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Gabrielle Danoux (Traducteur)
EAN : 9791097292041
171 pages
(07/10/2017)
4.5/5   4 notes
Résumé :
La mystérieuse Alice Orient inaugure cette nouvelle série d'écrivains roumains écrivant en français. Les textes choisis comprennent son roman écrit en français et publié en 1924 "La Tunique verte" que suivent quelques poésies traduites par Gabrielle Danoux. Puisse celle qu'en Roumanie on appelle souvent simplement Alice vous fasciner par son style élégant comme des générations de critiques et de lecteurs.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Je remercie Gabrielle Danoux, croisée sur Babelio qui m'a gentiment proposé de lire ses livres. Sa confiance me touche particulièrement.
Je ne connais pas grand-chose à la littérature roumaine et encore moins les auteurs traduits par Gabrielle Danoux ; par contre, je m'intéresse beaucoup aux difficiles enjeux du métier de traducteur…
Avant de me plonger dans Textes choisis d'Alice Orient, j'ai fait quelques recherches mais les renseignements trouvés furent plutôt maigres. Alice Ștefania Stănescu Călugăru était une poétesse roumaine, née à Paris en 1886, puis retournée à Bucarest avant de revenir en France et d'inaugurer sous le pseudonyme d'Alice Orient une nouvelle série d'écrivains roumains écrivant en français. Les Textes choisis comprennent son roman écrit en français et publié en 1924, La Tunique verte, et quelques poésies traduites par Gabrielle Danoux.
Gabrielle Danoux en dit un peu plus dans sa préface… Je retiens surtout sa belle démarche de promouvoir et de sauvegarder la parole et l'écriture d'une femme de lettres roumaine aujourd'hui un peu oubliée.

La Tunique verte est l'histoire de Lilis, une mystérieuse jeune femme qui, hospitalisée à cause d'une fracture du poignet, perd son âme et la recherche dans une quête à la fois onirique, poétique, délirante et surréaliste. Aujourd'hui, nous parlerions peut-être d'amnésie partielle…
Ce roman se passe à Montmartre, au gré d'errances nocturnes, de péripéties, de rencontres dans des ambiances noctambules et interlopes, qualifiées d'« inepties de bar en bar ».
C'est à la fois un roman d'aventures avec des récits enchâssés, un enfant trouvé, des parents retrouvés, des personnages hauts en couleurs tel un clown danseur ou encore un alchimiste à la fois faux-monnayeur et indicateur… Et que penser du démon de l'orgueil ?

La narration veut paraître structurée… le prologue annonce le passage d'une âme dans « les régions éblouissantes ». le livre un est celui de la rencontre de Lilis avec Josué, « un esprit » qu'elle croise hors de son corps à la manière d'une voix dans sa tête ou d'un compagnon imaginaire. On y décrit aussi le va et vient des amis, divers et variés qui se succèdent au chevet de la convalescente. le deuxième livre voit apparaître Goerget, nouveau guide, et pêche par certaines longueurs, notamment quand il y est question de musique. le livre trois est une alternance de récits et de points de vue et donne la signification de la tunique verte du titre.

L'écriture est belle, travaillée et pleines de détails, vestimentaires notamment. L'auteure est souvent dans le registre de la provocation ou du contre-pied ; certaines insistances sont déroutantes, comme celles sur les origines juives de l'une des protagonistes.
La temporalité est imprécise et décousue, au rythme des saisons, l'hiver, puis le printemps. L'époque n'est pas évidente : on y roule en voiture mais on s'y habille de manière tellement farfelue que c'est indatable.
J'ai reconnu des références bibliques autour de Josué, successeur de Moïse dans la conduite des Hébreux vers la terre promise et, ici, guide de Lilis dans sa recherche d'elle-même, et mythologiques aussi avec Orphée.

Je dois avouer que l'ensemble m'a un peu décontenancée… Je dirai que c'est original, à défaut d'être surnaturel ou fantastique.

J'ai abordé les poèmes avec un peu d'appréhension. Je m'intéresse beaucoup aux enjeux de la traduction, je l'ai déjà dit. le traducteur littéraire doit respecter l'esprit du texte original, restituer la singularité d'une oeuvre tout en la rendant accessible dans la langue de destination ; c'est encore plus difficile en poésie où la part d'interprétation s'accroit… Personnellement, je ne possède aucune notion de roumain.
Quelle n'a pas été ma surprise, dès le premier poème, de voir que Gabrielle Danoux a réussi à maintenir un nombre de pieds à peu près équilibrés et à conserver des rimes, peut-être pas des plus riches mais au moins en termes de sonorités… le registre est soutenu avec des mots rares parfois (amuïr, obérer…)
En matière de poésie, tout est très subjectif… Personnellement, il faut que cela m'embarque et me touche… Ici, j'avouerai que mon préféré est le plus long qui évoque une femme-serpent dans un texte lyrique et audacieux. Les autres sont plus neutres, parlent de la pluie, du ciel ou encore des souvenirs.

Merci, Gabrielle Danoux, pour cette découverte. J'ai encore dans ma PAL d'autres livres que vous avez traduits et j'ai hâte de vous lire à nouveau.


