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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
La mauvaise herbe - Yves Montmartin - Roman - auto-édition La chouette à lunette - lu en février 2021.

Dans son préambule, Yves Montmartin explique qu'une part de son roman est de la fiction, que certains faits et lieux sont réels et d'autres, le fruit de son imagination.

Si Yves Montmartin est très heureux de partager les 242 pages de son roman avec nous, j'ajoute que je suis ravie et lui suis reconnaissante de me l'avoir envoyé.

Il est dédié "à toutes les fillettes, à toutes les jeunes filles, à toutes les femmes victimes de violences verbales, psychologiques, physiques ou sexuelles"

Cette dédicace annonce déjà de quoi parle ce roman, un sujet qui me parle.

Il est découpé en quatre parties qui représentent les quatre saisons, en commençant par le printemps.

J'ai partagé au fil de ces quatre saisons la vie d'Amira, prénom qui signifie
princesse, d'abord petite fille joyeuse, délurée, pleine de vie, âgée de 5 ans
découvrant l'école, les livres, l'amitié inconditionnelle de Loubna sa petite voisine. Une enfance heureuse auprès de sa famille dans l'Algérie d'après l'indépendance. C'est le printemps, la saison de toutes les éclosions.

Amira grandit, devient une jeune fille bien déterminée à faire des études, elle veut devenir professeure de français. Son amie Loubna, elle voudrait bien faire les Beaux-Arts, mais se marie (elle n'a que 17 ans) amoureuse de Driss (qui veut dire celui qui a la connaissance), avant d'avoir entamé ce parcours, , croyant qu'elle pourrait le reprendre une fois à Lyon avec son mari. Mais les choses ne tournent pas comme elles devraient. Amira continue à étudier, avec acharnement pour obtenir son Bac et avoir accès à l'Université. C'est l'été de tous les possibles, mais aussi des événements terribles, le sentiment d'insécurité s'installe, des attentats terroristes ont lieu, des manifestations populaires, des émeutes.
C'est l'été du retour au pays pour les vacances des émigrés donnant lieu à de grands rassemblements familiaux.

Amira entre à la Faculté de Lettres et de Langues, entre ses cours et ses travaux, elle continue à correspondre avec Loubna si loin d'elle. Elles se racontent leur quotidien. Amira au fil du temps sent bien que Loubna n'est pas heureuse. Amira ne songe pas aux garçons, elle veut à tout prix réaliser son rêve d'être professeure et n'a pas de temps à perdre en fêtes et autres amusements d'étudiants, elle passe son temps libre à la bibliothèque.
Un jour, la nouvelle tombe, elle ne reverra plus jamais son amie Loubna.
Amira obtient son diplôme et va avoir son premier poste d'enseignante, elle est émue et stressée. Avec son premier salaire, elle s'offre un ordinateur indispensable pour son travail, elle est amenée à faire des recherches et tombe par hasard sur le site Scriberio, ressemblant comme deux gouttes d'eau à Babelio ! Et hop, elle s'inscrit et communique avec un pseudo ses lectures, échange avec Sofia (Catlechat), elles deviennent amies. Sofia est portugaise. Amira a 26 ans, un emploi, elle peut penser à son avenir. C'est l'automne, les jours qui raccourcissent, la saison de l'introspection.

Driss est veuf depuis quelques années et désire se remarier, il fait sa demande aux parents d'Amira, le père d'Amira lui dit que si cela ne lui convient pas, elle peut refuser. Mais Amira accepte contre toute attente, elle a envie d'un enfant, elle se projette. Driss lui promet que dès que l'homologation de son diplôme sera en ordre elle pourra reprendre son métier d'enseignante, elle le croit et le mariage a lieu. Amira et Driss partent pour Lyon. Un petit garçon naît de leur union. Une toile d'araignée se tisse petit à petit autour d'Amira, sa belle-famille n'est pas aimable, mais Amira n'en a cure, elle a son petit garçon Walid qui veut dire le fils, mais Amira aurait voulu que ce soit Mourad, qui signifie Désiré. Mais Driss en allant le déclarer a décidé que ce serait Walid. L'araignée attend sa proie, elle va mordre, très fort. C'est l'hiver, la saison grise, la saison du désespoir, la saison de la peur et la saison de la fin.

