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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le livre de Christine Montalbetti débute par une première phrase enlevée qui nous fait gaiement entrer dans la danse, immédiatement complices de l'auteure. Voilà, nous sommes déjà en plein coeur de ce que nous promet le titre, entre amis unis par le relais qui court d'un personnage à l'autre - à moins que ce ne soit le lieu d'un repos temporaire après les affres d'une route difficile, relais de poste chaleureux qui fait comme un cocon. Il finit en pirouette, sur une image de ricochet, n'ayant eu de cesse de rebondir à sa manière élastique d'un sujet à l'autre.
Si le plaisir d'un bon livre réside dans le pouvoir grisant de nous incarner en toutes choses sous l'impulsion du style, échappant ainsi au frottement des rôles assignés et des identités pesantes, alors Christine Montalbetti a écrit un sacré bon livre, qui nous laisse "légers, guillerets et harmonieux", tel le galet qui a voleté quelques instants sur les dernières lignes de ce texte splendide.
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« Ils marchent le long du lac, et on prend l'air avec eux. C'est plaisant de s'imaginer ces terres vastes, la ligne ondulée des montagnes, cette frange d'arbres aux feuilles à peine bruissantes, ce reflet du ciel dans l'eau, ça ouvre quelque chose dans l'espace réel dans lequel on se trouve, ça crée comme un second espace plus grand, plus ample, et disponible, dans lequel on a tout de même un peu le sentiment de se promener.
Oh, l'espace préservé que c'est, un livre, dans lequel on peut évoluer à notre aise, sans masque ni gel, juste à y barboter gaiement, impunis et libres, tout en nous souvenant de nos heures, de nos joies et de nos peines, de ce qui nous constitue, de ce à quoi on tient, les sensations du monde. »
(pp.88-89)
On ne quitte jamais un livre de Christine Montalbetti que pour en attendre un autre, avec l'espérance toujours d'un bonheur renouvelé, toujours trop éphémère quand on tourne la dernière page. Et ça n'a pas manqué avec le Relais des amis, peut-être parce que ce dernier roman évoque davantage encore que d'autres textes de l'auteure les pouvoirs extraordinaires de la fiction, ce territoire que l'auteure ne cesse d'explorer avec légèreté, tendresse et allégresse, nous invitant à chaque fois, hôtesse généreuse, à partager l'aventure.
le Relais des amis, c'est d'abord le nom d'un bar où Simon, le premier personnage du texte, un romancier en quête d'une phrase inaugurale d'où découleraient, avec une « énergie joyeuse », toutes les autres, où Simon, donc, se réfugie pour trouver l'inspiration, près d'une plage de la côte normande. Un lieu de rencontres, où s'ébauchent déjà, autour du comptoir, des histoires même lorsque ce ne sont que celles, plutôt banales, des habitués (mais, et c'est tout l'art de Christine Montalbetti, avant même et après cette merveille de récit, La vie est faite de ces toutes petites choses (P.O.L,2016), que de magnifier le plus modeste sentiment, geste ou objet du quotidien, par la magie de son écriture), un lieu évidemment, comme son nom l'indique, où se nouent des relations fraternelles, mais assi le point de départ, lorsque finalement on quitte le café pour suivre d'autres protagonistes - Frédo et son apprenti Mathieu, bientôt remplacés par Lorette, l'agente immobilière et son client, puis par Rémi le taxi et ses passagers, le couple Worcester, puis par Lola, leur voisine de wagon, ah Lola !, puis par…, et par…- d'une véritable course de « relais », justement, dont le bâton passera de mains en mains, de personnages à personnages, jusqu'à la fin du texte. Ainsi progresse ici la narration, illustrant les privilèges de la fiction, avec des débuts d'histoires qui s'enchaînent les unes aux autres, qui s'enchâssent les unes dans les autres, comme naturellement, dans un marathon (et la durée de lecture du texte est peut-être, d'ailleurs, proche de la moyenne de celle de cette épreuve mythique… mais on peut lire aussi plus doucement !) plein de vigueur. Avec des passages de relais multiples et divers, parfois occasionnés par des personnages canins de passage, une mouette en mal d'océan, voire un simple papier d'emballage froissé au pied d'une table, quelquefois aussi par une simple association d'idées ou, après avoir laissé faussement le choix de la direction au lecteur, la décision magistrale de l'écrivaine-reine. Et, loin de rester au bord de la route, simples témoins, Christine Montalbetti, comme à son habitude, nous invite, lecteurs, à participer activement à l'odyssée, questionnant avec espièglerie nos connaissances et la qualité de notre regard, et s'installe elle-même constamment dans son texte, pour mieux tirer, l'air de rien, les ficelles des héros de son petit théâtre.
Malice de Christine Montalbetti, adorable malice, oui, ou même charmant culot et belle insolence, d'une écrivaine qui peut, ici, « pauvre bichou », prendre pitié d'un mégot écrasé, là, comparer la forme d'une goutte de pluie écrasée sur la vitre d'un wagon à un spermatozoïde en goguette, ou bien encore, ailleurs, laisser un cocker mélancolique méditer face à un défilé de chaussures… Une Christine Montalbetti qui en profite aussi pour nous emmener au bout du monde, réviser la géographie, de la Normandie de Trouville aux Etats-Unis des « Romans américains », de ces oeuvres antérieures, mais aussi nous ramener vers ses territoires plus intimes, lorsque l'on retrouve, au détour d'une page, le mérou qui apparaissait au début de cette biographie fantasque de [S/Mon] ancêtre Poisson (P.O.L, 2019). Et, non, on ne spoile rien, l'histoire, au bout de ses méandres, ira peut-être jusqu'à une fin paradoxale, happy-end qui serait en même temps le signal d'un début de dépression des lecteurs, sinon de l'auteure elle-même, obligés de quitter tous ces nouveaux amis, de lâcher le bâton de ce relais de fantaisie, pour retourner à la grisaille de la réalité… Mais, haut les coeurs, n'en doutons pas une seconde, la fée Christine ne tardera pas à le ramasser, lui rendant ses vertus de baguette magique ! Yes, Christine, et n'hésitons pas ici à user d'un anglais énergique puisqu'elle est elle-même si souvent polyglotte, don't let us down without your stories, play them again… L'écriture, la lecture, Reine Montalbetti, et cette belle amitié que tu tisses toujours entre toi, tes personnages et tes lecteurs, la vie quoi !
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Embarquez pour un voyage inédit !

