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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Voilà un primo-romancier qui n'a choisi ni la facilité, ni l'air du temps, mais pris le parti de nous replonger dans l'une des périodes les plus mouvementées de notre histoire : la Révolution. Il le fait avec talent et surtout une belle maîtrise. D'un coup, le lecteur se trouve comme transporté dans le temps, au milieu du bruit et de la fureur, d'un monde en train de disparaître dans des flots de sang. On pense un peu à La Religion de Tim Willocks pour la science du récit des affrontements, mais en beaucoup plus fin et bien mieux écrit.

De la Révolution Française, à moins d'avoir étudié la période de bout en bout, on connaît surtout les grandes phases, les événements parisiens, ainsi que les épisodes vendéens qui ont fait l'objet de nombreux livres et films. Beaucoup moins la façon dont la contre-révolution a été matée à Lyon et dans sa région alors que des gentilshommes fidèles au roi même après son exécution et surtout désireux de ne pas céder à la terreur - ni aux diktats parisiens - auront résisté jusqu'à la mort. Antoine de Meaux s'est donc glissé dans les pas de la noblesse lyonnaise et plus particulièrement de la famille de Pierrebelle dont quelques membres ont assisté le 10 août 1792 à la prise du Palais des Tuileries, prélude à la chute de la famille royale. Charles de Pierrebelle y a laissé la vie, sous les yeux de son frère Jean alors qu'accompagnés de leur beau-frère Louis du Torbeil, ils faisaient face aux hordes de révolutionnaires déchaînés. Rentrés à Lyon, ils réussissent dans un premier temps à reprendre la ville même si le temps joue contre eux. Car alentours, dans les campagnes, le peuple gronde, la machine est lancée et elle ne s'arrêtera pas.

Sous la plume de l'auteur, la fureur est palpable, le sang coule, les cris et les chants accompagnent les exécutions et les assassinats, les visages sont déformés par la haine. "Toute cette affaire, au fond, n'était pas compliquée. La nation sécrétait en son sein un corps étranger. Afin d'assurer l'ablation de cette tumeur, il fallait charcuter. le sang giclerait, çà et là. Il serait toujours temps, plus tard, de faire le tri entre le bon grain et l'ivraie, entre ceux qui, par niaiserie, s'étaient laissés entraîner, et les meneurs, qui connaîtraient bientôt le glaive de la nation, ou plutôt son rasoir". Dans la famille Pierrebelle, chacun est engagé à sa manière dans les combats. Les chocs sont rudes et bientôt, il ne faudra plus songer qu'à sauver sa peau...

Ce qui est remarquable dans ce roman, c'est la façon dont il parvient à inscrire les destins individuels de quelques personnages dans une Histoire en marche et un collectif. Tout est groupe, armées, hordes, files de condamnés. Même les fosses sont communes car au rythme où l'on exécute, il n'y a plus le temps de penser aux sépultures. Là où nombre de livres nous accrochent aux basques de héros porte-paroles, celui-ci s'attache à nous donner une vision d'ensemble, comme un immense tableau figurant des combats où l'on pourrait soudain reconnaître l'un ou l'autre des personnages. Ils sont tous des témoins. Mais ils ne vivront pas tous suffisamment pour le raconter.

Pas de méchants ni de gentils, le propos est ailleurs à montrer un monde qui bascule et des individus pris dans la tourmente. Une fresque historique enthousiasmante et ambitieuse, servie par un récit enlevé et passionné. Bluffant.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Ce roman historique nous plonge, à travers l'histoire d'une famille, en plein cœur de la Révolution française. Plus précisément, l'auteur, Antoine de Meaux, s'est concentré sur un épisode bien précis et peu étudié de cette période, celui du soulèvement de Lyon contre la Convention en juin 1793 qui conduisit au siège de la ville et à une terrible répression par la suite.