Yves Montmartin, tout au long de ce récit, s'attache à nous parler des coutumes musulmanes, des rituels, des fêtes, des événements qui ont eu lieu en Algérie au travers de la vie de tous les jours dans des familles algériennes, Il nous fait découvrir un monde que nous connaissons si peu, si mal, avec ses bons et ses mauvais côtés, ses joies, ses idéaux mais aussi cette main-mise des hommes sur les femmes, de leur pouvoir et de leur "supériorité" , de leur violence quand elles se révoltent
Un roman qui nous rappelle qu'on ne peut pas accepter cette violence envers les femmes, quelles qu'en soient les raisons.

Chaque mot arabe est traduit en bas de page.

Une belle découverte avec ce roman d'Yves Montmartin, il en a écrit d'autres :
Le livre qui vole (2018)
Les escargots ne bavent pas tous de la même façon (2019)
Sept jours au Mazet-St-Voy (2020)
Les petites histoires du jardin (2019-2020)
Quatorze albums illustrés destinés à l'apprentissage de la lecture et aux enfants dyslexiques.

Bonnes lectures, prenez soin de vous.




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La mauvaise herbe, roman d'Yves Montmartin, est dédié à toutes les fillettes, à toutes les jeunes filles, à toutes les femmes victimes de violences verbales, psychologiques, physiques ou sexuelles.

La mauvaise herbe, qui sera déracinée, n'est autre qu'Amira, la narratrice. Elle illumine ce récit tragique grâce à son énergie, ses rêves, ses ambitions. Elle est cette petite fille algérienne de la couverture du livre. Cette petite fille deviendra une jeune femme qui réalisera ses projets professionnels : devenir professeure de français, de littérature française. Elle se révéléra une enseignante douée et passionnée par son métier:

« Plus les semaines défilent, plus je suis confortée dans mon choix d'enseigner. Il se passe plein de belles choses dans une classe, c'est un lieu de vie. Nous partageons des moments heureux, tristes, mélancoliques, parfois tragiques. Avec mes élèves, nous nous sommes apprivoisées peu à peu. Elles m'ont testée au début, alors j'ai imposé une certaine discipline, mais je ne souhaitais pas que mes cours soient uniquement descendants, ils devaient être un échange permanent. Il leur a fallu plusieurs semaines pour comprendre que nous pouvions nous enrichir mutuellement. Je ne suis pas celle qui a le savoir absolu, je me sens plus comme une guide, mes méthodes ont pu les surprendre au début, mais maintenant je sais que cette année sera passionnante. »

Amira est courageuse, déterminée à être et rester libre, indépendante, malgré les diverses pressions qu'elle subit. Sa détermination et son courage suffiront-ils ?

La mauvaise herbe offre une peinture réaliste de l'Algérie contemporaine, entre soif de liberté et carcan des traditions ; entre fierté de vivre dans un beau pays, dont l'indépendance a été conquise de haute lutte, et nécessité d'émigrer pour des raisons économiques, d'aller travailler en France, vivre dans des immeubles et connaître le déracinement.

Yves Montmartin m'a fait découvrir les us et coutumes de l'Algérie, la place et la pratique de l'Islam qui organise la vie sous ses différents aspects : naissance, mariage, décès.

De beaux portraits de femmes émaillent ce récit : Amira, bien sûr, mais aussi Loubna, sa meilleure amie ; Hadjila, sa maman ; Nour, sa tante, qui s'est débrouillée pour ne pas avoir à se marier et ne pas être sous la tutelle de son mari, de sa belle-famille, quitte à provoquer le mécontentement de ses parents et renoncer à avoir des enfants. Il y a aussi Hassiba, la maman de Loubna.

Les hommes ne sont pas vus à travers un regard manichéen mais nuancé et subtil car Amira déplore aussi bien l'attitude des hommes que des femmes : elle aimerait qu'un jour les futures mères se réjouissent d'avoir une fille comme premier-né, au lieu d'espérer, comme leur mari, que ce soit un garçon. le papa d'Amira est heureux d'avoir une princesse parce qu'elle est venue après ses deux fils.

