Beaucoup de lecteurs ont buté sur la lecture de
1984 de
George Orwell, il faut avouer que son style est assez austère, pas très vivant, et le rythme du récit pas particulièrement enlevé. C'est un style qui se prête au sujet, mais pas à l'aventure, c'est à dire un roman ou l'introspection politique passe avant l'action. Ce qui fait la force du roman, c'est aussi sa faiblesse, c'est avant tout de l'anticipation politique, un roman d'idées, les actions ne font qu'illustrer le propos.
Le risque d'adapter cette oeuvre en bande dessinée c'est où de trahir cette recherche intellectuelle, ou de paraphraser le roman. Personnellement, j'attend d'une adaptation un parti pris, une réponse graphique, je préfère une légère trahison à un simple accompagnement en image de l'écrit, sinon, autant lire l'original.
L'entrée dans le domaine public de cette oeuvre a été l'occasion d'une série d'adaptations en bande dessinée. Les publications se percutent, la comparaison est inévitable et je ne vais pas me gêner pour la faire.
Ici, le graphisme est assez austère, mais pas dans le sens de la dureté, il y a beaucoup de petites vignettes, beaucoup de texte, trop de textes, on n'a pas le temps de s'arrêter aux images, le trait est pas spécialement élégant, les personnages sont tous laids, on a vraiment du mal à croire à la romance. La gamme de couleur est limité, un gris, un rouge passé, elle apporte une ambiance vintage, mais sans donner au regard une circulation fluide, surtout avec toutes ces didascalies.
Cette version ne m'a pas vraiment emballée, beaucoup trop neutre, et presque ennuyeuse. J'ai eu l'impression que le graphisme était inutile, superflu, ce qui est quand même gênant pour une adaptation en bande dessinée. Elle me donne l'impression qu'il vaut mieux lire le roman original.
J'avais trouvé la version de
Jean-Christophe Derrien et
Rémi Torregrossa trop simplifiée et manquant aussi de personnalité, mais elle avait le mérite de rendre plus abordable le roman. Je n'ai pas encore lu les versions de
Sybille Titeux de la Croix ou de
Frédéric Pontarolo que j'espère découvrir un jour. Mais je ne saurais trop vous conseiller celle de
Xavier Coste, très audacieuse, avec un réelle appropriation, qui ne trahit absolument pas
George Orwell tout en apportant une nouvelle dynamique au récit. C'est d'ailleurs cette version qui a reçu le prix Fnac/France Inter cette année, et je cautionne ce choix.