AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Une histoire d'amour et de ténèbres (102)

Voilà comment Raskolnikov pourrait atténuer un tantinet la turpitude et l'isolement dans lequel chacun tient son prisonnier intérieur, sa vie durant. Les livres auraient donc le pouvoir de vous consoler un peu de vos terribles secrets ; pas seulement vous mon vieux, mais nous aussi qui sommes dans le même bateau ; personne n'est une île, mais plutôt une presqu'île, une péninsule, cernée presque de toutes parts par des eaux noires et rattachées aux autres presqu'îles par un seul côté.
Commenter  J’apprécie          501
L'Europe était à leurs yeux la terre promise défendue, le lieu nostalgique des clochers, des vieilles places pavées, des tramways, des ponts, des flèches de cathédrales, des village perdus, des sources thermales, des forêts, des prairies enneigées.
Des mots tels que "chaumière", "pré", gardeuse d'oies" m'ont fasciné et ému toute mon enfance. Ils avaient le parfum sensuel d'un monde authentique, paisible, loin des toits de tôle poussiéreux, des terrains vagues envahis par la ferraille et les chardons, et des talus arides de Jérusalem, suffoquant dans la chaleur de l'été incandescent. Il me suffisait de murmurer "pré" pour entendre le meuglement des vaches avec leurs clochettes autour du cou et le chant des ruisseaux. En fermant les yeux, je voyais la gardeuse d'oies aux pieds nus, sexy à pleurer, bien avant que j'y entende quelque chose.
Commenter  J’apprécie          261
On savait bien sûr à quel point c'était dur Israël : qu'il y faisait très chaud, qu'il y avait le désert, les marais, le chômage, des Arabes pauvres dans les villages, mais on voyait sur la grande carte accrochée dans la classe que les Arabes n'étaient pas nombreux, peut-être un demi-million, moins d'un million en tout cas, on était sûr qu'il y avait assez de place pour quelques millions de Juifs de plus, que les Arabes étaient peut-être simplement excités contre nous, comme les masses en Pologne, mais qu'on pourrait leur expliquer et les convaincre que nous serions une bénédiction pour eux, sur le plan économique, médical, culturel, etc. Nous pensions que dans peu de temps, quelques années au plus, les Juifs seraient une majorité dans le pays – et que nous donnerions immédiatement au monde entier l'exemple de ce qu'il fallait faire avec notre minorité opprimée, nous traiterions naturellement la minorité arabe avec justice et intégrité, avec bienveillance, nous les associerions à notre patrie, nous partagerions tout, nous ne les changerions jamais en chats. C'était un beau rêve. 
(page 326)
Commenter  J’apprécie          30
Tu sais qui était le cardinal Richelieu ? Peu importe. Tu me le diras la prochaine fois, ou pas. A mon âge, je me moque éperdument de mourir sans avoir le grand honneur de savoir qui était le cardinal Richelieu. Des cardinaux, il y en a des tas, et ils détestent pratiquement tous notre peuple. 
(page 312)
Commenter  J’apprécie          20
Peut-etre que quelque chose des promesses de l'enfance etait gangrene par une sorte de croute infecte, une croute romantique et toxique associant les muses et la mort? [...] A moins qu'il n'y eut une note bourgeoise-slave, une note melancolique que, quelques annees apres la mort de ma mere, j'ai retrouvee entre les pages de Tchekhov et de Tourgueniev, dans les recits de Gnessin et, dans une moindre mesure, dans les poemes de Rachel egalement. Quelque chose qui avait incite ma mere, la vie n'ayant tenu aucune des promesses de sa jeunesse, a se representer la mort sous les traits d'un amant passionne, protecteur et rassurant, un dernier amant, un amant musagete qui guerirait enfin les blessures de son coeur esseule?
