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EAN : 9782070197460
624 pages
Gallimard (22/03/2018)
3.83/5   166 notes
Résumé :
Dans la malle laissée par sa grand-mère Maroussia avant sa mort, Nora découvre des lettres que celle-ci avait échangées avec son grand-père, Jacob. Féministe avant la révolution, danseuse artistique et communiste ardente, la belle Maroussia a ses propres convictions intellectuelles. Mais le poids de l'histoire soviétique va peser sur leurs rêves et sur leurs ambitions. Et quand Jacob est relégué en Sibérie sous l'accusation de sabotage, même son fils, le père de Nor... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (38) Voir plus Ajouter une critique
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Nora, décoratrice de théâtre, femme moderne qui élève seul son fils, découvre à la mort de Maroussia, sa grand-mère, les lettres qu'elle et son grand-père Jacob ont échangé pendant plus de vingt-cinq ans. Une correspondance épistolaire sincère, franche, respectueuse et attendrissante. « Un quart de siècle d'amour, d'amitié, de mariage… »

L'époque de Jacob et Maroussia (à partir de 1910, la mort de Tolstoi), et le présent de Nora (à partir de 1975-1981) sont les deux temps de narration de cette histoire familiale, une histoire de femmes libres surtout, qui entendent exister intellectuellement et socialement. D'origines bourgeoises mais progressistes, Nora comme sa grand-mère Maroussia sont féministes, souhaitent s'épanouir dans un travail valorisant et croient à la possibilité d'une justice sociale. Ce qui sur ce dernier point ne fut pas le cas de Jacob qui quand « La justice sociale tant attendue frappa ... abandonna sa carrière à peine commencée à l'institut et trouva un travail dans le département des statistiques du commissariat du peuple au Travail d'Ukraine ... se réduisit à des discussions dans un cercle intime ... son principal interlocuteur restait Maroussia, emballée par l'édification d'un avenir grandiose. » Jacob qui, par la suite accusé d'activités antisoviétiques, passa une bonne partie de sa vie en relégation.

De l'époque tsariste à celle de Poutine, en passant par celle de la révolution bolchevique et de l'URSS, avec Ludmila Oulitskaïa nul besoin d'enjamber les vides, ils n'existent pas ou si peu dans cette saga prenante de grand ampleur (plus de 600 pages quand même) inspirée par la vie de sa famille pendant tout le XXe siècle. Des juifs intellectuels et artistes pour la plupart, surdoués pour certains, dissidents pour d'autres, des hommes et des femmes avec des hauts et des bas qui ont été, à ne pas en douter, des acteurs et des témoins privilégiés de leur époque.
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Publié en 2015 en Russie et traduit dès 2018 en France, L'échelle de Jacob est un très ambitieux roman, qui conte sur environ un siècle l'histoire d'une famille, et en arrière-fond l'histoire de la Russie pendant cette période. Différentes époques sont évoquées, autour de quelques personnages clés, nous suivons en parallèle deux progressions, celle de Nora, scénographe de théâtre née en 1943 , et celle de ses grands-parents, Maria et Jacob, le destin de ce dernier prenant de plus en plus de place.

Tout débute en 1975, à la mort de Maria. Nora récupère dans la chambre occupée par sa grand-mère, à qui elle a été très attachée à un moment, des livres et une malle en osier contenant divers documents, dont des lettres et carnets intimes. le roman va ensuite dérouler, à tour de rôle, le récit de la vie de Nora, dans toutes ses évolutions, et les carnets et lettres de la malle, en partant de 1905. Les deux récits se répondent, et nous comprenons mieux certains événements de la vie de Nora à la lumière de l'histoire de grands-parents, parents, oncles, cousins, amis… L'auteure s'est inspirée pour écrire ce livre, de l'histoire de sa propre famille, des lettres qui ont existé, des archives de la police politique, des photos et sans doute des souvenirs. Il m'est difficile de dire à quel endroit se trouve la frontière entre le réel et l'imagination de l'écrivaine, mais c'est sans doute un livre très personnel, voire intime.