La mauvaise herbe est un récit qui interpelle. Il est parfois très difficile de lutter contre le poids des traditions, de la coutume, des pressions psychologiques qui s'exercent sur un individu courageux mais isolé dans sa volonté de changement et soumis à des dilemmes cornéliens : refuser de se marier, c'est aussi refuser d'avoir un jour un enfant. Au fil de ma lecture, je me suis rendu compte que les mères, les belles-mères et les soeurs sont parfois autant que les maris, les pères et les frères responsables de la reproduction d'un système qui les a asservies et continue de les asservir.

La fin tragique de ce roman au sujet contemporain et très bien documenté m'a beaucoup touchée et est de nature à éveiller les consciences sur les violences faites aux femmes. Un roman engagé, nécessaire et fort émouvant. Qu'il soit écrit par un homme est très important car ce n'est pas que le combat des femmes ou du féminisme mais de tout un chacun contre la violence et l'oppression, la manipulation psychologique.
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Amira grandit heureuse à Alger, y fait des études et y acquiert une indépendance professionnelle. Lorsqu'elle accepte de se marier, elle est loin d'imaginer combien sa vie va très vite lui échapper, sous le poids des traditions et de la religion.


Cruel destin que celui d'Amira, qui aura vu toutes les portes ouvertes devant elle, par son éducation et par ses proches, se fermer hermétiquement l'une derrière l'autre pour l'enfermer dans la prison d'un mariage avec une famille traditionaliste. Car en même temps qu'à un époux, Amira se lie à une belle-famille et au cadre édicté par celle-ci. Les plus terribles gardiennes des règles de soumission féminine s'avèreront les autres femmes du clan - belle-mère et belle-soeur -, acharnées à réduire à leur merci cette nouvelle venue aux velléités d'indépendance d'autant plus insupportables qu'elles-mêmes n'ont jamais pu y prétendre un instant.


S'ils auraient gagné à être mieux intégrés dans la trame romanesque plutôt que simplement exposés, de nombreux passages du récit sont explicites et instructifs sur le système éducatif algérien, sur les traditions du mariage, sur la structure familiale ou encore sur les rites des obsèques… Toutes ces informations soigneusement rassemblées font de cette lecture une immersion aussi dépaysante qu'intéressante dans la culture algérienne, et met en perspective la tragique et émouvante trajectoire d'Amira.


Ainsi se mêlent curiosité et émotions au fur et à mesure que se déroulent les fils de cette histoire, dans une croissante tension dramatique à l'issue en forme coup de poing. Impossible de ne pas s'attacher à Amira et à ses proches, alors que chacun de ces personnages prend vie avec un réalisme empreint de tendresse. Tout est crédible dans cette narration, qui amène peu à peu à comprendre comment, de nos jours, les femmes peuvent se retrouver les éternelles victimes de traditions, notamment religieuses, ceci malgré les avancées générales de la société. Une lecture aussi bouleversante qu'édifiante.


Merci à Yves Montmartin de m'avoir offert son livre.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Un immense merci à Yves Montmartin de m'avoir envoyé un exemplaire de son roman, si gentiment dédicacé...

Amira est née le premier jour du printemps, un signe de force, de vigueur et de longue vie... Après avoir eu deux garçons, Salim, son père, est heureux d'accueillir une princesse, aussi le prénom d'Amira s'est-il présenté comme une évidence. Enfant choyée, aimée par des parents attentifs et dévoués, elle n'en reste pas moins, dès son plus jeune âge, volontaire et éprise de liberté. D'ailleurs, quand elle sera plus grande, elle veut vivre comme sa tante préférée, Nour. Une jeune femme qui ne s'est jamais mariée, préférant poursuivre ses études, trouver un emploi et être indépendante financièrement. Alors, du haut de ses 5 ans, Amira, admirative, sait déjà qu'elle veut lui ressembler. Mais échappe-t-on vraiment au poids des traditions...