L'HISTOIRE
Point de départ de ce récit, une date, un lieu, un événement : le 10 août 1792, convaincus de la complicité de Louis XVI avec l'étranger, les fédérés et les sans-culottes prennent d'assaut le palais des Tuileries, obligeant le roi et sa famille à se réfugier à l'Assemblée. Quatre personnages d'une même famille participent alors à cette journée sanglante, mais pas dans le même camp : tandis que Louis du Torbeil et ses deux jeunes beaux-frères, Jean et Charles de Pierrebelle, tentent chacun de leur côté de prêter main-forte aux défenseurs des Tuileries, leur cousin Rambert Conche fait partie des émeutiers qui assaillent le palais. Cette tragique journée se solde par des centaines de morts, dont celle du garde national Charles de Pierrebelle, le sac du palais des Tuileries et la chute de la royauté.
Alors que la Terreur se profile, nos personnages regagnent leur terre natale, à Lyon et dans le Forez. Mais les kilomètres qui les séparent de Paris ne les éloignent pas pour autant des soubresauts de la Révolution. La politique de la Convention, bientôt dominée par les jacobins radicaux, ne fait pas l'unanimité à Lyon, loin de là. Ainsi, au printemps 1793, la municipalité de Lyon, dominée par les jacobins de Chalier, est renversée au profit des modérés. La rupture entre Lyon et la Convention est consommée en juillet 1793 lorsque Chalier est guillotiné : la Convention envoie alors des troupes armées conduites par le général Kellermann pour rétablir l'ordre dans la ville. C'est alors que les différents membres des familles de Pierrebelle et Conche – Louis, Jean, Camille, Barthélemy d'un côté, Rambert Conche de l'autre – vont s'engager dans cette nouvelle lutte, une véritable guerre civile. Commence alors un siège qui va durer deux mois, entre le 9 août et le 9 octobre 1793 : mouvements de troupes, combats d'artillerie, bombardement de la ville, incendies, disette… rien ne sera épargné à la ville de Lyon qui finit par se rendre ni à nos différents protagonistes qui connaîtront chacun des destinées très différentes… Renommée Ville-Affranchie, la ville subit alors une lourde répression menée notamment par Fouché et Collot d'Herbois : exécutions massives (guillotine, fusillade, mitraillade), destruction d'immeubles et des remparts de la ville.


UN SUJET ORIGINAL ET POINTU
La Révolution française, largement représentée dans la littérature historique, est un véritable sujet de prédilection pour les romanciers, que ce soit les événements parisiens ou bien les guerres vendéennes. En revanche, le thème des insurrections fédéralistes est rarement voire pas du tout abordé en littérature. Plus largement, peu de livres d'histoire, de revues, de magazines ou de films traitent de ce sujet qui reste mal connu mais qui est ô combien passionnant, reflétant toute la complexité de la Révolution française. Car contrairement des guerres de Vendée, les fédéralistes sont des républicains, ils se battent pour une certaine idée de la Révolution, mais celle-ci est devenue une véritable machine à tuer infernale, incapable de s'arrêter.
Un sujet aussi pointu aurait certainement mérité une note historique en début d'ouvrage – chronologie des faits et contexte historique – pour mettre le lecteur dans les meilleures conditions pour aborder ce roman passionnant mais néanmoins exigeant.


UN ROMAN TRÈS DOCUMENTÉ
Antoine de Meaux s'est livré à un très méticuleux et remarquable travail de documentation pour retranscrire le plus finement possible le déroulement du siège de Lyon. Témoins de ce travail de fourmi, les annexes qui contiennent deux arbres généalogiques – celui de la famille de Pierrebelle et celui de la famille Conche –, un plan du palais des Tuileries et des cartes de Lyon et de la région.
Ce très fort souci du détail historique, qui revêt parfois un caractère quasi chirurgical, alourdit parfois le récit, cassant le rythme, l'étirant, noyant le lecteur dans des descriptions lui faisant perdre le fil de l'histoire. Même les personnages semblent parfois écrasés par le poids des descriptions tant le souci de véracité historique semble prévaloir sur la fiction : l'Histoire prend alors le pas sur l'histoire. Cette impression est renforcée par le fait que les personnages n'ont guère d'interactions entre eux, ils agissent la plupart du temps de manière isolée. La Révolution dévore tout sur son passage, même ces personnages de roman dont on découvre au fil de la lecture le passé par bribes, mais les temps ne sont plus les mêmes et toutes les actions, pensées et sentiments des personnages sont vus par le prisme de la Révolution. En revanche, à la fin du roman, alors que la ville de Lyon s'est rendue, les personnages reprennent le dessus, semblent plus vivants et prennent du relief.
D'autres fois, au contraire, la présence de détails historiques, par leur force évocatrice, permet au récit de prendre son envol, participant à l'intensité dramatique et au souffle romanesque qui plane tout au long du roman.
Quoi qu'il en soit, force est de constater le talent avec lequel Antoine de Meaux réussit à inscrire les destins individuels de plusieurs personnages dans une magnifique fresque de l'Histoire en marche et brosse un tableau aussi fidèle que possible de ces événements dramatiques, avec moult détails.


