Ce roman encensé de partout présenté comme un « futur classique de la littérature américaine » se trouvait dans ma pile à lire depuis sa sortie en août 2020. le raz-de-marée de chroniques criant au chef-d'oeuvre m'ayant coupé toute envie de lecture, je l'avais très rapidement remisé tout au fond de mon immense pile à lire pour ne l'en ressortir que tout récemment dans le cadre d'une lecture commune. Autant le dire tout de suite:
Betty fut un flop monumental et ma pire lecture de 2022.
Betty (2020) est le deuxième roman de l'autrice américaine
Tiffany McDaniel (1985) après
L'été où tout a fondu (2022) mais le premier traduit en français.
Tiffany McDaniel a fait le choix d'écrire un roman très largement inspiré de l'histoire de sa mère
Betty Carpenter, la fille d'une mère blanche et d'un père cherokee, née en 1954 à Ozark, dans l'Arkansas. Ecrit à la première personne du singulier,
Betty est censé traduire les pensées d'une fillette de sept ans au début du roman. Et c'est là mon premier grand bémol: dès les premières pages, la voix de la toute jeune narratrice ne me paraît pas crédible et le sentiment que cette voix sonne faux ne m'a jamais quitté tout au long de la lecture.
Au fur et à mesure de ma lecture, je constate que le même problème s'applique à d'autres personnages. Au père de
Betty tout d'abord qui s'adresse systématiquement à cette dernière (et uniquement à cette dernière) en lui donnant du « petite indienne » alors qu'il est père de onze enfants, tous métis. Un ressort narratif, peut-être, pour souligner que
Betty lui ressemble tout particulièrement (la seule sur onze enfants, vraiment?) mais à mon sens inutilement lourd et pas vraiment très crédible. Son comportement me laisse également dubitative.
Je vous laisse ensuite apprécier un extrait d'insultes proférées par une fillette blanche de sept ans (!) à l'encontre de
Betty : « Va te faire foutre, espèce de squaw. T'es tout juste bonne à me lécher le cul. (…) Espèce de sale métis aux cheveux raides. (…) Espèce d'ordure (…). » Un beau chapelet d'injures sur deux pages qui se termine par « Tu ne comprends pas ça? Je serai toujours meilleure que toi, P'tite Indienne. » Des insultes racistes et inutilement vulgaires (une petite fille de sept ans parle-t'elle vraiment comme ça?!) se terminant par un terme porteur d'une connotation affectueuse?! Vraiment? L'autrice semble obsédée par ce qualificatif et en fait un usage bien trop fréquent et sans aucune finesse, rendant le tout affreusement lourd et lassant.
La forme du roman ensuite.
Betty comporte certaines invraisemblances et des raccourcis douteux et est composé de très, trop, nombreux dialogues souvent creux et qui n'apportent strictement rien au récit. Les phrases enfin sont courtes, très simples (la syntaxe correspond ici bel et bien à celle d'une fillette de sept ans) et bien souvent dénuées de toute subtilité. C'est lent, long et, disons-le, fort ennuyeux. Quant à la poésie dont il a été si souvent question dans les chroniques élogieuses, je la cherche encore.
Enfin, dernier point négatif et pas des moindres: la violence de certains passages m'a laissée bouche-bée. Je m'interroge très sérieusement sur le bien-fondé d'une telle surenchère de violence et de cruauté. Un exemple: sur six pages (six!) et dans un langage très cru, la mère de
Betty raconte, dans les moindres détails, à sa fille de neuf ans (!) l'inceste dont elle a été victime dans son enfance. Cette scène n'est pas seulement abominable, elle tombe véritablement comme un cheveu sur la soupe! de la violence totalement gratuite, sans aucun intérêt.
Le roman fait sept cents pages. J'en ai lu trois cents. Et c'était déjà beaucoup trop.