Citations sur Un animal doué de raison (35)
- En psychologie, dit Lisbeth, il n’y a pas de hasard, il n’y a que des mobiles inconscients.
« Bi et Fa, les deux dauphins, le regardaient, ni amicaux, ni hostiles.
- Eh bien, Bi, dit Sevilla, tu ne dis rien ?
- Maintenant, je ne parle plus. Maintenant je nage.
- Pourquoi ?
- Je ne veux plus parler la langue des hommes.
- Moi non plus, dit Fa tout d'un coup.
- Pourquoi ? dit Sevilla en se tournant vers lui.
Fa ne répondit pas.
- Pourquoi, Bi ?
Bi le regarda alternativement de l'œil droit puis de l'œil gauche... Elle dit d'une voix criarde, nasillarde et parfaitement distincte :
- L'homme n'est pas bon. »
Est-ce que je tiens, avec la "politique-fiction", la définition que je cherche ?
Pas tout à fait. J'ai conscience qu'il reste dans "Un animal doué de raison" des éléments qui ne sont pas réductibles à la politique-fiction telle que la conçoivent nos amis d'outre-Atlantique : ne serait-ce par exemple, que le roman animal et la longue tradition philosophique qui, en Europe, lui reste attachée, la fusion de l'anticipation scientifique et de l'anticipation de l'histoire, l'analyse des rapports du savant et de l'état, l'étude parallèle du comportement des dauphins et du comportement humain.
Le résultat en est une œuvre hybride. Je le dis sans aucune honte, car pas plus en littérature qu'en biologie, je ne suis hostile au brassage des sangs...
(extrait de la préface insérée en début de volume paru chez "Folio" en 1972)
Le bonheur est si peu habituel qu’on peine à l’identifier quand il est là, offert, prêt à se laisser saisir.
Le dauphin accepte la récompense parce qu’elle fait partie du jeu, et refuse toute punition. Il est si content d’exécuter son tour qu’il l’exécutera avec n’importe qui, pour peu qu’on lui donne les signaux corrects. En outre, il s’amuse, il aime travailler, il jouit des applaudissements.
Vous ne m'en voudrez pas de vous dire d’abord quelques mots de sa physiologie. Le dauphin n'est pas un poisson, mais un cétacé. Il n'a pas de branchies, mais des poumons. Respirant l’oxygène de l'air, il vient faire surface pour l'obtenir. Le poisson, comme tous les animaux improprement appelés à sang froid, adopte la température ambiante : glacé dans les eaux de l’Antarctique, il est tiède dans la mer des Caraïbes. Le dauphin lui, est un animal à sang chaud, c'est-à-dire dont la température est constante, quelle que soit la température où il se trouve plongé : d’où la couche de lard dont il est, comme sa grosse cousine, la baleine, revêtu, pour résister au froid.
Il n'est pas possible de punir un dauphin. C'est un animal plein de dignité. Il n'accepte pas la punition et rompt aussitôt tout rapport avec vous. On peut même se demander si il considère le poisson que vous lui donnez comme récompense.
Wood affirme qu'il a vu un dauphin accomplir toute une journée des tours de cirque, sans accepter aucune nourriture. C'est par amitié pour vous, ou par intérêt pour son travail, que le dauphin fait ses tours.
Ce fût une de ces situations confuses, inexplicables, où un groupe d’hommes, sans savoir ce qui se passe, mais alarmé par cette ignorance même, imagine le pire d’après le comportement d’autres groupes et aussitôt les imite, la folie gagnant ainsi de proche en proche des foules de plus en plus déchainées.
Mais ce qui fait du dauphin un animal idéal pour la recherche, c’est son extraordinaire gentillesse. Cette gentillesse n’est pas faiblesse. Il est capable, d’un seul coup de sa puissante mâchoire, d’assommer un requin de bonne taille en le frappant dans les ouïes. Il possède, en outre, une double rangée de crocs très acérés, quatre-vingt-huit en tout, et il pourrait, s’il le voulait, broyer bras ou jambe à ceux qui le capturent. Mais de mémoire d’homme, il n’a jamais tourné ses armes contre notre espèce. Mieux même, la plupart des bêtes domestiques, quand on leur fait subir une intervention un peu douloureuse, mordent ou griffent. Le dauphin accepte la douleur qu’on lui inflige sans regimber et sans jamais devenir menaçant.
Pauvre Maggy, elle pose le problème affreux, et d’autant plus affreux qu’il n’intéresse personne, celui de la fille laide, et une fille laide, après tout, a autant envie qu’une autre qu’on homme la prenne dans ses bras.