La lecture éveillait en moi le désir de parler, mais la conversation se déroulait surtout entre les livres eux-mêmes dans ma tête. Je remarquais parfois que les livres que je dévorais l'un aprés l'autre à cette époque se chuchotaient des choses entre eux ; que ma tête devenait ainsi une fosse d'orchestre où des instruments de musique résonnaient de toutes parts, et je réalisais que j'arrivais à supporter la vie grâce à cette musique qui m'emplissait la tête.
Je l'avais lu quelque part, la fortune n'est pas aveugle, elle est ignorante.
Sur la table couverte d'un feutre vert, j'aperçus le livre et le cahier, ouverts, des crayons, des gommes, un paquet de cigarettes, des bribes de tabac, une montre-bracelet, à côté du cendrier, des allumettes, une tasse de café qui avait refroidi. C'étaient là les outils qu'utilisait pour parvenir au bonheur un malheureux condamné à écrire toute sa vie vie durant!
Un jour,j'ai lu un livre, et toute ma vie en a été changée.
Un jour,j'ai lu un livre, et toute ma vie en a été changée.
Car si ce qui est écrit dans les livres était vrai, si la vie était telle que je l'avais lue dans ce livre, si un monde pareil était possible, pourquoi les gens allaient-ils encore à la mosquée, ou passaient-ils leur temps à bavarder ou à somnoler dans les cafés, pourquoi à cette heure-ci, tous les soirs, s'installaient-ils devant la télé pour ne pas crever d'ennui ? Voilà bien ce qui était incompréhensible.
Toutes ces choses que j'avais apprises, auxquelles j'avais cru jusque-là, n'étaient plus que des détails dépourvus de tout intérêt, et des choses que j'ignorais surgirent des recoins où elles s'étaient terrées jusque-là et me lancèrent des signaux.
L'important , c'est de pouvoir vivre de façon à conserver intacte la bonté naturelle de l'homme. .../...
Quand les gens regardent la nature, dit le docteur Lefin, ils y retrouvent leurs propres limites, leurs insuffisances, leurs craintes, et effrayés par leur propre faiblesse, ils l'attribuent à l'immensité,à la grandeur de la nature. .../...
Voilà pourquoi, cher lecteur, ne te fie pas à moi, qui ne suis pas du tout plus sensible que toi, ne te fie pas à mes souffrances, ni à la violence de l’histoire que je te raconte. Mais persuade-toi de l’impitoyable cruauté de la vie !