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Citations sur Le maître des âmes (Les Échelles du Levant) (24)

Je viens de si loin, je monte de si bas. C'est une halte que vous m'offrez aujourd'hui. Je suis né en Crimée, dit-il tout à coup, après un moment de silence: il était poursuivi par le désir de ressusciter devant elle un passé haï, un passé honteux; il lui semblait qu'en l'entendant seulement elle le délivrerait. Pourquoi là et non ailleurs ? Je ne sais pas. Je suis d'une race levantine, obscure, d'un mélange de sang grec et italien, ce que vous appelez un métèque. Vous ne connaissez pas ces familles de vagabonds qui essaiment partout et sont jetés sur des chemins si différents que, dans la même génération , mais en des lieux divers, certains d'entre eux vendent des tapis et des noix au miel sur les plages d'Europe, et les autres, à Londres, à New York, sont riches, instruits, et ils ne se connaissent même pas.
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Evidemment, ils tiennent à la vie ; elle leur est douce. Et, pour la plupart, leur vie tient bien à eux. Ils mourront tard. Mais si leurs corps sont solides, machines précieuses, huilées, polies chaque jour, leurs âmes sont malades.
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Depuis si longtemps, Clara n'était plus jalouse. Elle était vieille et fatiguée. Quimportait le corps? On souffre par lui lorsqu'on peut encore jouir par lui. Elle savait bien que, malgré les infidelités, elle avait eu de Dario ce que personne d'autre ne connaltrait : sa plus pure tendresse, et ceci, main- tenant qu'elle n'était plus une femme, lui suffisait.
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En voyant Dario, elle demanda :
- C'est bien ici qu'habite un médecin ?
- Oui, c'est moi.
- Pouvez-vous venir tout de suite, docteur ? C'est pour mon patron. C'est très urgent.
- Certes, je vous suis, dit Dario, le cœur plein d'espoir.
Ils firent quelques pas le long de la rue déserte. En marchant, Dario arrangea sa cravate, passa la main dans ses cheveux épais, toucha avec malaise sa joue mal rasée.
Mais la femme s'arrêta brusquement ; elle hésita, s'approcha de Dario et le regarda avec attention.
- Vous êtes bien le docteur Levaillant ?
- Non, fit-il lentement, je suis médecin également, mais...
Elle l'interrompit.
- Vous n'êtes pas le docteur Levaillant ?
- Il habite plus loin, au 32 la même rue ; si vous ne le trouvez pas, dit Dario en saisissant par la manche la femme qui s'éloignait, je suis chez moi toute la soirée. Mon appartement est au-dessus de la pension de famille " Mimosa's House ". Je m'appelle le docteur Asfar.
Mais elle avait disparu déjà. Elle avait traversé la rue en courant. Elle sonnait à une porte qui n'était pas celle de Dario. Il rentra chez lui. S'appeler Levaillant, Massart au Durand, quel rêve ! Qui aurait confiance en lui, Dario Asfar, avec sa figure et son accent de métèque ? Ce docteur Levaillant, son voisin, il le connaissait. Comme il enviait sa barbe grise, son air bonhomme et tranquille, sa petite voiture, sa jolie maison...
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Il ramassait ses forces, comme dans une bataille inégale où, si un instant encore la mort vous est épargnée et qu'on ne peut fuir, on serre dans sa main ses armes, on songe à un être chéri, et on se jette en avant, ayant compris enfin dans son coeur que l'on ne ménagerait rien, ayant accepté de perdre son âme s'il faut à ce prix gagner l'existence.
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Elle prit dans ses bras l'enfant qui s'était réveillé en criant. Elle le berça contre elle, l'apaisa et s'assit près de son mari, sur la malle recouverte d'une vieille couverture. Ils se sentaient mal à l'aise dans des fauteuils, raides, céremonieux, destinés aux visites, à une famille inexistante, aux clients. Pour eux, la dure malle qui avait vu toutes les gares de l'Europe était un lieu de repos, un sûr refuge.
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Son visage était à la fois trop jeune et trop vieux pour son âge; elle avait plus de trente ans. Certains traits- le front, petit et bombé, sans rides, les paupières intactes, le sourire aux dents blanches, régulières, magnifiques, sa seule beauté- étaient d'une jolie fille, presque d'une adolescente, mais des mèches éparses dans ses cheveux crêpelés, mal coiffés, grisonnaient; les yeux bruns étaient tristes, ils avaient versé des larmes, veillé, contemplé la mort sur des visages aimés, attendu avec espoir, regardé avec courage; la bouche, au repos, était lasse, naïve et douloureuse.
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Ce ton tranchant et sans appel que prennent les femmes du monde surtout lorsqu'elle parlent de ce qu'elles ne comprennent pas, compensant ainsi avec bonheur leur ignorance par leur insolence.
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Comme il admirait Sylvie Wardes ! Comme il rôdait, ébloui, non seulement au seuil de sa richesse, mais de biens dont jusqu'ici il n'avait connu que le nom : la dignité, le désintéressement, une politesse exquise, la fierté qui abolit le mal en l'ignorant. "C'était cela qu'il était venu chercher en Europe, pensait-il. Cela, non pas seulement l'argent ou la réussite, non seulement une vie plus large, de bons lits, de chauds vêtements et de la viande chaque jour", songeait-il. "Oui, nous tous, qui me méprisez, riches Français, heureux Français, ce que je voulais, c'était votre culture, votre morale, vos vertus, tout ce qui est plus haut que moi, différent de moi, différent de la boue où je suis né !"
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Elle lui caressa les cheveux.
– Dario, c'est un grand bonheur, pour un mari et une femme, de parler la même langue, et d'avoir eu faim ensemble, d'avoir été humiliés ensemble. Ne le crois-tu pas ?
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