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Gibier d'élevage est un court récit de Kenzaburo Oé, qui valut à l'auteur de recevoir en 1958 le prix Akutagawa, équivalent de notre prix Goncourt. Kenzaburo Oé a par ailleurs été récompensé du prix Nobel de littérature en 1994. Cette lecture est pour ma première incursion dans son univers littéraire.
Et quelle incursion ! J'en suis encore rudement retourné.
Le récit est ramassé dans une chronique de guerre presque ordinaire.
Nous sommes au Japon, durant la seconde guerre mondiale. Un avion américain s'écrase dans les montagnes japonaises. le rescapé est aussitôt fait prisonnier par les villageois. Or il est noir...
Au tout début, les villageois ne savent pas trop que faire de ce captif. Ils s'en retournent vers le chef du village qui s'enquiert auprès de l'autorité préfectorale du territoire. Bon, vous savez, au Japon comme ici et en plus à cette époque-là et en temps de guerre, bref... Les villageois finissent par poser leur propre loi : détenir le prisonnier selon les conditions qui leur conviennent en attendant que la guerre s'achève...
L'épisode qui nous est livré ici est raconté à la hauteur d'un enfant et cela n'est pas anodin dans la force du propos mais aussi dans le malaise qui résulte de cette lecture. le narrateur, c'est l'enfant d'un des hommes du village qui a capturé le prisonnier, chargé de nourrir celui-ci et d'enlever ses déjections.
L'homme, le prisonnier, parfois on l'appelle le Noir ou le nègre ou le captif, on ne s'enquiert jamais de son nom, celui qu'il portait avant de chuter ici, avant que d'être réduit à ce que les villageois vont décider de faire de lui : une bête, un animal domestique, domestiqué, le réduire à cela, le cantonner à cela car on ne sait jamais l'animal sauvage peut à chaque instant surgir... On n'en oublierait presque qu'il fut un soldat ennemi, cela ne compte plus désormais, il devient peu à peu étranger à toute humanité et c'est terrifiant.
L'écriture est une prouesse littéraire et contribue à porter un récit extraordinaire dans sa densité, sa sauvagerie, sa capacité effroyable à dénoncer la folie et la bêtise humaine. Son acuité, sa pertinence à venir fouiller les tréfonds de notre âme.
Vu à la hauteur d'un enfant, cet enfant du récit, il existe encore en lui l'hésitation d'un regard, la naïveté de l'étonnement, l'émerveillement, la tentative d'une complicité avec celui qui est étranger, différent... Mais il y a aussi le poids de la paternité, de la parole officielle, celle qui conditionne... Mais il y aussi une sorte de méchanceté naïve, enfantine... La puissance narrative, aidée d'une construction subtile du récit, nous plonge de manière troublante dans son esprit et rend totalement inconfortable la lecture.
L'homme prisonnier est réduit à l'état d'animal, il n'a pas le choix il accepte son sort docilement.
Le récit est traversé de scènes parfois cocasses, peuplées d'enfants qui s'amusent comme on s'amuse avec un animal qu'on apprivoise peu à peu.
De cette tendresse qui existe, qui naît parmi les gestes fraternels des enfants, on se dit qu'il va se passer quelque chose, on guette l'humanité qui pourrait jaillir comme une source au hasard d'un chemin...
J'y ai lu la force d'une parabole intemporelle, celle qui dit la bestialité qui gît dans l'humanité, cette humanité qui hésite encore à grandir dans les yeux étonnés de l'enfance...
C'est une lecture difficile, éprouvante, parfois dérangeante, d'un texte superbe, celui d'un grand auteur.
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Voici une longue nouvelle de Kenzaburo Oé...nouvelle qui a reçu le prix Akutagawa en 1958, l'équivalent du Goncourt japonais.

Le résultat est là, car en une petite centaine de pages de gros caractères d'une histoire en apparence très simple, l'auteur nous amène à réfléchir sur différentes thématiques touchant à la conscience humaine.