UN ROMAN EN QUATRE PARTIES
Ce roman se compose de quatre grandes parties chronologiques, chacune divisée en courts chapitres, tels des saynètes. Une structure très agréable compte tenu de l'épaisseur du livre : 464 pages ! En effet, ce découpage bien rythmé ainsi que la présence de sauts de ligne tout au long du roman permettent une bonne aération du texte, le rendant tout à fait digeste et facilitant la lecture… et les pauses ! Le lecteur peut ainsi tout à loisir dévorer des centaines de pages à la suite ou grignoter par petits bouts si son emploi du temps ne lui permet pas de lire des heures durant.
Cependant, cette structure, de par son côté haché, a aussi ses points faibles : les saynètes se succèdent les unes aux autres, on passe d'un personnage à un autre, d'un lieu à un autre, le tout sans jamais s'attarder, comme si le temps nous était compté… mais il l'est compte tenu des événements que vivent les personnages.


DE NOMBREUX PERSONNAGES, FICTIFS OU RÉELS
La galerie des personnages est pour le moins impressionnante ! Qu'ils soient au premier plan ou à l'arrière-plan, ils sont tous importants, ils jouent tous un rôle dans cette vaste fresque historique : soldat, général, prêtre, noble, négociant, artisan, paysan, etc. Tous ces personnages, réels ou fictifs, se retrouvent emportés par les flots de cette guerre civile, conduisant des membres d'une même famille à se combattre, des paysans à affronter des nobles et des royalistes en déroute, mais tous sont déterminés à faire gagner leur Révolution, leurs idéaux.
Côté personnages réels, citons notamment le général Kellermann, Fouché, Collot d'Herbois, le général de Précy, Chalier, Couthon ou bien encore Dubois-Crancé.
Les personnages fictifs ne sont pas en reste puisque l'auteur s'est glissé dans les pas de la famille de Pierrebelle, robins anoblis, et de la famille Conche, négociants en soie, deux familles du Lyonnais et du Forez. Nous voici en présence d'une belle brochette de personnages, mais peu de femmes en définitive, à part Sophie de Pale et Jeanne : les frères de Pierrebelle – Jean (noble qui tombe amoureux de la jeune Sophie de Pale), Charles (garde national qui meurt dès le début du roman), Camille et Barthélemy (prêtre réfractaire) – ; leur beau-frère Louis du Torbeil ; leur cousin jacobin Rambert Conche (ancien oratorien défroqué, conseiller de Chalier) et son frère négociant en soie, Irénée Conche. Des personnages certes fictifs, mais dont les parcours sont représentatifs des nombreux destins broyés ou transcendés par la Révolution.


UN STYLE LITTÉRAIRE, AVEC UNE RÉELLE FORCE ÉVOCATRICE
En prenant le parti de relater le plus fidèlement possible le soulèvement et le siège de Lyon, Antoine de Meaux se trouvait un peu contraint par la forme : présence importante des descriptions et intervention d'un narrateur omniscient, présent sur tous les terrains, en tous lieux, mais aussi dans toutes les pensées des personnages. Le côté un peu figé et statique du récit aurait pu être adouci par la présence de dialogues – il y en a mais pas suffisamment.
Cependant, ce sont ces descriptions, parfois un peu longues mais très vivantes, qui permettent au lecteur d'entrer en plein cœur de l'histoire, de s'imprégner du contexte d'alors au point d'être parfois rebuté par le réalisme de certaines scènes violentes. Pour peu que le lecteur s'accroche lors de la lecture des premières pages, ce sera gagné, il entrera dans l'imaginaire très visuel de l'auteur. Il se retrouva alors littéralement transporté dans le temps à Lyon, au milieu du bruit et de la fureur, passant de scènes de chaos à d'autres scènes aussi terrifiantes. Sous la plume à la fois soignée, élégante et agitée d'Antoine de Meaux, la fureur et la haine sont palpables, les cris accompagnent les exécutions, le sang coule sur les scènes de bataille…


Un roman d'une précision historique incroyable, servi par une écriture soignée et pleine de vie.