Suivez le papillon, il vous invite à faire le tour du monde, d'épaule en épaule, de rencontre en rencontre, d'ami en ami. LE RELAIS DES AMIS est le roman d'une course folle à travers la planète pour dire les gens, attraper leur réel, les suivre un moment dans leur quotidien ou les regarder partir, bifurquer d'une histoire à une autre, attraper les fils tendus par le hasard et toujours avancer, se nourrir des autres, de leur être, si riche, si différent.

L'écriture est légère. Elle prend le pouls de tous ces héros passagers pour se confondre à leurs instants racontés. Par ce très beau texte, CHRISTINE MONTALBETTI nous prend par la main et nous lance dans un tourbillon de vie pour nous faire vivre une expérience de lecture époustouflante.

Magnifique !
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❝Two roads diverged in a yellow wood,
And sorry I could not travel both
[…]
I took the one less traveled by,
And that has made all the difference.❞
The Road Not Taken, Robert Frost

Le Relais des amis est le titre du dernier roman de Christine Montalbetti en plus d'être le principe qui préside à la construction de cette histoire qui va, bondissante et joyeuse, d'un personnage à l'autre, d'un roman à un autre, d'un pays à un autre, sans préméditation aucune, au petit bonheur des hasards.

Simon est le premier à tenir le témoin de ce relais qui se court sur quelque 140 pages. Las ! Notre relayeur n'est pas très en jambes. Écrivain en panne d'écriture, Simon est venu trouver refuge dans un paisible village de Normandie, entre mer et campagne, à un jet de galet du Havre. Avec lui on pousse la porte du Relais des Amis, le café du bourg et là… là… hop ! la course de relais est lancée. On va abandonner Simon pour suivre le temps d'une ou deux pages Frédo et Mathieu avant qu'un autre personnage ne nous fasse bifurquer, qu'on lui emboîte le pas, que l'on visite un appartement vétuste, que l'on monte dans le taxi de Rémi, puis dans le train avec Greg et Eva, un couple d'Anglais que l'on quitte bientôt pour suivre une jeune voyageuse, une mouette, une mouche, une araignée ou, plus déroutant encore, un papier d'emballage de gaufre, un postillon, un mégot, un briquet, une paire de Converse, tous objets qui auraient quitté leur Conférence pour vivre enfin leur vie au grand air, et que l'on abandonne sans tarder ni scrupule, tout à l'allégresse de se laisser happer par l'impromptu d'une nouvelle rencontre et saisir le relais, aussi incongru soit-il, que Christine Montalbetti nous tend. Ainsi s'en va-t-on, primesautiers, au petit bonheur des bifurcations en un mouvement joyeux, léger, d'un personnage à l'autre, d'un livre de l'autrice à un autre, de la France au Portugal, du Japon aux États-Unis, avant de revenir en Normandie pour un dernier passage de relais et franchir, un peu essoufflés, décoiffés mais heureux, la ligne d'arrivée de ce grand tour en compagnie de Simon qui a retrouvé la forme en même temps que l'inspiration.