Pendant la guerre, un avion américain s'écrase dans la nature japonaise. Son occupant est un soldat noir, qui va aussitôt être prisonnier des habitants du village proche. En attendant les ordres de l'administration sur la conduite à tenir, on le fait croupir comme une bête dans une cave. Mais bientôt, devant l'attentisme des adultes, les enfants du village, dont le narrateur, vont s'occuper de lui...

Cette nouvelle est une réussite du genre, concentrant en seulement quelques dizaines de pages la progression dramatique, réservant des coups de théâtre, traduisant remarquablement les sentiments ambivalents de l'enfant narrateur et de ses amis et leur perception de ce Noir, à leurs yeux homme-animal (on le nourrit, on joue avec, on le scrute sous toutes les coutures, y compris lorsqu'il fait ses besoins...).

Dans leurs yeux, leurs paroles, leurs actes, on découvre la curiosité, la peur, la haine, la pitié, et évidemment la xénophobie, l'acceptation de l'Etranger dans la mentalité japonaise n'allant pas de soi et faisant question de manière constante.

Mais Oé est subtil (pas prix nobel de littérature pour rien !), l'enchevêtrement des thèmes forge une oeuvre plus complexe et moins monolithique qu'il n'y paraît, qui interroge sur la nature de l'Homme, ce qui le différencie de l'animal...

On voit poindre également chez l'enfant les notions de découverte du corps, de la sensualité, de la sexualité, qui lorsqu'il s'agit d'un autre homme, qu'on perçoit quasi comme une belle bête, créent une forme de trouble pervers.

Ce texte riche et superbement écrit sans pour autant céder aux artifices, prend finalement l'allure d'un récit initiatique et philosophique, et d'une dénonciation de la folie et de la bêtise humaine.
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Un village isolé dans les montagnes japonaises. Des hommes rudes, pauvres, peu éduqués. Une vie quasi autarcique, quelques incursions dans la vallée, peu de contacts avec l'extérieur. Et au loin, la guerre. Une guerre qui va s'immiscer dans le quotidien de ces gens simples et ignorants en la personne d'un aviateur américain dont l'avion est tombé dans les montagnes. Un américain, oui, mais pas vraiment un ennemi. Un noir. Un animal. Enchaîné, jeté au fond d'une cave, observé, surveillé, puis finalement confié aux enfants, apprivoisé comme un animal domestique. Et la guerre s'éloigne à nouveau devant un quotidien embelli par cette présence exotique. Jusqu'au jour où les autorités prennent enfin une décision. le prisonnier se rebelle, redevient l'ennemi à abattre.

C'est par la voix d'un des enfants que Kenzaburô Ôé raconte cette rencontre incongrue entre des montagnards japonais et un pilote américain noir. Leur premier noir. La frayeur, la curiosité, l'admiration, l'attachement. le bonheur de posséder un si bel animal. Aucune communication n'est possible, ni même envisagée, mais des moments sont partagés, des liens se créent. Et pourtant...Quand l'ignorance, la bêtise, la folie s'en mêlent...Le noir s'est plié aux traitements imposés par les villageois, il a partagé les jeux des enfants, a accepté son statut d'animal de compagnie. Mais quand il résiste, c'est la mort qui l'attend. Comme une bête rétive et dangereuse qu'on abat quand elle se retourne contre son maître.
Court roman ou longue nouvelle, Gibier d'élevage est une dénonciation de la folie humaine, de la violence née de l'ignorance. Une lecture dérangeante mais nécessaire.
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Un petit roman d'une centaine de page, un récit classique de la littérature japonaise qui a valu à son auteur en 1958 le prix littéraire Akutagawa, très convoité au pays du soleil levant.
L'action se déroule dans une vallée étroite et isolée, dans un petit village à peu près complètement coupé de la « ville » voisine située à flanc de montagne. Les villageois ont une vie rude, ils se trouvent placés loin de l'animation et de la folie du monde et ignorent pratiquement tout de la guerre. le narrateur, un des enfants du village, vit chichement avec son frère et son père. Il est occupé aux jeux de son âge pendant l'été. Quand un jour un avion ennemi s'écrase dans la forêt proche et que les villageois font prisonnier l'aviateur noir américain rescapé, la guerre perd son caractère d'abstraction. Petit à petit des relations se nouent entre les enfants et ce prisonnier. Les enfants, émerveillés et fascinés, en deviennent responsables et s'occupent de lui comme ils le feraient d'un animal sauvage. Sa race, sa langue, sa nationalité, inconnues d'eux les amènent à le considérer comme une simple bête. L'auteur accentue d'ailleurs cet aspect du récit en donnant des descriptions corporelles très crues et en mettant l'accent sur les fonctions vitales des personnages et en particulier du prisonnier.
Le récit et son dénouement montrent de manière magistrale la bêtise humaine, la folie, la violence et la barbarie qui peuvent naître de l'incompréhension et de l'ignorance.
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« Gibier d'élevage » qui reçut le prix Akutagawa permit à Kenzaburô Ôé de faire une entrée remarquée et fracassante dans le monde littéraire à l'âge de 22 ans. Un avion américain s'écrase près d'un village japonais isolé au milieu des montagnes. le pilote réussi à s'éjecter mais est rapidement capturé par ces paysans. En attendant de recevoir une décision du représentant du gouvernement le plus proche, les villageois vont maintenir prisonnier ce soldat noir américain. Peur, haine, inquiétude, animosité... tels sont les sentiments de ces japonais envers leur prisonnier. C'est un ennemi et plus même...Il est noir !