Quel plaisir de suivre le destin d'Amira... d'espérer, de frémir, de vibrer, d'aimer, de croire, à ses côtés... En quatre saisons, du printemps à l'hiver, Yves Montmartin dessine, peu à peu, la vie d'Amira, de l'enfant intrépide et pleine d'espoir à la jeune femme déracinée. Son enfance ensoleillée entourée de ses parents, la vie de son quartier, ses premiers pas à l'école, ses amitiés et ses amours, ses rêves mais aussi ses désillusions et ses chagrins. de par ses descriptions, aussi bien photographiques, culturelles ou religieuses, l'auteur nous immerge pleinement et avec beaucoup d'empathie au coeur de l'Algérie. L'on ressent toute la tendresse portée aussi bien aux lieux qu'aux personnages, certains étant tirés de fait réels. Un roman à la fois lumineux et tragique, empreint d'émotions et de passions, et ce jusqu'au tout dernier paragraphe, poignant, où le « je » disparaît pour devenir « elle ». Un « elle » anonyme, un « elle » universel pour ne pas oublier qu'Amira n'est pas la seule femme dans ce monde à subir cette situation...
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Merci à M. Montmartin, l'auteur de la mauvaise herbe, de m'avoir fait confiance, de m'avoir envoyé son écrit, et de me laisser dire ce que j'en pense...
Cette histoire est une jolie douceur à déguster. A travers Amira, on découvre l'Algérie et la vie qu'elle y mène, au sein de sa famille et amis. C'est doux, c'est tendre, c'est nostalgique. On y découvre aussi la liberté de vivre... Et puis le dernier quart du livre est une claque violente... Je n'en dévoilerai pas plus, pour ne pas spoiler l'histoire....
Souvent les romans commencent mal et finissent bien, ici, comme diraient les Rita Mitsouko, "les histoires d'amour finissent mal... en général", l'espoir et l'avenir n'est pas toujours comme on l'entend et comme on l'espère.
Bravo M. Montmartin pour ce roman tout en sentiments. J'ai beaucoup apprécié cette lecture, même si la fin n'est pas comme j'aurai voulu qu'elle soit...
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Voici l'histoire d'Amira, c'est elle La mauvaise herbe...
Yves Montmartin a eu la gentillesse de m'inviter à lire son dernier roman et je l'en remercie chaleureusement. Il n'y a sans doute pas de hasard dans cette rencontre, car cela fait écho à d'autres récits récents qui m'ont emporté dans la même émotion et la même révolte...
Le récit démarre presque comme un conte de fées, dans la fraîcheur d'un jardin potager où la candeur d'une petite fille de cinq ans, Amira, nous donne rendez-vous aux premières pages de ce récit. C'est une enfance délurée sous le soleil de l'Algérie. Amira la narratrice, pleine de vie, nous invite dans ce voyage qui traverse les saisons et les années. D'ailleurs, ce sont bien quatre saisons qui forment l'ossature de ce texte, quatre saisons cueillies dans l'existence d'Amira comme des poignées d'herbes folles.
Nous passons de l'insouciance des premières pages, à l'éveil, le désir d'une vie portée vers l'amour des livres, l'amitié, la joie simple et pure de vivre et d'aimer cette vie éprise de liberté et d'indépendance... Choisir son existence, gouverner son destin, telle est l'itinéraire que se donne Amira, choisir celui qu'elle aimera et qui l'aimera, celle qui rêvait adolescente de décrocher le prix Goncourt, mais qui malgré tout deviendra professeure de français...
Pourtant...

« Mademoiselle Hachouri, je vous souhaite la bienvenue dans mon établissement. Vous allez enseigner la littérature française, belle matière ! Cependant, je vous demanderai de respecter à la lettre le programme édicté par le ministère. La richesse des auteurs francophones est immense, mais certains ne conviennent pas à l'éducation des jeunes filles telle que nous la concevons dans le respect du Coran. Je pense que vous m'avez bien compris. »

Être femme là-bas et vouloir être maîtresse de son destin, comme sa tante Nour, c'est un peu ressembler à de la mauvaise herbe... Oui une mauvaise herbe, comme celles que son père lui apprenait à déraciner dans le jardin de son enfance pour laisser place aux légumes qui avaient seuls droit de cité parmi le potager. Être femme là-bas, puis plus tard de l'autre côté de la Méditerranée...
Mais dans la religion d'Amira, refuser de se marier, comme pour d'autres femmes éprises d'indépendance, c'est aussi consentir à ne jamais avoir d'enfant...