À grand renfort d'apostrophes et de parenthèses, Christine Montalbetti crée un espace de connivence avec le lecteur qu'elle implique et entraîne à sa suite dès l'incipit, l'arrachant à la solitude de la lecture qui n'a d'égale que celle de l'écriture et dont Simon se désespère :

❝Une phrase, allons, une bonne petite phrase qui vous donne envie d'entrer dans cette histoire.❞

et, partant, n'a de cesse de flouter la frontière entre fiction et métafiction. On multiplie les rencontres — certains personnages de précédents livres viennent faire un caméo ; on aperçoit des possibles que l'on suit, on en devine d'autres que l'on délaisse. Pour y revenir plus tard ? qui sait ? Bien malin qui pourrait le dire.
❝On❞ ? oui, car l'autrice, soucieuse de ne pas nous perdre en route, constamment nous interpelle, nous emporte dans le mouvement d'un clin d'oeil ou d'un claquement de doigts. Et on est ravis d'être ainsi ballottés à la merci de sa fantaisie, d'embarquer tel Balzac sur un mot ou un indice intrépide, d'allonger la foulée vers le prochain relais, avant de découvrir ce qu'elle a à nous raconter le temps que notre coeur se calme et notre souffle s'apaise avant que le tourbillon ne nous emporte à nouveau, car de pause il n'est pas question, bien sûr.

❝Oui, c'est avec eux à présent qu'on embarque, vous commencez à comprendre le principe, à eux que Rémi passe le bâton de relais, d'autant que le train, ça nous ouvre de nouveaux horizons.❞

Un roman comme allégorie de la vie faite de bifurcations, de ❝roads not taken❞, d'histoires qui s'écriront, d'autres qui ne s'écriront pas mais qui toutes viendront titiller notre imagination. Que de et si… et si… sème-t-on en chemin !

❝Le monde est un réseau inextricable de possibles, qui font autour de nous leur sarabande.❞

ou comme l'écrivait Jorge Luis Borges :

❝Nos vies sont des jardins aux sentiers qui bifurquent.❞

Un roman comme éloge à l'art de la fiction, à ses espaces de liberté qui font toute la place à l'inattendu, à la subjectivité, à la fantaisie romanesque, où l'on croise des personnages qui portaient les romans déjà écrits par Christine Montalbetti, le passage de relais débordant alors du cadre du présent roman pour aller tisser des liens avec ceux qui l'ont précédé.

Un roman comme euphorisante contribution à l'art de la bougeotte puisque, ennemi du surplace, jamais il ne nous laisse nous installer dans une histoire pour y prendre nos aises. À peine esquissée nous voilà à lui fausser compagnie pour filer à la poursuite d'un autre personnage, sous d'autres cieux. Qui a déjà lu Christine Montalbetti sait combien elle affectionne prendre un petit rien insignifiant et en exprimer l'essentiel. Ici, de ce petit rien elle fait le point de départ vers un ailleurs avant qu'un autre petit rien ne vienne tout renverser. Et les histoires non écrites, comme les pièces d'un puzzle, ne cessent de se recomposer dans notre imagination.

Vous pensez que le Relais des Amis doit être un peu foutraque, un ❝chaos❞ , alors qu'il n'est que la proposition d'une échappée toute affaire cessante dans le romanesque, d'un moment ❝détendu❞ — tel que le souhaite John Steinbeck en exergue — dans un monde qui a oublié de l'être, détendu. La brièveté du roman — 144 pages — fait que le procédé n'a le temps ni de s'user ni de nous lasser.

Ce dernier opus de Christine Montalbetti est une variation de plusieurs de ses romans précédents. Ce que c'est qu'une existence m'avait séduite par son art tant de la construction que de la mise en scène du processus d'écriture (l'écriture d'un roman en train de s'écrire), et son omniprésente interactivité avec le lecteur. Certes, dans le Relais des Amis nous ne suivons pas plusieurs vies en parallèle puisque nous participons à la course du monde en courant derrière l'une avant de nous mettre à courir derrière l'autre, mais il y a toujours chez l'autrice le pouvoir donné à un détail dérisoire — La vie [n'est-elle] pas faite de ces toutes petites choses, après tout ? — de tout changer et d'offrir plusieurs dénouements car la vie est la profusion même et le lecteur, un insatiable curieux.

Christine Montalbetti continue d'explorer, à sa façon vagabonde, les pouvoirs de la fiction. Et nous convie à un voyage impromptu et délicieux.

❝Ah, les voyages que ça permet, la lecture, ah, l'espace idéal que c'est, un roman, où l'on peut circuler d'un lieu à l'autre, librement.❞

C'est pour cela que la lecture est un plaisir sans cesse renouvelé.
Lien : https://www.calliope-petrich..
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