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Critique de colimasson


Avec ma grande gueule, je lisais les poèmes de jeunesse de Nietzsche, en tête de ce recueil, et je ricanais déjà en disant que ça me semblait bien con tout ça. C'est vrai que ça brillait pas d'audace. Par-delà le bien et le mal, ouais, il en aura fallu du temps pour sauter par-dessus les obstacles. Mais enfin, j'allais plus tard fermer ma gueule en découvrant les fragments poétiques plus tardifs de Nietzsche et surtout, ses dithyrambes pour Dionysos.


Certains n'arrivent pas à lire l'Ainsi parlait Zarathoustra et on peut les comprendre. A moins d'aimer Proust ou Stendhal, il sera très difficile de se passionner tout du long pour cette histoire pourtant exaltante, lorsqu'on n'en retient que la moelle osseuse, extraite par les talons. Eh bien voilà ce que contiennent les Dithyrambes à Dionysos : cette moelle toute fraîche prélevée, avec ses leucocytes morts-nés qui se débattent encore dans le marasme. Odes pour l'homme qui s'éloigne de la terre pleine de geignards, et qui titube –enfin, non, qui danse- vers son étoile. J'essayerais pas de faire une interprétation. Jung, lui, en a fait une dans Métamorphoses de l'âme et ses symboles, comme quoi Nietzsche, en prise avec une individuation qui peine à décoller des bas-fonds de l'inconscient, se serait finalement révélé incapable d'amorcer le mouvement progrédient qui devait le ramener vers le monde des minables, tout enrichi de sa paix intérieure et de son amour pour le haut comme pour le bas. Il a trop morflé le Nietzsche, voilà le problème. Il l'écrit :


« Ma pauvreté, c'est que ma main ne se repose jamais de donner ».


Ou encore :


« Ô solitude de tous ceux qui donnent ! Ô silence de tous ceux qui luisent ! »


Ça fait mal de se décarcasser pour ceux qui ne s'en rendent pas compte. Ça fait mal de naître comme une belle lumière et de se faire prendre pour un lampion de bal musette. Mais faut réussir à s'en foutre. Se dire oui, buvons et pétons un coup, incorporons dans nos gosiers le bel houblon et chions-en des paquets d'étron, ainsi va la vie, et elle ne finit jamais lorsque tout se passe ainsi. Heureusement, Nietzsche n'était pas réconcilié.


« Une faim naît de ma beauté : je voudrais faire du mal à ceux que j'éclaire ; je voudrais dépouiller ceux que je comble de mes présents : -c'est ainsi que j'ai soif de méchanceté. »


Alors il danse tout seul dans son coin, juste pour Dionysos et ses fidèles.
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