Après la démobilisation, les statistiques firent état d'une brusque élévation du taux de meurtres commis par des hommes sans antécédents judiciaires. Un criminologue contemporain [Moritz Liepmann] a attribué ce fait à la facilité avec laquelle on tuait pendant la guerre et à la situation sociale et économique désespérée. [...] Les lois pénalisant le meurtre furent affaiblies et ce, y compris par la République qui décida d'exempter les actes de violence considérés comme patriotiques. [...] Personne ne s'offusqua de l'affaiblissement des barrières légales contre le crime. Ainsi, immédiatement après la guerre, la Cour Suprême allemande (La Reichgericht) décréta l'existence de ces cas "supra-légaux", exemptant ainsi certains meurtres du poids de la loi. Elle donna en exemple les assassinats commis par les francs-tireurs dans leur lutte contre les Polonais en Haute-Silésie. Plus tard la cour fit marche arrière mais un précédent avait été instauré.
[...] Ainsi, la République elle-même avait ouvert la voie à l'amnistie proclamée en 1933, immédiatement après la prise du pouvoir par le parti national-socialiste, laquelle graciait tous les nazis qui avaient transgressé la loi d'une manière ou d'une autre pendant leur lutte pour le pouvoir.
Les après-guerre / La brutalisation du champ politique allemand
Le massacre arménien, qui coûta la vie à presque un million de personnes, eut lieu pendant la guerre, sous prétexte de chasser - on ne parla évidemment pas d'extermination - l'ennemi intérieur. Il fut aussi très vite oublié, sauf par les arméniens eux-mêmes ; Adolf Hitler n'avait pas tort de déclarer en 1939 (en pensant à ses propres projets criminels) : "Qui, après tout, parle de l'anéantissement des arméniens?".
Nous reviendrons plus tard sur l'attitude face aux ennemis politiques, ou prétendus tels, mais il y a un lien évident entre la confrontation à la mort de masse de la Grande Guerre et le peu de prix accordé, ensuite, à la vie individuelle.
Les après-guerre / La brutalisation du champ politique allemand
George L. MOSSE : l'image de l'homme
Olivier BARROT présente le livre de
George L. MOSSE : "L'image de l'homme", qui
analyse la conception traditionnelle de la virilité (l'homme ne doit pas se plaindre, il doit allier courage et sang-froid, etc); l'auteur retrace l'origine et l'évolution de cette conception pour en montrer la relativité et les dangers.