Levius est, tome 10

Avec sa saga Levius, Haruhisa Nakata nous a vraiment régalé d'un titre solide dans un univers futuriste glaçant où la boxe et les boxeurs étaient devenus les tristes remplaçants de ces guerres que ce font les Etats. Dans un ultime volume à l'écriture quasi parfaite, elle nous offre un final émouvant et déchirant, qui rappelle sans cesse combien la bêtise des êtres humains peut aller loin, mais qu'il existe heureusement des hommes et des femmes pour se dresser contre. 

A la fin du tome précédent, je me demandais comment l'autrice allait pouvoir tout boucler tant il me restait de questions sur cet univers et ses personnages. J'avais tort d'avoir des doutes car elle a totalement répondu à mes attentes. Dans un dernier tome fort copieux et dense à lire, elle revient en profondeur sur les origines de ce monde, celles de la boxe mécanique, mais aussi celles de personnages clés comme Daniel, Oliver, Arthur ou encore le Clown. C'était parfait. J'ai eu toutes mes réponses et même plus.

Avec une narration où les révélations s'entrecoupent des combats violents et tendus, je ne me suis pas ennuyée un instant. J'ai même dû m'accrocher un peu parfois pour bien saisir le fonctionnement de cette eau des étoiles et de ce coeur au centre de tout. J'ai aussi dû être bien attentive pour suivre les différents fronts et les différentes époques invoquées. Mais l'ensemble fut passionnant !

J'ai adoré découvrir quel était cet univers dans lequel nos héros vivaient et pourquoi il était à la fois si similaire et différent du nôtre. Même succincte, j'en ai aimé l'explication et les évolutions qui résultent de cette passe d'armes dantesque et essentielle. C'était fascinant et déchirant de voir ce que l'autrice décrit de l'âme humaine avec ce dévoiement d'un sport adoré pour le transformer en objet et outil de guerre, pour satisfaire les ambitions de certains. C'était déchirant également de voir comment de beaux idéaux pouvaient se transformer en horreur au fil du temps et des mauvais choix sans que les acteurs principaux s'en rendent forcément compte tellement ils sont plongés dans leur projet et l'horreur que le monde occasionne. Ainsi le récit de vie d'Arthur, de Chris et du Clown m'ont mis un bel uppercut !

Harukisa Nakata a ainsi eu du nez avec cet univers de SF diablement bien pensé et sombre, qui travaille en profondeur les thématiques de la guerre et des soldats, de la technologie et de la mécanisation des êtres humains, mais aussi de la religion et de la politique. Mais la beauté de ce titre, c'est qu'elle ne s'est pas arrêtée là. Elle a aussi écrit des personnages émouvants au parcours de vie qui nous prennent à la gorge. Ainsi cet ultime duel entre Levius et Arthur est aussi l'occasion de nous émouvoir avec d'ultimes échanges ravageurs qui impliquent pas seulement les deux hommes mais également tout leur entourage. Preuve qu'un combat n'est jamais l'affaire de deux personnes seulement peu importe sa dimension.

Graphiquement l'autrice aura maintenant un haut degré de qualité jusqu'à la fin, rendant même son trait et son découpage de plus en plus lisible au fil des pages, alors que parfois l'action l'emportait là-dessus et rendait le dessin difficilement compréhensible. Ici, c'est une maestria de vapeur, de souffle et de vitesse. Mais j'ai aussi beaucoup aimé le côté très organique de cette oeuvre qui me mélange à merveille avec les câbles des technologies employées. C'est un très beau mélange de steampunk et de cyberpunk.

Après 13 tomes (3 dans la première série et 10 ici), Haruhisa Nakata nous aura offert une fin puissante, répondant à toutes les questions que l'on pouvait se poser sur l'univers et ses personnages et s'achevant sur un ultime chapitre plein d'émotion où l'on voit combien le combat de Levius a marqué son temps. C'était un très beau récit dystopique où la dénonciation de la guerre et de ses méfaits a été puissamment ressenti, surtout dans cet ultime opus. J'espère revoir dans quelques années un récit de SF qui me fera autant vibrer en mangas car ils sont peu nombreux en dehors d'Akira, Eden et Gunnm.
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