Ce dernier, agacé, s'emporte, désolé à l'idée qu'il n'est plus ce grand artiste. Les deux hommes continuent de converser lorsque, soudainement, le jeune homme prend conscience que son oncle est mort. La Mort, sous l'apparence d'Harry, lui propose alors un marché. Il pourra modeler avec ses mains, comme il en rêvait tout gosse. Mais, seulement pour 200 jours. Ensuite, il mourra. Prêt à donner sa vie, David accepte...

En presque 500 pages, l'on suit les aventures de David, jeune sculpteur de 26 ans, qui a connu la gloire. Son rêve le plus cher est de pouvoir sculpter et que l'on reconnaisse son travail d'artiste. Et, pour lui, cela n'a pas de prix... même pas sa vie. Doit-on aller jusqu'au bout de ses rêves, quitte à se bruler les ailes? Scott McCloud mêle habilement fantastique, art et amour et prend le temps d'installer son récit. S'attarde-t-il aussi bien sur l'aspect psychologique du personnage que ses motivations ou sa relation avec Meg. Tous les deux très touchants, on les observe évoluer non sans une certaine émotion. Graphiquement, l'auteur excelle dans tous les domaines, que ce soit dans les plans larges où fourmillent les moindres détails ou dans les visages si expressifs. La mise en page est finement travaillée et dynamique, le trait maîtrisé. L'auteur nous offre un impressionnant album fouillé d'une grande justesse.

Le sculpteur... de l'art...
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Que serions-nous prêt à perdre pour réussir ? Notre famille ? Nos amis ? Et pourquoi pas notre vie ? David Smith, artiste qui a connu son heure de gloire avant de retomber dans l'anonymat, va être confronté à cette question primordiale, ce pacte avec la mort.
En quelques minutes, il gage sa vie contre une maîtrise absolue de son art : la sculpture. Ses mains deviennent alors capables de donner à n'importe quelle matière, toutes les formes imaginables. Il touche enfin à la création absolue. Plus rien ne lui résiste. Enfin, plus rien de matériel. Car pour le reste, cela ne va pas être aussi simple…

On suit alors le parcours de David, entre folie créatrice et tentative désespérée de retrouver la reconnaissance passée. Scott McCloud nous ouvre a une réflexion juste et pertinente sur le monde de l'art, sur ce que c'est, pour un artiste, de tout sacrifier pour créer et ne récolter le plus souvent que désespoir et colère quand tant d'efforts et d'énergie se heurtent à l'indifférence…
Entre le mythe de l'artiste incompris et la réalité des marchands d'art :

"– le marché est peut-être le médium de certains artistes. Et ce qui semble grossier à nos yeux est peut-être une authentique matière pour eux.
– Les spectateurs sont la matière. Sans eux nous ne sommes rien."

Est-ce qu'on peut composer avec cette réalité sans renier sa créativité, ses propres aspirations ? Et que dire de la vie en générale : est-ce que l'artiste peut concilier vie amoureuse, sociale, … et création ? N'est-ce pas incompatible ? Ne faut-il pas y renoncer ?

David Smith a 200 jours devant lui. Pas un de plus. 200 jours qui vont changer sa vie et sa vision du monde et des autres…

"J'entends sa voix qui me dit ce que nous sommes vraiment à la plus petite échelle. Des espaces vides à côté d'autres espaces vides. Tous intouchables."

Une oeuvre fascinante, un trait et un sens de la mise en scène qui vous accrochent dès le début pour ne plus vous lâcher…
Lien : https://page39web.wordpress...
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Moui, bon, ça se lit. Mais faut quand même pas être trop exigeant sur la qualité. Bon, le découpage, la mise en page, tout ça est très classique mais correct. le graphisme commence à poser quelques problèmes. Le dessin est un peu léger à mon goût, on ne peut pas dire que ce soit extrêmement bien travaillé, et la colorisation en tons de gris est tout sauf subtile (les gros aplats de gris pour les ombres portées, on fait mieux). Mais disons que ça passe plus ou moins. Ou du moins ça passerait, étant donné qu'on a vu bien pire, si le scénario et les personnages tenaient la route.