Merci à Babelio et aux éditions Phébus pour ce partenariat (opération Masse Critique).
Lien : http://romans-historiques.bl..
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Une révolution, des batailles, des chassés-croisés et surtout des hommes; comme toujours, les sincères, les exaltés et les opportunistes. Des femmes aussi qui luttent pour survivre, quoiqu'il se passe, et des enfants perdus au milieu des champs de bataille. Des gens qui s'aiment aussi dans la fureur et le sang, malgré tout. Un grand roman, un roman fleuve mais jamais ennuyeux tant le récit est fluide et coule à travers de courts chapitres qui dynamisent l'ensemble de l'histoire. On apprend énormément de ce récit très détaillé. Et notamment que la révolution ne s'est pas passée seulement à Paris mais aussi à Lyon où ce sont affrontés des radicaux et des modérés. Saisissant!
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J'ai découvert ce livre par hasard. le résultat d'une rencontre à la journée du Livre de Talloires avec Antoine de Meaux. Un jeune écrivain qui a écrit un roman sur un siècle qui n'est pas le sien, c'est toujours intrigant. En plus, « le Fleuve Guillotine » parle des années sombres de la Révolution française, avec ces deux années charnières que furent 1792 et 1793. J'ai acheté le livre par curiosité…

Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir que le principal personnage du livre est la ville de Lyon, ma bonne ville natale qui connut à l'été 1793 des événements tragiques avec le siège de la ville pendant pendant neuf semaines par les troupes jacobines de la Convention. La ville avait eu le grand tort de s'élever contre les excès de la Révolution et de faire tomber le parti Jacobin. Au même moment, Paris avait fait l'inverse en chassant les Girondins pour instaurer un règne sans partage des Montagnards. Les Lyonnais avaient commis un crime en s'opposant à l'autorité de la capitale. On allait le leur faire payer très chèrement.

« le Fleuve Guillotine » raconte en trois tableaux ces événements : d'abord la chute des Tuileries à Paris le 10 Août 1792 ; la révolte lyonnaise d'avril 1793 et ses tentatives de gagner à sa cause les départements voisins ; le siège et la chute de Lyon le 9 Octobre 1793.

Pour rendre compte de ces événements, Antoine de Meaux a choisi la forme romanesque avec le récit coloré d'une large famille dont les membres vont se trouver des deux côtés du conflit. Il réussit à nous emporter dans notre Histoire avec brio, en nous proposant des destins brisés par un événement qui emporte tout sur son passage.

La restitution de l'époque est assez étonnante. Dans un style et un vocabulaire très imagés, l'auteur arrive à nous faire entrer dans la peau de ses acteurs qui vont vivre une rupture de leur environnement jamais égalée. le monde s'écroule sous leurs pieds, mais chacun va faire bonne figure pour affronter ces événements qui le dépassent. Tout le livre est une série d'esquisses avec des personnages plus vrais que nature. On se demande d'ailleurs comment l'auteur a pu, à ce point, rentrer dans la psychologie d'un homme du XVIIIème siècle. C'est la plus grande réussite de ce livre…

« le Fleuve Guillotine » mérite vraiment le détour pour découvrir une page méconnue de notre Histoire. Une guerre civile entre Républicains, puisque les Lyonnais se considéraient comme des enfants de la Révolution tout autant que leurs adversaires. L'occasion de découvrir que notre Révolution – de nos jours, très populaire – fut d'une grande sauvagerie. L'esprit de l'époque ne supportait aucune opposition; l'assurance de détenir la vérité était le plus grand liberticide.

Rappelons-nous que les révolutions ne sont pas des long fleuves tranquilles, mais plutôt des fleuves guillotine… A méditer par tous les adorateurs des solutions extrêmes…
Lien : http://calembredaines.fr
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La Révolution Française n'a pas été une période intéressante pour moi mais là avec ce roman, j'ai découvert une partie de l'Histoire. Un peu sanglant à mon goût. Beaucoup de détails , ce que j'ai apprécié. Et puis Lyon sous un autre jour, je dis oui. Amateurs de romans historiques, ce livre est pour vous.
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