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Citations sur De joyeuses funérailles (10)

Il faisait une chaleur torride, cent pour cent d'humidité. On aurait dit que l'énorme ville tout entière, avec ses immeubles inhumains, ses parcs magnifiques, ses gens et ses chiens multicolores, était parvenue à la limite de la phase solide - encore un peu, et les êtres à demi liquéfiés allaient se mettre à flotter dans l'air transformé en bouillon.
(début)
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Et puis ... le sang juif de Fima, passé au filtre de la souffrance depuis des millénaires, semblait contenir un élément vital essentiel qui s'effritait en l'absence de souffrance. Les gens de cette race, privés de souffrance, perdent aussi la terre sur laquelle reposent leurs pieds...
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Tous les gens nés en Russie qui se trouvaient ici, et qui différaient par leurs dons, leur éducation ou simplement leurs qualités humaines, avaient un point commun: tous, ils avaient quitté la Russie d'une façon ou d'une autre. La plupart avaient émigré dans la légalité, certains étaient des réfugiés, les plus intrépides s'étaient évadés en franchissant une frontière. Mais cet acte qu'ils avaient accompli les apparentait. Quelles que fussent leurs divergences d'opinions, quelle que fût la façon dont leur vie avait tourné en émigration, il y avait dans cet acte quelque chose qui les liait irrémédiablement: le franchissement d'une frontière, la fracture d'une ligne de vie coupée net, l'arrachement de vieilles racines et l'implantation de nouvelles dans une terre étrangère, avec une autre consistance, une autre couleur, une autre odeur.
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Durant toutes ces années, pour la majorité d’entre eux, les nouvelles venant de Moscou sur la progression, là-bas, de l’absurdité, de la médiocrité et de la criminalité, constituaient, qu’ils en fussent conscients ou non, la confirmation souhaitée que leur choix de vie était justifié. Mais personne ne pouvait supposer que ce qui se passait à présent dans ce pays lointain, ce pays d’autrefois qu’ils avaient rayé de leur existence – qu’il crève donc – éveillerait en eux un écho aussi douloureux. Il s’avérait que ce pays, ils l’avaient dans les tripes, dans l’âme, et, quelle que fût l’opinion qu’ils en avaient – et ces opinions étaient diverses - le lien qui les rattachait à lui était indestructible.
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La plupart d'entre elles étaient arrivées avec vingt kilos de bagages et vingt mots d'anglais pour tout viatique, ayant perpétré au nom de cette transplantation une centaine de ruptures, petites et grandes: avec leurs parents, avec leur rue et leur quartier, avec l'air et avec l'eau et pour finir - ce dont on met le plus longtemps à prendre conscience - avec leur langue maternelle, laquelle devenait avec le temps de plus en plus fonctionnelle et utilitaire.
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Durant toutes ces années, pour la majorité d’entre eux, les nouvelles venant de Moscou sur la progression, là bas, de l’absurdité, de la médiocrité et de la criminalité, constituaient, qu’ils en fussent conscients ou non, la confirmation souhaitée que leur choix de vie était justifié. Mais personne ne pouvant supposer que ce qui se passait à présent dans ce pays lointain, ce pays d’autrefois qu’ils avaient rayé de leur existence-qu’il crève donc- éveillerait en eux un écho aussi douloureux. Il s’avérait que ce pays, ils l’avaient dans les tripes, dans l’âme, et , quelle que fût l’opinion qu’ils en avaient – et ces opinions étaient diverses-, le lien qui les rattachait à lui était indestructible.
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Tout les gens nés en Russie qui se trouvaient ici, et qui différaient par leurs dons, leur éducation ou simplement leurs qualités humaines, avaient un point commun : tous, ils avaient quitté la Russie d'une façon ou d'une autre. La plupart avaient émigré dans la légalité, certains étaient des réfugiés, les plus intrépides s'étaient évadés en franchissant une frontière. Mais cet acte qu'ils avaient accompli les apparentait. Quelles que fussent leurs divergences d'opinion, quelle que fût la façon dont leur vie avait tourné en émigration, il y avait dans cet acte quelque chose qui les liait irrémédiablement : le franchissement d'une frontière, la fracture d'une ligne de vie coupée nette, l'arrachement de vieilles racines et l'implantation de nouvelles dans une terre étrangère, avec une autre consistance, une autre couleur, un autre odeur.
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En Russie, Nina ne faisait jamais la cuisine parce qu'elle avait peur du feu. A l'époque, elle se passionnait pour l'astrologie, et avait lu quelque part que pour les natifs de la Balance, dont elle était, le feu représentait un danger. Du coup, elle ne s'était plus jamais approché d'une cuisinière, expliquant cela par une incompatibilité cosmique entre son signe d'air et l'élément feu.
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L'énorme Liova Gotlieb à la barbe noir comme du cirage fit respectueusement sortir de l'ascenseur un homme maigre et bien bâti, lui aussi grand et barbu, qui ressemblait à son reflet tiré d'un miroir déformant : tout était exactement pareil, mais en quatre fois plus mince ... Irina faillit s'étrangler de rire, mais se maîtrisa aussitôt. Liova la répéra d'emblée dans la cohue et fonça vers elle en s'exclamant avec une intonation toute conjugale :
"je t'avais pourtant bien dit que je t'appellerai juste après la fin du shabbat, mais tu avais mis ton répondeur. Heureusement que j'avais noté l'adresse ..."
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Il avait vingt ans quand il était entré pour la première fois à l'intérieur de ces murs, derrière des tanks. Cela sentait encore la poudre et le fer. Il avait arpenté toute la Vieille Ville, exploré tout l'imbroglio des rues arabes, tous les toits des quartiers chrétien et arménien. Les lieux saints chrétiens de Jésuralem lui semblaient suspects, de même qu'une grande partie des lieux saints judaïques. Le Cénacle, surtout, lui inspirait une méfiance particulière: cette réunion secrète de la Pâque ne pouvait pas avoir eu lieu sur les ossements du Grand Roi. D'ailleurs le tombeau de David, lui non plus, n'inspirait pas confiance... Tout cet univers merveilleux qu'il aimait tant, de pierre blanche et friable, était rempli d'aberrations historiques et archéologiques, à la différence de l'univers de la sagesse livresque, agencé avec une précision cristalline, sans faille ni approximation, avec son ascension raisonnable du bas vers le haut, et ses charnières logiques paradoxales d'une grande beauté...
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