Un peu reclus sur eux-mêmes, ces japonais, de simples paysans et montagnards, vont considérer le soldat noir comme un animal. Enfermé dans le noir au milieu de ses propres immondices, enchaîné par les pieds et les mains, il ne sera considéré que comme une bête sauvage pour qui on peut avoir les pires craintes, les pires peurs. Pour la plupart, ils n'ont jamais rencontré de « nègre », et comme l'être humain est terrifié par ce qu'il ne connaît pas, le prisonnier sera traité comme pire qu'un ennemi.

Le temps passe, le prisonnier semble s'adapter à ses conditions, les enfants du village le surveillent et la communication semble s'établir. Chants, rires, travaux...le noir se fait petit à petit une place dans la vie du village. Il n'est plus tout à fait un ennemi mais simplement une nouvelle bête de compagnie. Les japonais l'aurait-ils domptés, domestiqués comme ils l'auraient fait avec un animal sauvage ?

Mais est-ce qu'une bête sauvage peut-elle être élevée ?
Lien : http://leranchsansnom.free.fr/
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J'ai l'estomac un peu retourné au sortir de ce conte d'un cruel naturalisme en marge de la guerre américano-japonaise, par un Nobel de littérature qui n'a pas volé son prix.
Nous sommes dans un village reculé et miséreux que la guerre n'a touché qu'à la marge en lui prenant ses hommes jeunes. Un avion ennemi s'écrase, on en ramène le pilote : il est noir. Pour les gamins du village, petits sauvageons livrés à eux-mêmes et à leur représentations peu éclairées du monde, pas de doute : c'est un animal, au même titre que le taureau de la commune, confié aux bons soins d'engraissage des villageois en attendant la décision des autorités.

Racontée par le gamin en charge d'apporter chaque jour sa nourriture au prisonnier, cette histoire est assez troublante, car l'animalité supposée du prisonnier le dispute à celle des gamins qui viennent le renifler comme une bête et cherchent à se faire apprivoiser, tout en explorant sans filtre leur sexualité naissante.

Sur toile de fond de guerre propre à faire resurgir la plus primitive des bestialités, cette nouvelle philosophique à la trame dramatique redoutablement efficace interroge de manière troublante ce qui fait l'humanité des hommes. Superbe!
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Première approche avec l'univers de Kenzaburô Ôé, prix Nobel de la Littérature 1994, à l'occasion de sa prochaine venue aux assises internationales du roman de Lyon, avec ce court récit ( presque une nouvelle) d'une centaine de pages écrit en 1950, soit juste après la 2eme guerre mondiale, sorte de conte terrifiant et métaphysique sur le racisme primaire, à travers cette histoire de soldat noir perdu au milieu d'un village de paysans japonais qui n'ont jamais vu de noir et qui vont le traiter comme une bête.