« La vocation des femmes est le mariage, la procréation et la satisfaction des désirs des hommes.
Tel est l'enseignement du Coran. Voilà ce que Nour a refusé de vivre en rejetant toutes les propositions de mariage. Rester libre, ne pas être soumise. Tant pis si on la nomme Bayra, la périmée. »

Car là-bas ou ailleurs, c'est presque pareil pour certains itinéraires de femmes... Comment faire la part des choses entre le poids des traditions, du patriarcat d'un autre âge, des religions faites par des hommes, pour des hommes, dominées par ceux-ci à tous les endroits de la vie, depuis la sphère familiale dans sa dimension la plus étendue jusqu'à l'intime des draps, des étreintes forcées et de la violence... Comment faire la part des choses ?
Cela pourrait ressembler à un conte d'un autre temps, l'obscurantisme qui est décrit ici ne nous ferait-il pas penser aux temps les plus reculés, au Moyen-Âge, à supposer que notre représentation médiévale, sans doute erronée, soit celle d'une époque obscure et barbare... ? Mais non, ce récit nous fait vaciller dans l'horrible réalité contemporaine, Amira est née en 1994...
Parfois nous devinons des existences bridées, brisées, derrière ces silhouettes dociles et soumises que nous croisons dans la rue ou au supermarché, marchant dans les pas de leurs époux... des femmes emmurées qui n'ont d'autres choix que de consentir à cette réclusion à perpétuité...
Parfois, je rêve que l'une d'elle fasse un pas de côté, sorte du rang, arrache son niqab, offre un visage ruisselant de gourmandise, dégaine de sa burqa le Journal d'Anaïs Nin et le tende comme une bravade à la face offusquée de son geôlier... Anaïs Nin, j'exagère un peu forcément, ne serait-ce que le Petit Prince, ce serait déjà une transgression...

« Je t'interdis de retourner à la bibliothèque, a-t-il hurlé, si tu tiens à lire, tu as le Coran. »

Ici j'entends encore venir derrière les pages du récit les voix de Nour, Hadjila, Loubna, Amira... Comment faire la part des choses lorsque les femmes elles-mêmes, les mères, les belles-mères, les soeurs et belles-soeurs sont complices de cette barbarie et reproduisent à leur tour l'univers qui les a broyées...? Comment appeler à une sorte de sororité qui serait plus forte que cette barbarie animale ?
Comment passer de l'innocence d'un conte de fées à l'effroi d'une vie glaciale comme un fait divers ?
Comment passer des jours gorgés de soleils et de désirs, à l'enfermement... jusqu'à perdre l'âme, jusqu'à perdre la vie, la vraie vie... ?
Pourquoi ?
Je ne comprends pas, je suis perdu dans mes questions qui ne trouvent pas pour l'heure de réponses.
Ce récit est un cri viscéral, celui d'une femme, celui de plusieurs femmes, celui des femmes opprimées par des lois grégaires, obscènes et absurdes, hélas plus fortes que la raison, la liberté, plus forte que la vie, bafouant les fondamentaux mêmes de notre République, tuant parfois aussi hélas...
J'ai été emporté par le récit prenant, le rythme soutenu de l'écriture d'Yves Montmartin, sa manière nuancée de nous dépeindre avec justesse les personnages convoqués tour à tour dans ce texte...
Je voudrais que ces pages ne soient pas vaines, comment les transformer en clés pour ouvrir ces portes cadenassées, délivrer les coeurs et les corps emprisonnés de voiles, de certitudes et de barbarie. Chaque mot doit être un pas vers la lumière. Les livres sont faits pour cela aussi...
Définition du dictionnaire pour la mauvaise herbe :
1. Toute plante non cultivée qui concurrence les plantes cultivées.
2. Personne qui suit une mauvaise pente ou qui a mal tourné.

