Ah les légendes arthuriennes ! Elles sont pleine de fabuleuses aventures chevaleresque avec leurs personnages mythiques tel que le Roi Arthur, la belle Guenièvre, le vaillant Lancelot, le preux Perceval, le courageux Yvain, le saint Galaad, le magicien Merlin, la fée Viviane... pourtant, parmi ces personnages, se trouve un qui est méconnu et qui pour cause a une mauvaise réputation :
Mordred. Ce rénégat est l'exemple du chevalier félon qui, issu de l'union incestueuse entre Arthur et Morgause (où dans les versions modernes, Morgane la fée) va prendre Camelot et va tuer le roi dans une bataille mortelle. Pour cette raison, il est cantonné au méchant de service et est de ce fait, délaissé par les romanciers (alors que les autres personnages cités en dessus ont eu une pléthore de réinterprétations à travers les âges). Mais ici,
Mordred a droit à sa voix, son rôle et sa vie, grâce à la plume de
Justine Niogret. Et ça fait plaisir de le voir enfin à sa juste cause,
Mordred est un des protagonistes dont j'ai toujours eu une curieux attachement (Morgane sa mère selon certaines versions étant mon personnage féminin préférée des mythes arthuriens !)
Ici, c'est
Mordred qu'on s'intéresse. Celui-ci est blessé et malade dans son lit et un mire tente de la guérir. Dans sa peine, il se remémore son enfance solitaire dans les bois avec sa mère, Morgause, une enfance heureuse jusqu'à ce que son oncle, le roi Arthur, vient le chercher pour en faire le chevalier. Pour parfaire son éducation, il va tuer l'Aspic, un serpent monstrueux. Il y réussit non sans dommage corporelle. Mais entre lui et son oncle, des secrets planent... celui-ci le traite en effet plus comme un fils que son neveu.
Mordred s'interroge : quelle sera sa destinée ? Et surtout, qui est-il vraiment ?
En moins de deux cent pages,
Mordred nous fait voir sa vie et nous prouve qu'il est loin d'être le traître perfide qu'on pense souvent. Au contraire, ici, c'est un jeune homme qui se cherche, qui se sent plus en lien avec la nature que avec les hommes et qui est proche du roi Arthur, même s'il doute de la véritable nature de sa relation. C'est un garçon sensible, qui se questionne et ne veut pas porter le rôle qu'on pourrait lui coller. Cet nouvel aspect m'a plu et réhabilite ce personnage qui est souvent vu comme le fou et méchant de service. Il nous fait voir sa vision du monde aussi.
Le monde arthurien est bien différent des légendes. Au revoir Merlin, Viviane, les autres chevaliers : vous les verrez pas (même s'il est suggéré que le mire soit Merlin... enfin à mon avis). Hormi l'Aspic, le court roman est un roman médiéval réaliste, sur une époque dure et reculée où les chevaliers puent la transpiration où la pharmacopée était faite à base de plante (et des fois ne marchait pas beaucoup) avec surtout l'ombre sur la relation entre sa mère et son oncle... une ombre qui plane et drape le voile de son avenir tragique, sous-entendant ce que la légende raconte, c'est à dire l'inceste... bien que jamais confirmée.
En revanche, la lenteur est... abominable. A part le prologue intéressant mettant en scène Renart et Ysengrin, la douce enfance, le combat contre l'Aspic et la bataille finale, il n'y a rien de palpitant, on suit la vie à la cour qui n'est pas réjouissante, c'est morne et ennuyant. J'ai eu l'impression qu'il n'y avait même pas une vraie histoire, à part suivre un blessé qui radote sa vie.
Mais l'écriture, mon Dieu ! C'est de la prose poétique, qui semble être selon le vieux français de l'époque avec ses tournures et ses quelques mots vieillots, qui évoque un monde ancien où l'homme est lié à la nature tout comme à la bestialité. le problème est qu'elle contribue aussi à la lenteur du récit.
Enfin, je regrette qu'on n'approfondie pas plus le rôle de la mère, Morgause, qu'elle reste cantonnée à la maman et soeur d'Arthur sans qu'on se penche un peu plus sur son destin et sur ses ressentis envers son fils tout comme son frère... où amant ?
Mais voilà un beau conte médiéval qui a le mérite de remettre à l'honneur une figure souvent malmenée par les romans arthuriens et lui donner une nouvelle interprétation bienvenue. La plume de l'auteur m'intrigue et me pousse à lire ses autres livres. En tout cas, si vous voulez un nouveau récit arthurien mais qui sort de l'ordinaire, suivez
Mordred.