On appréciera la prose sèche et poétique en même temps d'Oé, qui rend ce récit malaisant, mais l'ensemble reste trop froid et un peu trop théorique pour toucher et émouvoir vraiment, malgré la force du propos.

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Connaissez-vous le prix Akutagawa ?

Pour ma part, je ne connais son existence que depuis quelques jours, depuis que mon libraire m'a orientée vers ce livre de Kenzaburô Ôé (découverte de l'auteur également).

C'est l'équivalent du prix Goncourt au Japon. L'auteur l'a reçu pour Gibier d'élevage en 1958. Un livre qui avec moins de 100 pages ressemble presque à une nouvelle, ce qui m'a amené à me demander si le Goncourt avait déjà récompensé un livre de format court. Quantité ne fait pas qualité, c'est certain mais bon, je m'interroge...

Je ne lis que très rarement des livres d'auteurs asiatiques car je crains de ne pas avoir les références culturelles pour les comprendre. Ce n'est pas le cas avec celui-ci qui aborde des thèmes assez universels et notamment celui de la différence, de l'altérité.

Le récit se déroule au Japon au cours de la Seconde guerre mondiale. La guerre semble lointaine pour les habitants de ce "village de défricheurs" perdu dans la montagne, coupé de la ville par des chemins devenus impraticables en raison de pluies torrentielles. L'école a été fermée, les enfants s'ennuient tandis que les parents s'occupent des champs ou partent chasser comme le père du personnage principal dont on ne saura pas le nom. On comprend qu'il est entre l'enfance et l'adolescence et qu'il doit veiller sur son frère plus jeune pendant les longues journées de chasse du père. Il doit aussi s'affirmer face à Bec-de-Lièvre, un petit dur qui impose sa loi à tous les enfants.

Un jour, un avion américain atterrit dans la montagne et les hommes du village partent à la recherche de l'équipage ennemi. Ils reviennent avec un seul captif, un soldat américain à la peau noire. Les villageois ne savent que faire de ce prisonnier. Un fonctionnaire de la ville, contacté avec difficulté explique qu'il faut attendre les ordres de la préfecture. Les enfants sont effrayés par cet homme si différent, les adultes, quant à eux ne sont guère rassurés mais il faut cependant veiller à son approvisionnement. C'est finalement au fils du chasseur que l'on confie cette mission, le prisonnier étant enfermé dans la cave de la resserre communautaire où sa famille et lui habitent. Avec les jours qui passent, la mission d'abord sous surveillance des adultes devient le monopole des enfants, notre héros, son jeune frère et l'inévitable Bec-de-Lièvre qui monnaye ferme l'accès au soupirail permettant d'apercevoir le captif, véritable sujet de curiosité, de peur et de fascination pour les enfants. Sans méchanceté particulière (du moins, le considèrent-ils ainsi), les enfants le traitent comme un animal (oui, je me doute que ça peut choquer mais ils emploient le même terme pour les citadins), un animal superbe qu'il faut apprivoiser. Dis comme ça, c'est un peu réducteur. Pourtant, le titre interpelle bien sur une forme d'animalité mais peut-être est-ce une manière pour ces enfants naïfs et frustres de gérer l'altérité, de l'apprivoiser pour en avoir moins peur ? C'est certainement extrêmement maladroit mais pour autant la vraie cruauté ne viendra pas d'eux.