« Une mauvaise herbe est une herbe qui sort du rang. »
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La mauvaise herbe c'est la vie d'une petite fille née en Algérie auprès de parents aimants. Puis, de cette enfant qui devient une adolescente et enfin une femme. Bien sûr, nous parlerons de coutumes et de religion, de celles qui perdurent dans le temps et qui sont astreignantes pour les femmes en particulier, voire, destructrices de rêves et de projection dans l'avenir. Ici, l'auteur retrace l'enfance de Amira avec beaucoup de justesse et nous sentons bien les étapes de construction de sa personnalité avec ses désirs et son émotionnel de fillette ; puis cette amitié grandissante envers Loubna, deux écolières dont l'une est attirée par les beaux-arts et l'autre par le métier d'enseignante. L'amie qui va se perdre dans sa vie, jusqu'à disparaître complètement. Et Amira, qui après une courte réalisation en tant que femme active, va reproduire elle aussi son propre schéma de destruction ; celui dont on peut penser qu'il fut le même pour son amie qui a connu la désillusion. Hadjila, la mère de Amira quand elle se marie, elle aussi, est assez ignorante de ce qui l'attend mais pas moins que partout ailleurs, dans les années 60, 70 où la sexualité ne s'évoquait guère en famille et quand la nuit de noce avait cela de traumatisant qu'elle était vécue de façon plutôt brutale. Situation aggravée du fait de l'union de deux ados complètement étrangers l'un à l'autre et qui s'unissent somme toute de façon purement mécanique. Il se trouve là que Driss qui devient l'époux de Amira est violent. Mais est-ce bien sous couvert de la seule religion que des êtres s'arrogent un droit total sur autrui, quand je penche plutôt moi pour un désordre pathologique proche du dérèglement mental. Car, comment peut-on s'accorder une toute puissance sur une femme, sur un enfant sans qu'il en soit autrement. Empêcher une femme de voir, de communiquer avec ses parents, casser son téléphone, son ordinateur portable, la priver de tout moyen de communication, de toute relation avec l'extérieur et pour finir lui confisquer jusqu'à son enfant ; il y a là une attitude de lâcheté assassine, tant du mari que des mères grand-mères et autres personnages de l'environnement dudit époux ; lesquelles femmes semblent, elles, se venger sur la jeune fille de leur propre castration et s'accaparer ainsi la puissance des mâles, fils, frères, époux. Je ne comprends pas ni n'admets qu'il soit explicable par le seul fait d'une religion que de tels agissements soient perpétrés mais plutôt que ce type de persécution soit l'oeuvre de déséquilibrés agissant en groupe, voire en masse, au même titre que les soi-disant exécutants nazis en tant de guerre. Par ailleurs, il est très bien relaté en première partie de l'ouvrage comment l'univers familial de Amira est serein et protecteur, ainsi que les coutumes observées dont l'Aïd el Kebir et le sacrifice du mouton pour le don envers les pauvres et le droit à l'hospitalité etc. ce qui est conforme à mon sens à ce qui devrait être et rester un concept d'ordre religieux. Tout cela sous couvert du ressentiment envers ceux qui sont restés au Bled et les émigrés dont Driss qui voudrait se racheter peut-être par une dévotion usurpée…
Cependant que, il y a aussi de la douceur dans ce livre ou l'enfance et l'amitié sont exaltées. Merci Yves Montmartin de m'avoir permis de vous découvrir comme auteur.
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L'hiver est une saison triste. Je referme ce livre avec beaucoup de peine. J'aurais tant aimé qu'Amira devienne une plante solide, porteuse des fruits de l'espoir pour qu'enfin sa voix soit entendue, reconnue, comme toutes ces voix féminines si douloureusement muettes.
Le poids des traditions est un carcan. J'ai eu l'impression d'assister à un châtiment, celui de la « vierge en fer », instrument de torture ayant la forme d'un sarcophage hérissé à l'intérieur d'aiguillons. Et le prisonnier enfermé, est transpercé lentement au fur et à mesure que se resserre le sarcophage. Quelle vision !

Mais, il faut que je tempère mes propos ! Car si l'auteur décrit ici l'intégrisme religieux, il décrit aussi le respect de la religion musulmane quand celle-ci est appliquée selon les principes du Coran et non selon ceux des hommes. Et c'est bien là tout le talent de l'auteur pour ne pas tomber dans l'obscurantisme pur et dur et faire la part des choses. Quand l'amour et le respect sont présents, l'avenir peut se construire sans mur.

Voilà un roman habilement construit dans lequel on apprend les us et coutumes du peuple algérien, et en particulier ceux dédiés aux femmes. C'est un roman riche de découvertes et d'enseignements. Et si on suit avec intérêt les pages d'histoire du pays, on suit avec plaisir celles relatant le parcours d'Amira, petite fille née à Alger, adolescente puis jeune femme, au tempérament bien trempé, déchirée entre l'envie d'exercer son métier (professeure de français) et celle de fonder une famille.