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Je renvoie à mon propos sur La Tunique verte reprise (rééditée) ici en compagnie de quelques poèmes en traduction inédite dont notamment "Les Serpents", le plus remarqué par les critiques.
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Plongée dans un univers très étrange, curieux, bigarré et prenant. Parfois je me demandais si Boris Vian n'avait pas rencontré Trainspotting mais manifestement non, l'identité de l'oeuvre est très personnelle. Que dire ? On loge à Montmartre qui n'est peut-être pas Montmartre. On démonte une porte pour faire un feu. On boit du champagne au réveil. On met ses pieds dans les cendres pour les voir briller, même s'ils restent froid. On sort d'hôpital, on parle de couvent. On rencontre des personnages parfaitement improbables. On dialogue avec une statuette qui parle. Non pas le chien, mais l'homme en toge bleue. C'est absurdement décalé, tout comme cette vie décousue qui se construit un sens, un lien autre. J'ai beaucoup apprécié me laisser submerger par cette narration déroutante. Les poésies renseignent beaucoup sur l'oeuvre de l'autrice. La pluie, le serpent et tous ces motifs impermanents. Très belle découverte. Merci à Gabrielle Danoux (Tandarica) pour cette belle découverte.
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Les serpents

Sous le déploiement majestueux de branches de l’humide taillis
Dans l’herbe dorlotée je me couche, mes tempes sur mes paumes,
Je n’autorise pas le sommeil à m’abattre de son végétal baume
Car lentement je me mets à siffler le sortilège des serpents gris

Qu’ils glissent sous les feuilles aux douces eaux ondulantes,
Aux secrètes flammes verdâtres tremblant sous la braise,
Qu’ils dirigent vers moi leur tête triangulaire et mauvaise,
Où des yeux troubles veillent sous les paupières transparentes.

Avec un sifflement prolongé le chant irrévélé commence,
Qui les rassemblera de loin et les flattera, trompeur,
Et ils ramperont vers moi sur la mousse verte et en fleurs,
Hors de l’obscurité telles des sources qui de la terre s’élancent

Et voici que de tous côtés j’entends un friselis de forêt,
Enroulés sur les branches comme la chaîne du malicieux lierre
Ils bâtissaient leur venin d’ivraie dans l’herbage vert
Dans les eaux du bois cachés sous de gros cailloux somnolaient.

Or mon incantation repousse loin leurs premiers frissonnements
Soudain chacun d’entre eux quitte du bois son nid désertique
Aussi, vaincus par le long supplice du sifflement chromatique,
Se mesurent-ils en mon rythme étrange par un lent glissement.

Venez ô vous serpents dans l’herbe à plat ventre ondoyant
Brins longs comme lances plantées en pierre, vos visages rêvés !
Venez ô vous arc-boutés comme des chaînes, lors enchaînés
Aux invincibles cadences de mon chant jamais chanté auparavant

Venez ô vous secrets, fastueux, envoûtés par une voix singulière !
Désormais vos ébats seuls dans leurs rythmes se transformeront
Et impuissantes contre moi vos dangereuses langues seront,
Qui telles de vénéneuses fleurs lancent leur venin amer.

Dans les hautes herbes j’étais couchée, ô vous, en vous guettant,
Qui à mes pieds déposez tout le pouvoir caché du bocage
Et son entière subtilité m’offrez en d’illusoires virages
Tandis que mon sifflement devient chant de victoire à présent.

Appuyée contre l’arbre j’attends toutes vos troupes décimées
À mes pieds avec leurs corps d’épées agiles qu’elles se couchent
Que j’élance en la roulant sur mon bras ma proie farouche
Et que ma taille soit ceinte par ces ceintures animées.

Dépourvu de force contre moi le bois tout entier m’est asservi
Lui qui m’enlaçait de son âpre fragrance et de sa terreur
Désormais m’appartient tout son empire de crainte et de peur
Et je me pare de son inimitié empoisonnée que j’ai anéantie.

(p. 163-164)
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Aujourd’hui j’ai cru voir s’incarner la souple pluie
Bruissant grisâtre et de soie était son habit.

Des épaules à la taille elle portait des milliers de fers
Qu’elle jetait en passant sur l’eau trouble de la rivière.

Et d’innombrables anneaux chargeaient ses mains
Qu’elle ôtait tous et balançait au lac un à un.

Près des labours au jardin on l’entendait souvent passer
Et la traîne de sa robe de fraîches fleurs renversait.

Sa main transformait les vitres dans son urbain périple
Sous des cordes d’eau en harpes multiples.

Or la radieuse pluie sur l’épaule comme une amphore
Sombre et chargé d’eau l’infatigable nuage arbore.

De lui passant comme un échanson dans tous nos cœurs
Elle remplit des coupes innombrables de vains pleurs.

(La pluie, p. 167)
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Chant étranger
Ne venez pas quand l’ombre croît
Vers l’horizon qui se perd,
Quand le couchant déçoit
Le ciel violet est vert.

De peur de chasser de timorées
Ombres de naguère
Les reliques de mon passé
Souffrances qui m’obèrent,

Car sur les cieux quand les étoiles étincellent
Sur mon âme qui me fait mal
Les souvenirs arrivent telles des gazelles
Qui s’abreuvent à la source vespérale.
(p.166)
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Bercée par le rythme des phrases, éblouie par l’éclat des idées, toujours enivrée par mon propre geste, par ma propre image que je ne me lassais jamais de contempler dans le miroir, je ne m’étais pas aperçue que je commençais à vouloir franchir les bornes permises aux humains et que je voulais furtivement poser un pied dans l’infini.
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Dépourvu de force contre moi le bois tout entier m’est asservi
Lui qui m’enlaçait de son âpre fragrance et de sa terreur
Désormais m’appartient tout son empire de crainte et de peur
Et je me pare de son inimitié empoisonnée que j’ai anéantie.

(p. 164)
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