AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Le château de ma mère (145)

Je repris ma route d'un pas assuré. Il se leva, remit le cou du sac sur son épaule, et se hâta pour me rattraper. Il passa devant moi, s'arrêta, me regarda une seconde et dit avec émotion:
- "Tu es formidable!"
Je pris aussitôt l'air formidable, mais je ne répondis rien.
Il me regardait toujours et dit encore:
- "Il n'y en a pas deux comme toi!"
Enfin, il me tourna et reprit la marche en avant...Cependant, dix pas plus loin, il s'arrêta de nouveau et, sans se retourner
il dit encore:
-" Il n'y a pas à dire: tu es formidable!"
Cette admiration stupéfaite qui flattait ma vanité me parut soudain très inquiétante, et il me fallut faire un effort pour rester formidable.
J'étais sur le point d'y réussir lorsqu'il me sembla entendre au loin, sur notre droite, comme une glissade dans la pierraille. Je m'arrêtai, je tendis l'oreille. Le bruit recommença.
Commenter  J’apprécie          104
Je demandai, d'une voix étranglée :
« C'est fini quand ?
- Il faut partir après-demain matin, dit mon père. Aujourd'hui, c'est vendredi.
- Ce fut vendredi, dit l'oncle. Et nous partons
dimanche matin.
- Tu sais bien que lundi, c'est la rentrée des classes ! » dit la tante.
Je fus un instant sans comprendre, et je les regardai avec stupeur.
« Voyons, dit ma mère, ce n'est pas une surprise ! On en parle depuis huit jours ! »
C'est vrai qu'ils en avaient parlé, mais je n'avais pas voulu entendre. Je savais que cette catastrophe arriverait fatalement, comme les gens savent qu'ils mourront un jour : mais ils se disent : « Ce n'est pas encore le moment d'examiner à fond ce problème. Nous y penserons en temps et lieu. »
Commenter  J’apprécie          40
[...] lorsque je vis au loin, en haut d'un remblai, une haie d'arbustes... Mon souffle s'arrêta et, sans en savoir la raison, je m'élançai dans une course folle à travers la prairie et le temps. Oui, c'était bien là, c'était bien le canal de mon enfance. [...] Je refis lentement le chemin des vacances, et de chères ombres marchaient près de moi. C'est quand je le vis à travers la haie [...] que je reconnus l'affreux château, celui de la peur, de la peur de ma mère. [...] Mais dans les bras d'un églantier, sous les grappes de roses blanches et de l'autre côté du temps, il y avait depuis des années une très jeune femme brune qui serrait toujours sur son cœur fragile les roses rouges du colonel. Elle entendait les cris du garde, et le souffle rauque du chien. Blême, tremblante, et pour jamais inconsolable, elle ne savait pas qu'elle était chez son fils.
Commenter  J’apprécie          50
Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d'inoubliables chagrins.
Commenter  J’apprécie          191
Cette messe, dit l'oncle, a été très belle. Il y avait une crèche immense, l'église était tapissée de romarins en fleur, et les enfants ont chanté d'admirables noëls provençaux du quatorzième siècle. C'est pitié que vous n'y soyez pas venu !

- Je n'y serais allé qu'en curieux, dit mon père, et j'estime que les gens qui vont dans les églises pour le spectacle et la musique ne respectent pas la foi des autres.
Commenter  J’apprécie          00
Mais il restait, cependant, quelques traces chasseresses de l'oncle Jules : il déclara qu'il viendrait chaque matin, sur sa bicyclette, pour tirer les grives, et qu'il redescendrait avant la nuit. Il le dit assez gaillardement, mais je vis bien qu'il eût préféré rester avec nous. Alors, pour la première fois, je compris que les grandes personnes ne font jamais ce qui leur plaît, et qu'elles sont bêtes.

En redescendant les escaliers, dans la pénombre, Paul tira la conclusion de ce désastre, et il dit, d'une voix égale :
« Moi, quand j'aurai des enfants, je les donnerai à quelqu'un. »
Commenter  J’apprécie          00
L'oncle regarda le ciel, et décréta:
« Il ne pleuvra pas et ce temps est parfait pour la chasse ! »
Lili me fit un clin d'œil, et me dit à voix basse:
« S'il fallait qu'il boive tout ce qui va tomber, il pisserait jusqu'à la Noël ! »
Commenter  J’apprécie          00
Après l'épopée cynégétique des bartavelles, je fus d'emblée admis au rang des chasseurs, mais en qualité de rabatteur, et de chien rapporteur.
Commenter  J’apprécie          20
Le jeudi après-midi, ma mère nous mena chez la tante Rose, pour savoir ce qu'elle avait décidé. Ce fut une grande déception: elle déclara qu'elle ne pouvait pas "monter à la villa", à cause du cousin Pierre, qui prenait une importance tout à fait injustifiée. Ce pompeur de biberons commençait à bavoter des sons informes, auxquels elle répondait de vraies paroles pour nous faire croire qu'il avait dit quelque chose. C'était un spectacle navrant.

De plus, devant ma mère émerveillée, elle retroussait les babines du petit animal, et nous montrant sur sa gencive un grain de riz, elle affirma que c'était une dent et qu'à cause de cette dent, elle craignait pour lui le froid, le vent, la pluie, l'humidité et surtout l'absence de Gaz.

(...)

Paul tira la conclusion de ce désastre, et il dit, d'une voix égale : "Moi, quand j'aurai des enfants, je les donnerai à quelqu'un."

(pp.112-113)
Commenter  J’apprécie          90
"Mais voyons, gros bêta, tu sais bien que ca ne pouvait pas durer toujours ! Et puis, nous reviendrons bientôt... Ce n'est pas bien loin, la Noël !"
Je pressentais un malheur.
"Qu'est-ce qu'elle dit ?
- Elle dit, répondit l'oncle, que les vacances sont finies !"
Et il se versa paisiblement un verre de vin.
(...)

C'est vrai qu'ils en avaient parlé, mais je n'avais pas voulu entendre. Je savais que cette catastrophe arriverait fatalement, comme les gens savent qu'ils mourront un jour : mais ils se disent : " Ce n'est pas encore le moment d'examiner à fond ce problème. Nous y penserons en temps et lieu. "

Le temps était venu : le choc me coupait la parole, et presque la respiration.

(pp.52-53)
Commenter  J’apprécie          140







    Lecteurs (20405) Voir plus



    Quiz Voir plus

    L'univers de Pagnol

    Quel est le nom de la mère de Marcel Pagnol?

    Marie
    Augustine
    Rose
    Il n'a pas de mère

    9 questions
    126 lecteurs ont répondu
    Thème : Marcel PagnolCréer un quiz sur ce livre

    {* *}