Un roman bien dans l'air du temps, mettant à l'honneur les femmes et leur difficile combat pour leur juste émancipation.
Une écriture simple et précise, parfois un peu trop lisse dans le déroulé des événements, et des clins d'oeil pleins d'humour rendent cependant la lecture addictive.
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Très chère Amira,

J'ai d'abord observé ta photo, ton sourire-grimace si drôle, ta tresse espiègle et ton air déterminé. Tu as quoi? Une douzaine d'années ?

Puis, j'ai commencé ton journal des saisons. le printemps et l'été évoquent le bonheur de ton enfance algérienne , dans les années 1990, aidant Salim, ton père, dans son jardin précieux ou écoutant les conversations de ta mère, Hadjila, avec ta tante si indépendante, Nour, que tu admires.

Tu déroules pour nous tout un monde fourmillant de vie, celle du quartier où tu habites, rythmé par les fêtes religieuses et les événements marquants. Tu y rencontreras ton amie Loubna, ta presque soeur. Tu montres déjà une belle résistance aux règles imposées, on te dit rebelle. Tu approuves.

L'automne arrive, et la mélancolie s'installe, celle surtout du départ de Loubna pour la France. Tu poursuis tes études courageusement. Te voilà professeur de français!

Et vient le terrible hiver, dont je ne préfère pas parler. Au lecteur de le découvrir... Un hiver dans ta prison lyonnaise qui m'a glacée.

Tu peux faire tiens les mots de Khaled Hosseini: " Les mauvaises herbes du désert perdurent, mais la fleur du printemps s'épanouit et se fane". Car tu perdureras, Amira, dans nos souvenirs, grâce à Yves, qui ̀a si bien su restituer ton parcours. Cela lui tenait a coeur, on le sent à chaque page. Merci à lui. Et merci aussi pour cette chaleureuse dédicace, qui m'a fait très plaisir. Un roman-témoignage nécessaire et poignant.
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J'ai lu La mauvaise herbe d'une traite, en apnée. Immergée complètement dans un autre lieu : l'Algérie, dans un autre temps, il y a quelques décennies. le soleil, le bruit de la rue, les enfants qui jouent, la rumeur du marché, l'appel à la prière, la vie de famille, la communauté un dépaysement total. Et au milieu de tout cela un rayon de soleil : Amira. Une jeune fille pleine de vie, d'amour, pour sa famille, ses voisins, ses amis, son pays. Pleine de rêves aussi, des rêves d'indépendance, des rêves de bonheur, accessibles a priori, du moins pour la française que je suis. Des rêves très ambitieux pour cette jeune femme, car même si les choses changent elles changent lentement. Parce qu'être une femme là-bas c'est aussi porter le poids des traditions dans un monde où le patriarcat règne.

Tout en finesse, sans juger, Yves MONTMARTIN dresse le portrait d'un pays et d'une culture pour lesquels on sent un grand respect et un grand attachement. A travers ses personnages on ressent toute la tendresse de l'auteur pour cet univers qu'il ne veut pas clouer au pilori juste mettre en avant les souffrances de certaines.
Nour, la tata rebelle qui n'a jamais souhaité se marier est un très beau portrait de femme forte et fragile. Salim, le père d'Amira, a beau être un homme il est lui aussi victime du poids des traditions contraint d'être employé de bureau lui qui ne rêve que de botanique et de son jardin. C'est un coeur tendre mais pas assez fort pour s'opposer aux traditions. Tout le monde n'en est pas capable. Il y a aussi Loubna, jeune fille douce et sage et soeur de coeur d'Amira dont les espoirs n'en sont pas moins ambitieux : elle rêve de beaux arts. Et tous les autres … de beaux personnages. Derrière tout cela il y a un cri du coeur, un désir profond de l'auteur de dynamiter ce carcan de traditions, de règles désuètes et injustes, de coutumes qui brisent les jeunes filles et leur enlèvent leurs rêves et les contraignent à une vie trop étroite ou elles étouffent peu à peu. Des jeunes femmes déracinées, loin des êtres aimés. Un plaidoyer pour le droit à choisir sa vie et à poursuivre ses rêves.

Merci beaucoup à Yves MONTMARTIN pour l'envoie de son livre qui m'a séduite au-delà de ce que j'avais imaginé. La sincérité et l'humanité de ce monsieur donnent à sa plume une profondeur et une légèreté que je ne peux que vous inviter à découvrir.
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