Le destin de tous ces personnages est façonné par l'histoire au combien tourmentée de leur pays. Pogroms, révolutions, guerres, répressions, déportations : il n'est pas possible d'échapper à tous les malheurs du temps. La maîtrise des événements échappe aux individus, dans tous les aspects de leurs vies, y compris les plus personnels. Car c'est sur cela qu'est centrée le roman, sur les personnages, sur leurs existences, leur quotidien, leurs bonheurs et malheurs, la manière dont ils se construisent, leurs valeurs pourrait-on dire. La grande histoire est au second plan, en filigrane, elle n'est pas vraiment détaillée ni expliquée. Par exemple, la guerre d'Afghanistan est évoquée par le choix que fait Nora d'envoyer son fils, Yourik, aux USA, pour échapper à son service militaire. le lecteur qui voudrait en savoir plus sur l'histoire russe sera déçu, mais le projet de Ludmila Oulitskaïa n'est visiblement pas d'écrire un roman historique à proprement parlé.

La question centrale du livre, est à mon sens, comment vivre. Dans une époque tourmentée, pour les personnages du roman, mais la même question se pose évidemment partout et de tout temps. Jacob et Nora, décident, non pas d'ignorer ce qui se passe autour d'eux, mais de faire quand même ce qu'ils considèrent avoir à faire. Jacob va continuer à apprendre, à étudier, même si les résultats de ses recherches seront détruites. Nora va imaginer ses scénographies et mises en scène, même si certaines seront très vite retirées de la scène, voire jamais jouées. Mais l'essentiel est que tout cela a été fait, pensé, que le faire les a enrichi, leur a permis de se réaliser. Nous sommes dans un milieu intellectuel et artistique, et penser et créer donne sens à leur vie. Mais au-delà, c'est leur capacité à tirer plaisir des moments de bonheur que l'existence leur offre, plus ou moins parcimonieusement, qui est essentielle. Un refus de ressassement, de victimisation, de juger les autres, qui ont fait plus de compromissions, qui ont choisi un parcours moins inconfortable à priori.

Un très beau livre, très sensible et intelligent, très romanesque et très réflexif à la fois. Un immense plaisir de lecture.
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Je ne croyais jamais dire ça un jour en refermant un livre mais ....ouf, je suis arrivée au bout!

Non que ce livre de grande qualité m'ait déplu au point de l'abandonner, non. Je crois plutôt que c'est la montagne de culture (sans connotation péjorative de ma part) qui me laisse pantoise et me rappelle ma condition de larve inculte.

Ce foisonnant roman basé sur l'histoire de la famille de Ludmila Oulitskaïa est un très bel hommage à la culture russe : sa musique, sa littérature, son théâtre. J'ai effectivement pris un revigorant bain de culture grâce aux échanges intellectuels de cette jeunesse juive exaltée par les études et la connaissance qui s'ouvraient à eux au début du XXème siècle. La correspondance entre Jacob et Maria est passionnante et rappelle que l'époque sans Messenger avait un charme fou !

J'ai aussi pris beaucoup de plaisir à suivre Nora dans son travail de scénographe de théâtre dans les années 70. Au réalisme socialiste atterrant, pitoyable et candide, elle oppose le sens artistique et l'esthétisme du théâtre russe.

Appréciable également, cette volonté de l'auteure de mettre au centre du récit l'audace, la détermination et les difficultés des femmes russes de s'émanciper que ce soit au début ou à la fin du XXème siècle parce que "du point de vue biologique il ne pouvait être question d'égalité, puisque la nature a donné pour rôle à la femme celui de perpétuer l'espèce, de mettre les enfants au monde et de les allaiter, ce qui la prive de la possibilité de s'épanouir pleinement".