Voila des annees que je traque ce meurtrier, ce vieux seducteur madre, ce mecreant degoutant, deforme par la vieillesse, deguise en prince charmant. C'est un ruse chasseur de coeurs brises, un seducteur vampirique a la voix douce-amere, telle la corde voilee d'un violoncelle, les nuits solitaires: un escroc onctueux, genial, un maitre en artifices, le joueur de flute d'Hamelin attirant derriere son manteau de soie les desesperes et les isoles. Le tueur en serie senile des ames decues.
Commenter  J’apprécie          230
Quantite de choses se sont passees a Jerusalem. La ville a ete detruite, reconstruite, a nouveau detruite et reconstruite encore une fois. L'un apres l'autre, des conquerants l'ont prise, gouvernee quelque temps, et puis ils ont laisse derriere eux des murs et des tours, des encoches dans la pierre avec une poignee de tessons et de documents avant de disparaitre. De s'evaporer comme les brumes matinales sur les pentes des collines alentour. Jerusalem est une vieille nymphomane qui presse ses amants comme un citron avant de s'en debarasser en baillant a s'en decrocher la machoire; une veuve noire devorant ses partenaires en pleine action.
Commenter  J’apprécie          201
Les documents qui se trouvaient ou ne se trouvaient pas là-bas on dû brûler une dizaine de fois, pendant l'occupation polonaise, celle de l'Armée rouge, puis à l'arrivée des nazis qui nous ont tous fusillés et jetés dans des fosses qu'ils ont recouvertes de sable. Ensuite, il y a eu encore Staline avec le NKVD, et Rovno est passée de main en main, comme un petit chien martyrisé par une bande de voyous : laRussie-laPologne-l'Allemagne-laRussie. Aujourd'hui, elle n'est ni à la Pologne, ni à la Russie mais à la République d'Ukraine, ou peut-être à la Biélorussie ? Ou à des mafias locales ? En fait, je ne sais pas à qui elle appartient aujourd'hui. Et ça m'est égal : ce qui existait a disparu et ce qui existe aujourd'hui ne sera plus d'ici quelques années. 
(page 310)
Commenter  J’apprécie          60
On pouvait aussi entrer par une porte latérale, à droite de la maison, en suivant un chemin de pierres rouges, extrêmement glissantes l'hiver, le long duquel poussaient six sirén', je ne sais pas comment ça se dit en hébreu, peut-être que ça n'existe pas chez nous. Ces arbustes donnaient de minuscules fleurs violettes au parfum si capiteux qu'on s'arrêtait exprès pour les respirer, au point qu'on en avait parfois le tournis et qu'on voyait des étoiles de toutes les couleurs dont je ne pourrai même pas te dire le nom. De toute façon, je pense qu'il existe beaucoup plus de couleurs et de parfums que de mots. 
(page 269)
Commenter  J’apprécie          90
Personne, disait ma mère, personne ne sait rien sur personne. Même pas son voisin. Même pas son conjoint. On ne sait rien. Et si l'on croit savoir malgré tout quelque chose, c'est encore pire, car il vaut mieux vivre dans l'ignorance que vivre dans l'erreur. Mais au fond, qui sait ? A la réflexion, il est peut-être beaucoup plus facile de vivre dans l'erreur que dans le noir. 
(page 267)
Commenter  J’apprécie          50
C'était dimanche, McTeague déjeuna comme d'habitude à deux heures de l'après-midi à la gargote des receveurs de tramways de Polk Street.
Commenter  J’apprécie          40






    Lecteurs (917) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Amos Oz (1939-2018) R.I.P

    Mon père parlait 11 langues, mais il a fait mon éducation en Hébreu, j'étais alors un « petit chauvin déguisé en pacifiste». Un «nationaliste hypocrite et doucereux », un « fanatique », qui jouait à la guerre et s’enflammait contre les Anglais et les Arabes, j'étais, j'étais, comme une panthère dans la .....?......

    Nuit
    Cave
    Tourmente
    Neige

    10 questions
    40 lecteurs ont répondu
    Thème : Amos OzCréer un quiz sur ce livre

    {* *}