Lock Groove Comix, tome 1

Le dessin est brut, assez grossier, au trait en noir et blanc, dans le style “Fanzine”. Jean-Christophe Menu partage avec nous les découvertes musicales de sa jeunesse, pour ceux qui comme moi sont de la même génération, et qui ont chéris leurs vinyles, ont chiné chez les disquaires d'occasion, les fans de rock, le vrai, c'est un bon moment de nostalgie. Ce court album est constitué de plusieurs petits témoignages, concerts, anecdotes, achats de disques, agrémentés de quelques critiques d'albums. En lisant cette bande dessinée, j'ai ressenti mes premiers émois rock ‘n rollesques, et des plus récents aussi.
“Le lock groove est le terme anglais pour définir le "sillon sans fin" qui boucle chaque face d'un disque vinyle, habituellement silencieux mais parfois enregistré.” Je ne connaissais pas ce terme, mais je connaissais le truc, il y en a un sur mon album “Camembert électrique” de Gong, sur lequel est enregistré “Tu veux un camembert”, dit d'une voix monocorde. Quand tu oublie d'arrêter ton disque, tu peux écouter à l'infini cette petite phrase. Voilà pour ce qui est de “mon Lock Groove” qui me rend nostalgique des albums vinyles.
Tu veux un camembert… Tu veux un camembert… Tu veux un camembert… Tu veux un camembert… Tu veux un camembert… Tu veux un camembert… Tu veux un camembert…

Envie de rigoler ? Non ? Tant pis pour vous.

Jean-Christophe Menu, les amateurs de BD le connaissent pour avoir créé L'association, éditeur indépendant déterminé à proposer une alternative à l'académisme de la bande dessinée dans les années 80. Dans la pure tradition de ce label tout sauf traditionnaliste, il s'éclate (et nous avec) en nous racontant son autobiographie d'écouteur de vinyls. Il part de la définition du lock groove, ce sillon sans fin qui clôt chaque face enregistrée d'un disque et empêche le bras de la platine d'aller jusqu'au centre imprimé. La découverte de sons enregistrés sur certains lock grooves le plonge dans une réécoute désordonnée et désopilante de ses 33 T, servie par des dessins en noir et blanc, caricatures bidonnantes de l'ado qu'il était et des groupes qu'il adorait.

Tout ça n'est que prétexte à digressions, anecdotes et foutage de sa propre gueule. Gamin enthousiaste qui confectionne des compils K7 à partir du hit parade, morveux boutonneux qui s'initie aux Beatles grâce au comité d'entreprise paternel, jeune érudit atteint de collectionnite… toute ressemblance avec des personnages existants…

Il a gardé toutes les preuves de son évolution musicale («oui, je garde toutes mes merdes») et analyse, des décennies plus tard, des joyaux ou des bouses, avec des remarques du style, à propos de Juke Box Jive des Rubettes : « Euh…merde, j'aime encore ça. »

Bon, d'accord, Menu est vieux (il est né en 64). Ca n'empêche pas d'être drôle. Pour preuve les tronches de ses relous qui assistent à un concert de rock : ceux qui gueulent «Rock'n'roll !» toutes les deux secondes, ceux qui réclament une chanson précise entre chaque morceau, ceux qui beuglent «à poil !» dès qu'il y a une nana sur scène, les handbangers, les slammeurs (« j'ai toujours l'impression que c'est sur ma gueule que le mec va finir son parcours »), ceux qui apostrophent le chanteur…

Poilant je vous dis.
Lien : https://blackrosesforme.word..

Le lock groove, ce sillon sans fin qui clôt chaque face d'un disque vinyle et est parfois enregistré, est le prétexte à une ballade musicale, du hit parade des années 70 au "post-punk para-grunge noisecore" des années 80-90 et plus. de chroniques de disques en souvenirs de concerts (et de l'inévitable mec pénible dans le public !), voir de festivals boueux en Bretagne, J.C. Menu nous fait partager ses émotions, ses galères, sa révolte "anti-technologique". On apprécie aussi le graphisme, qui mêle agréablement "vieilles" planches et nouvelles cases. Qu'on connaisse ou non les groupes dont il parle, la boucle infinie des lock groove nous embarque !