Car ici, ça ne va plus très bien. Déjà, quand on s'attaque au mythe faustien, va falloir être à la hauteur (ben oui, y'a deux-trois bonshommes qui ont commis des chefs-d'oeuvre sur le thème). Ce qui est loin d'être le cas de Mc Cloud. On se retrouve donc avec un personnage principal falot qui va pactiser avec la mort pour devenir un sculpteur célèbre ; déjà, le mec, il vend sa vie pour pas grand-chose. Mais le pire, c'est qu'il fait pas grand-chose de ce qui lui reste de vie - 200 jours seulement ! Et on tombe dans des platitudes sur l'art, voire des propos assez aberrants. le héros méprise Koons et Murakami (notez qu'il vise la même chose qu'eux, pourtant) mais n'a qu'une chose à leur reprocher, à eux et à d'autres : le travail organisé en équipe en atelier. Donc, nous pouvons en déduire que notre héros ne connaît strictement rien à l'histoire de l'art, tout sculpteur qu'il est, vu que la gestion du travail en équipe existe depuis... allez, un exemple au hasard : Raphaël (qui est un tout petit peu connu et reconnu dans l'histoire de l'art). Que Raphaël, Dürer, et bien d'autres se soient battus pour qu'on reconnaisse les peintres, sculpteurs, etc., comme artistes, en mettant en avant la démarche intellectuelle plutôt qu'un savoir-faire artisanal, David Smith (c'est notre sculpteur) n'en sait rien. C'est un peu embêtant. Parce que du coup, dès qu'il va parler d'art, c'est soit à côté de la plaque, soit assez ridicule. Soit les deux. Et tout ce qu'il va réaliser ne sera bizarrement pas issu d'une démarche artisanale qu'il prône tant (et que pouvaient prôner les Préraphaélites, par exemple, mais avec des arguments carrément plus intéressants), puisqu'il va utiliser des super-pouvoirs qui n'ont rien à voir avec le modelage de la glaise ou le travail au burin. Il va passer son temps, donc, à réaliser des sculptures réalistes sans grand intérêt : des trucs issus de ses souvenirs, des copies d'autres sculptures, le portrait de sa copine en quarante mille exemplaires. Et quand il fait un truc intéressant (la boule qui renferme des petits personnages), il pique l'idée à une collègue qui réalise des intérieurs miniatures. Mais bon, la plupart du temps (le récit est étalé sur 500 pages, quand même), il ne fait rien. Il lui reste 200 jours à vivre et il glande. le pacte valait le coup, ma foi.

Bon, oui, mais c'est pas tout. J'ai parlé de copine. Parce que, forcément, toute cette histoire sur l'art aurait eu du mal à remplir 500 pages, donc on y ajoute un brin de romance. Donc, pour faire très original, David rencontre la femme de sa vie le jour où la pacte est conclu (oh, c'est pas de chance, dites-donc!) Donc, là, on a deux personnages insipides pour le prix d'un, qui vivent une histoire insipide. Pour mettre du piment là-dedans, on fait de Meg une jeune fille dépressive - bien entendu, la dépression est traitée de façon aussi caricaturale que l'art. Meg, qui fait vaguement du théâtre. Mais surtout, qui ne peut se réaliser qu'en ayant un enfant, comme toute femme qui se respecte. Donc, vous avez bien suivi ? le mec, lui, ne peut se réaliser qu'à travers l'art, et la femme, à travers la maternité. Donc, là, la moutarde me monte derechef au nez (je suis Dijonnaise, ça aide). Les discours rétrogrades sur l'art, je trouvais ça con. le discours rétrograde sur l'homme et la femme, ça me désespère.

Je passe sur les références intellos hyper originales ("Le septième sceau", bien évidemment) qui n'étaieront pas pour autant l'album, ainsi que sur le fait que la création finale fait curieusement penser à un album de Forest ou à des illustrations de Schuiten. Je ne parlerai même pas du fait que Mc Cloud a essayé de développer le thème du double (le mythe faustien ne suffisant sans doute pas à son génie) et l'a laissé tomber en route.

Une question me taraude : pourquoi 500 pages pour dire si peu ???
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Scott McCloud, auteur de "l'Art Invisible : comprendre la bande dessinée" peut apparaitre comme un théoricien du neuvième art, désireux d'en expliciter les mécanismes : en clair, un intello. Ce qu'il est sans doute dans le fond (n'y voyez aucun sous-entendu péjoratif), lui qui prend véritablement au sérieux un art qui mit longtemps à prétendre à ce titre. Néanmoins il s'agit de ne pas oublier qu'il est également un narrateur hors pair, doublé d'un formidable dessinateur, ce qu'il nous rappelle de manière éclatante avec "le Sculpteur"

David Smith est sculpteur. Il est véritablement habité par son art mais, comme il n'entend rien aux relations humaines, ignore le sens du mot "réseau" et de l'expression "lèche-cul" il est méconnu, malgré un talent certain. C'est d'autant plus la loose qu'un homonyme a réussi dans la sculpture auparavant et qu'on le confond avec lui. Un jour, la mort lui apparait sous les traits de son oncle Harry et lui propose un pacte. Il aura la capacité de modeler n'importe quelle matière à mains nues mais n'aura que 200 jours pour utiliser ce don, avant de mourir. Au bord du gouffre, David accepte, avec, dès lors, pour unique but d'être reconnu...