Un récit qui questionne assez habilement des thèmes nombreux comme ceux de l'humanité ou de la bestialité, de la différence, du racisme, des rapports de confiance ou de défiance et qui fait aussi la part belle à l'évocation des sens. Pas bien volumineux mais assez ambitieux en somme.
Lien : http://leschroniquesdepetite..
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« La guerre, à présent disgracieuse dans sa majesté de légende trop longtemps entretenue, vomissait un air croupi. » le ciel d'un village reculé du Japon est depuis récemment traversé par des avions ennemis, et aux yeux du jeune narrateur de cette histoire, ils ne sont que des oiseaux d'une espèce rare. L'école étant fermée, le garçonnet, son frère cadet et leur ami Bec-de-Lièvre s'occupent comme ils peuvent, cherchant des os de bel aspect dans le crématorium de fortune de la vallée, ou chassant le chien sauvage. Lorsqu'un avion américain s'écrase non loin de là dans la montagne et qu'un rescapé est fait prisonnier par les villageois, c'est tout autant une calamité qu'une attraction qui remue la vallée, d'autant plus que cet homme est noir. Incapable de prendre en charge ce prisonnier, l'administration japonaise désorganisée le laisse aux soins des villageois. Pour l'enfant narrateur qui n'a jamais vu un être aussi bien bâti et d'une telle carnation, ce n'est ni un ennemi ni même un homme, mais une bête étrange qu'il faut nourrir et surveiller, peut-être même apprivoiser.

Dans ce court roman d'une centaine de pages, c'est au travers du regard d'un jeune garçon que nous voyons ce prisonnier noir, d'abord abattu et apathique, puis étrangement docile et coopératif, devenant même pour les enfants ébahis de naïveté et d'émerveillement « une sorte de magnifique animal domestique, une bête géniale ». Mais au fur et à mesure que l'été de canicule avance, tandis que la préfecture tarde à donner ses instructions, le lecteur sent enfler quelque chose qui relève du drame, un événement qui changera le regard de notre jeune narrateur sur le monde des adultes.

Kenzaburô Ôé a été récompensé pour cet ouvrage en 1958 par le prix Akutagawa, l'équivalent de notre Goncourt. Sa concision et le prisme enfantin par lequel cet épisode de la guerre du Pacifique est raconté sont remarquables. Cette histoire illustre tout autant la cruauté que l'absurdité d'un conflit qui verse dans le marasme. Une adaptation cinématographique de ce roman a été réalisée en 1961 par Nagisa Oshima sous le titre « Une bête à nourrir » (飼育, Shiiku).
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Gibier d'élevage (prix Akutagawa ) est un court roman réussi de l'excellent Kenzabûro Ôé. Durant la seconde guerre mondiale, un avion s'écrase près d'un village dans une région montagneuse et reculée du Japon. Après une battue, l'aviateur est fait prisonnier par les villageois, qui reçoivent l'ordre de le garder captif au village. Seulement, l'aviateur est noir, ce qui amène les villageois à le traiter comme une bête , sous le regard intrigué des enfants et en particulier celui du narrateur qui va tenter de l'apprivoiser.

Ce roman est intéressant car il traite, comme souvent dans l'oeuvre d'Ôé, de l'ignorance de l'autre et de la violence des êtres humains les uns envers les autres avec beaucoup de lucidité et d'intelligence. En effet, s'il est peu étonnant de voir les mauvais traitements que font subir les adultes du village au noir, comportement imputable aux préjugés de montagnards frustres et illettrés, il est beaucoup plus troublant de voir la manière dont les enfants considèrent le prisonnier comme un animal exotique qu'il leur faut apprivoiser, et même si le soldat a les mêmes besoins qu les autres hommes du village, chacun de ses gestes paraissent extraordinaires aux yeux des enfants. Peu à peu, le prisonnier semble se plier à son statut d'animal en cage, devenant même le loisir préféré du narrateur qui craint que les adultes le lui retirent. Cependant Ôé nous fait passer un message en montrant que même quand on veut faire de lui un animal, l'homme conserve la flamme irréductible de son humanité : la révolte du soldat qui se dresse finalement contre les villageois et préfère affronter la mort plutôt que de rester soumis aux villageois en est le symbole. Ce beau message de résistance est portée par le style élégant de l'écrivain et par les belles descriptions de l'auteur qui dépeint une nature hostile à des hommes qui mènent une vie assez démunie et se montrent durs dans leurs comportements comme dans leurs sentiments.

Au final un bon cru, même s'il n'est pas le meilleur, de Kenzabûro Ôé. A lire !

PS : dans la même veine, on peut lire Arrachez les bourgeons, tirez sur les enfants, toujours de Ôé.
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