Cependant, qui trop embrasse, mal étreint et à force de vouloir donner un panorama très exhaustif d'une Russie culturelle et politique de 1920 à nos jours, elle m'a perdue en chemin, noyée sous les personnages auxquels j'ai fini par ne plus m'attacher.

J'ai conscience que c'est un très bon roman mais malheureusement, je pense que, pour moi, l'échelle était un peu trop raide.
Lien : https://belettedusud.wixsite..
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Ludmila Oulitskaïa se décrit comme un écrivain passeur de lumière, pour éclairer les liens qui existent entre les êtres au-delà de l'échelle du temps. Elle affirme également volontiers sa passion pour les destins de femmes, droites, courageuses et déterminées.

Ce dernier roman s'inspire de la correspondance de ses grands-parents pour dessiner un arbre généalogique de quatre générations durant le douloureux XXe siècle russe.

Les époques se mêlent et tissent les liens entre Jacob et Maroussia, au parcours amoureux chaotique depuis l'aube de la révolution de 1917, et leur petite fille Nora, artiste indépendante, mère (quasi) célibataire, amoureuse libre de ses choix.

L'Histoire est une toile de fond qui se fait discrète en dépit de son implication essentielle dans les destins individuels. J'avoue d'ailleurs avoir été un peu frustrée de cette distance politique.

L'auteur cherche plutôt à mettre en avant les questions personnelles comme l'amour, le mariage, la maternité, l'éducation, l'indépendance de la femme, la vieillesse et la maladie. La trame narrative s'appuie sur les avancées intellectuelles, culturelles et scientifiques. Et la focale pointe vers la compréhension du passé pour se projeter vers un avenir possible, en se délestant d'années douloureuses d'amnésie sociale.

Un dernier roman à mi-chemin entre la fiction et l'autobiographie, un livre militant, aux figures féminines fortes, à l'intelligence de coeur et d'esprit, à l'aisance de plume. Ludmila Oulitskaïa s'affirme vraiment comme la grande dame des Lettres russes contemporaines.
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Saga familiale qui s'étend du début jusqu'à la fin du XXè siècle en URSS, Russie. Chaque personnage principal, nous fait vivre une période de l'histoire soviétique. Nora, petite-fille de Jacob Ossetski, homme érudit, et de Maroussia Kerns, danseuse et féministe, découvre à la mort de sa grand-mère, la relation épistolaire qu'entretenait ses grands-parents. Les nombreuses lettres permettent de connaître l'amour, les doutes, les malheurs de quatre générations … Histoire inspirée des grands-parents de l'auteure.

Gros et long Bouquin (624 pages) que j'ai lu lentement et qui m'a inspiré un “ouff” lorsque je l'ai enfin terminé. Ce n'est pas que le roman est inintéressant mais, les noms russes sont très difficile à retenir et, de plus, chacun avait un surnom donc … je me suis souvent référé à l'arbre généalogique au début du livre afin de me retrouver. La traduction est bonne, l'histoire aussi mais … peut-être que la littérature russe n'est pas pour moi ?

“ - (...) je ne comprends pas ce que c'est que cette échelle de Jacob dont tu parles …
- (...) le songe du patriarche Jacob près de Béthel ! Il a vu en rêve une échelle avec des anges qui montent et qui descendent, et depuis le haut de l'échelle, Dieu lui dit quelque chose du genre - voilà, tu es couché ici, et je t'informe que la terre sur laquelle tu roupilles t'est donnée, je te bénis toi et toute ta descendance, et à travers toi toutes les autres tribus.”