Alors bien sur, on pourrait croire à une variation moderne du mythe de Faust, mais là n'est pas vraiment le propos de McCloud. Il ne s'agit nullement de salut ou de damnation mais plutôt de la valeur de la vie. En clair, il n'y a pas pire pour l'auteur que les regrets et il est de la responsabilité de chacun de ne pas gâcher son existence en activités superficielles et triviales mais, au contraire de se réaliser, via ce qui fait sens pour nous. de manière secondaire McCloud développe également une critique assez féroce du microcosme branché de l'art contemporain et pose la question : l'art peut-il faire l'objet d'un marché et à partir du moment où c'est le cas, existe-t-il encore ? A-t-il une valeur intrinsèque, née de la pure volonté créatrice de l'artiste, ou celle-ci réside-t-elle dans le regard de qui admire l'oeuvre ? Oui monsieur McCloud, vous êtes indéniablement un intello mais c'est bien aussi de tirer la bd, non vers le haut, mais à travers des territoires qu'elle délaisse un peu trop souvent. Que les sceptiques se rassurent, vous êtes également doué d'une grande sensibilité qui se traduit dans l'histoire d'amour qui se tisse entre Meg et David et dont l'issue en bouleversera plus d'un.

Au niveau purement graphique l'ensemble de cet album est brillant. Les cadrages sont remarquables, très cinématographiques, le dessin dégage une impression de maîtrise de bout en bout, très jolie noir et blanc ou les nuances de gris prennent une place prépondérante. L'expressivité des visages est vraiment extraordinaire et McCloud donne l'impression de pouvoir rendre avec justesse n'importe quelle émotion. La composition des planches est d'une grande lisibilité et s'adapte, à chaque instant, au rythme et aux intentions du récit.

Malgré des passages assez sombres, "le Sculpteur" est une ode à la vie et à tous ce qui en fait le sel et l'intérêt. La morale (si on peut employer ce terme) en est fort simple, et pourtant très difficile à mettre en pratique : n'oublie pas de vivre, la mort, elle, ne t'oubliera pas.
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J'avais entendu des avis très élogieux sur cette bande dessinée (ou ce roman graphique, comme vous voulez) et je me l'étais donc procuré en flânant dans une bouquinerie.

Je ne connais pas vraiment le mythe de Faust, dont l'auteur s'est inspiré pour en faire une réécriture moderne, et, de ce fait, cela ne m'a pas influencée dans ma lecture.

David Smith est un sculpteur qui peine à gagner de l'argent... Un jour, il va passer un contrat avec la mort elle-même. Durant 200 jours, il peut modeler tout ce qu'il touche rien qu'à la force de ses mains. Seulement, une fois le délai écoulé, il mourra... Il signe le pacte, sans savoir alors qu'il va bientôt rencontrer l'amour...

Cette histoire est étonnante, et j'irais même jusqu'à la qualifier d'ovni littéraire ! L'intrigue qui nous est contée est vraiment particulière, et je trouve intéressant de réécrire des mythes et légendes, comme c'est le cas ici.

Concernant les illustrations, j'ai été surprise par le choix des couleurs, mais j'ai bien aimé. À la fois le style graphique de Scott McCloud et les tons utilisés.

Cependant, j'ai été déçue du fait que l'art ne soit pas plus présent dans le livre, l'histoire d'amour prenant beaucoup de place. En fin de compte, nous ne voyons pas tant que ça de sculptures réalisées ou, du moins, pas assez à mon goût.