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critiques presse (1)
LeDevoir
07 août 2018
Une fresque vivante qui, sans peut-être les égaler, s’inscrit dans la veine puissante de Vie et destin de Vassili Grossman et d’Une saga moscovite de Vassili Axionov.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
Citations et extraits (76) Voir plus Ajouter une citation
« Tchekhov ... méprisait le monde ancien, et il redoutait le monde à venir. La souffrance des habitants de la cerisaie est enjolivée. Une autre souffrance – nue, éreintée, affamée, mais active et agissante –, se transformera en quelque chose de nouveau et de jamais vu, qui surpassera toutes les utopies des premiers socialistes, de Thomas More à Tommaso Campanella. Tout a été pensé et élaboré bien avant Marx. Je pense que dans cent ans, quand la culture humaine aura atteint un niveau inimaginable, on regardera Tchekhov, dans les théâtres, comme un monument sublime à un monde révolu. Mais ses pièces constituent un pas indispensable vers quelque chose de plus grand et de meilleur… 
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Elle connaissait tous ces livres, tous jusqu’au dernier. Ils avaient été lus, et lus à fond. Aujourd’hui encore, Nora terrassait les ignorants par la profondeur de sa culture, et toute cette culture provenait de ces deux cents livres sélectionnés comme pour une île déserte, criblés de minuscules remarques au crayon dans les marges. Depuis la Bible jusqu’à Freud. Oui, une île déserte. En réalité, cette île était on ne peut plus habitée – des troupeaux de punaises y paissaient à loisir. Elles dévoraient Nora quand elle était petite, mais sa grand-mère, elle, ne les remarquait pas. À moins que ce ne fût l’inverse… 
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Quand elle était encore petite, la fille de Marina avait demandé à sa mère : « Pourquoi les Russes, ils ont tous des dents pourries et les cheveux sales ? »
Tchipa aurait pu répondre à cette question, mais elle n’avait rien dit. Il aurait fallu expliquer trop de choses. Que chaque pays a ses propres habitudes culturelles – les Américains changent de tee-shirt deux fois par jour et se lavent dès qu’il y a une douche dans les parages, tandis que depuis des générations, les Russes se lavent une fois par semaine aux bains, le samedi, et changent de linge à cette occasion. Que beaucoup d’entre eux vivent dans des appartements communautaires sans salle de bains… Et aussi que chaque enfant de leur âge, même au fin fond de la Russie, lit en un an plus de livres que son frère et elle n’en avaient lu durant leur vie entière, que chaque adulte convenable connaît par cœur plus de poèmes qu’un professeur de littérature ici… 
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Et en russe, ça donne quoi ?
— En russe, Nora, ça donne : un homme réduit à lui-même – c’est un pauvre animal, un bipède tout nu ! Et c’est tout ! Se débarrasser de l’inutile ! À bas tout ce qui est superflu ! »
Là, Nora se couvrit les yeux de la main. Elle connaissait ce texte. Elle le connaissait très bien. Mais soudain, ces mots, « se débarrasser de l’inutile », lui semblèrent follement importants pour elle, personnellement. C’est toujours ainsi que cela se passe – on vit, on lit, on glisse cent fois sur le même passage, et tout à coup, c’est comme si nos yeux se dessillaient, on trouve ce qu’on a cherché pendant des années à l’endroit le plus rebattu, sur lequel on est déjà passé et repassé… 
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Un article de critique littéraire ne doit pas porter de jugements. Un critique n’est pas un juge. C’est un commentateur, un objecteur, un continuateur ou un sociologue des idées de l’écrivain. Il faut d’autant moins l’encenser. Ce défaut existe : « Une tête magnifiquement campée… une voix d’une grande richesse… un écrivain extraordinaire (deux fois)… d’une grande importance… une maîtrise exceptionnelle (!)… des essais remarquables… un écrivain qui concilie tous les genres...
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Vidéo de Ludmila Oulitskaïa
Eurasieexpress Réflexion à haute voix : "La Lecture est un exploit", aux Journées du Livre russe à la Mairie du Vème arrondissement de Paris le 9 février 2020. Cette réflexion constitue une partie du prochain livre d'Oulitskaia, à paraître cette année.
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