Dans l'ensemble, c'était une chouette bande dessinée, pas exempte de défauts mais qui a eu le mérite de m'intéresser tout au long de ses 500 pages.
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Scott McCloud que j'avais connu dans des leçons plus sympathiques et drôles sur l'art de la bande dessinée (dans une exposition à Lyon), m'a singulièrement surprise avec le sculpteur. le sculpteur, c'est David Smith, un jeune homme qui desespère de produire enfin de grandes oeuvres. Il passe un marché avec un étrange personnage : sa vie contre de belles mains créatrices.
J'ai beaucoup aimé cette histoire qui commence avec un jeune homme qui semble triste comme les pierres, il n'a plus rien, ni argent ni famille mais l'envie de créer de belles oeuvres qu'on arrête de le confondre avec son homonyme - un des milliers de David Smith qui existe aux Etats-Unis (monde ?). Son parcours vers son but ultime sera semé d'embûches, il s'en approche, il s'en éloigne. Il découvre l'amour, l'amitié est mis à rude épreuve. Les 500 pages se dévorent toutes seules, le suspens monte pendant le décompte se fait... On s'attache aux personnages, peut-être un peu trop. Les idées, les dessins de Scott McCloud sont géniaux, terribles, osés, on rentre dans son imagination incroyable. Malgré les moments sombres assez nombreux de la vie de David Smith, son art nous éclaire avec puissance.
Magnifique.
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David Smith est dans l'impasse. Seul au monde après la mort des membres de sa famille, artiste déchu après avoir été un sculpteur prometteur, sans le sou, il déprime seul dans un snack le jour de ses 26 ans. On le sent fragile, tourmenté et intensément désireux de continuer à créer. Son oncle entre alors dans le snack, l'encourage, lui propose un marché. Mais son oncle est mort, justement, quelques années plus tôt, alors qui est-il vraiment?
Scott McCloud revisite le célèbre mythe de Faust dans un New York du deuxième millénaire, dans un roman graphique ambitieux aux tons bleutés, à la composition très travaillée et aux personnages terriblement émouvants. C'est simple, malgré le pavé, je l'ai lu en deux fois, tard le soir, tôt le lendemain matin, tellement il est prenant, et laisse un drôle sentiment quand la fin arrive. David et Meg ne sont que des personnages de papier et pourtant j'éprouve le besoin de les enlacer tellement ils m'ont touchée.
Gros coup de coeur.
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David Smith, sculpteur en mal d'inspiration, approche de la trentaine avec le sentiment aigre et découragé d'être un artiste raté. Son vieux rêve de gosse lui semble bien loin désormais. « Et moi, je suis 'supersculpteur ». Je modèle ce que je veux avec mes mains. » (p. 15) le rêve va devenir réalité quand David rencontre un personnage à la fois familier et inconnu qui lui propose un marché singulier : il sera capable de créer ce qu'il veut avec ses mains, mais il n'aura que 200 jours pour en profiter avant de mourir. Hélas, il est bien connu qu'un marché faustien est par définition et par nature un marché de dupe : alors qu'il pense n'abandonner que sa vie, David va aussi devoir renoncer à son grand amour, Meg, qu'il rencontre juste après avoir conclu le pacte fatal. Alors qu'il court après la reconnaissance et la célébrité, il laisse échapper l'essentiel. « Je peux le faire. Je ne serai ni perdu ni oublié. » (p. 188)

Le personnage principal est défini par son art, à tel point que le titre du livre n'est pas son nom, mais son métier. Il est obsédé par la réussite et voit le succès comme l'achèvement de son existence. Nombreux sont les points qui l'opposent à Meg. Alors que la jeune femme n'est que vie et mouvement, David est l'attente minée par l'obsession de l'échéance. Il n'a que 200 jours, alors il crée et il aime dans l'urgence, avant le glas, avant le clap de fin. Mais à vivre sans prendre son temps, David ne vit qu'à moitié. À la fois réflexion sur la création et l'art, le sculpteur est aussi un regard doux-amer porté sur l'existence et la fragilité des choses. « Tu as l'impression de livrer une bataille vouée à l'échec – et c'est le cas. » (p. 478) Ars longis, vita brevis, disaient les Antiques.

New York, ville de verre et d'acier, est un gigantesque piège à loups dont les mâchoires de bitume ne demandent qu'à se refermer sur le pauvre fou qui a bradé sa vie pour l'art. Plus qu'un décor, la ville est un théâtre et devient même la matière première de la folle créativité du sculpteur. « Je peux modeler n'importe quel matériau simplement en le touchant. Même les parties avec lesquelles je ne suis pas en contact direct. » (p. 320) On voit alors David s'élancer dans la nuit, tel un justicier masqué de l'art, mais il est un superhéros sombre dont les élans créateurs se troublent de pulsions destructrices.

Scott McCloud a un talent particulier pour dessiner la foule et sa cacophonique solitude. David est souvent perdu dans la page, mais il en reste le point de mire, comme si la multitude ne s'amassait que pour mieux l'encadrer. Toute en camaïeux de bleu, blanc et noir et portée par un trait affirmé et précis, l'image reste simple tout en étant incroyablement précise. L'économie de couleurs permet de sublimer les détails et fait planer sur la lecture un petit air glacé, un peu inquiétant, comme un avant-goût de l'étreinte macabre qui attend le protagoniste. Les pleines pages sont superbes, dynamiques et rayonnantes, même les plus sombres. Je me suis perdue dans certaines d'entre elles qui, agrandies, feraient de magnifiques tableaux. Un dernier mot sur la beauté et la finesse des visages : il suffit parfois à Scott McCloud d'une ombre à peine déposée pour exprimer un sentiment. Visuellement, le sculpteur emprunte au comics, au cinéma et aux peintres flamands classiques. le résultat est spectaculaire et émouvant à plus d'un titre.

J'aime les mythes littéraires et leurs différentes réécritures. À propos de Faust, je vous conseille notamment la lecture de Marguerite de la nuit de Pierre Mac Orlan. Ici, Scott McCloud revisite le mythe avec élégance, perspicacité et modernité. Il s'est attaqué à un monument et a produit un livre superbe, massif comme un bloc de marbre, mais ciselé comme un chef-d'oeuvre.
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