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EAN : 9782070113682
688 pages
Gallimard (31/08/2017)
4.11/5   328 notes
Résumé :
Comme tant d’autres, Mevlut a quitté son village d’Anatolie pour s’installer sur les collines qui bordent Istanbul. Il y vend de la boza, cette boisson fermentée traditionnelle prisée par les Turcs. Mais Istanbul s’étend, le raki détrône la boza, et pendant que ses amis agrandissent leurs maisons et se marient, Mevlut s’entête. Toute sa vie, il arpentera les rues comme marchand ambulant, point mobile et privilégié pour saisir un monde en transformation. Et même si s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (82) Voir plus Ajouter une critique
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Après la plage, rien de tel qu'un bon pavé pour s'évader et se déstresser, avant la rentrée. Et celui-ci n'est pas en reste question évasion, son souffle romanesque m'a plongé dans l'ambiance turque dès les premières lignes. Ça tombe bien, je garde un souvenir impérissable de la Turquie (il y a 20 ans certes), et d'Istanbul, cette ville cosmopolite et grouillante, si folle et si charmante.

Roman épique et foisonnant où s'entremêlent tout à la fois culture, histoire, politique et évolution de la société turque, où l'on peut voir se bâtir des bidonvilles sur des collines d'Istanbul qui deviendront rivales, où l'on suit les déambulations de Mevlut aux multiples métiers, mais vendeur de boza dans l'âme : «Il sentait que le monde intérieur qui l'habitait et la rue qu'il arpentait la nuit en vendant de la boza formaient désormais un tout. Cette connaissance étonnante lui apparaissait parfois comme sa propre découverte ou bien comme une lueur, une lumière que Dieu lui avait accordée à lui seul.».
Un héros ordinaire au profil ancré dans la réalité, à la recherche simple de bonheur, attachant et empreint de naïveté. L'on fait sa connaissance lors du premier chapitre, surpris qu'il est de découvrir que la fille qu'il est en train d'enlever pour l'épouser n'est pas celle à qui il a cru envoyer tant de lettres enflammées, depuis des années. Une habitude dans ce pays, l'enlèvement d'une douce par son amoureux, quand celle-ci s'oppose aux désirs de son père, ou que la dot est trop importante pour le prétendant. La suite du récit remontera le cours de la vie de Mevlut depuis 1968, pour aller au delà, en 2012.
L'écriture au long cours et au rythme lent invite le lecteur à choisir un bon fauteuil, pour prendre son temps. La narration s'y singularise par une polyphonie aux tonalités parfois inédites: les différentes voix des protagonistes peuvent s'opposer, se contredire, ou enrichir le point de vue général et omniscient, attaché aux pas de Mevlut. Un peu comme si les différents personnages prenaient corps autour de la table de l'écrivain pour élever leur voix, et intervenaient dans le récit pour donner leur avis au lecteur. Cela rend le récit vivant, alerte et rythmé. Largement de quoi rendre le pavé plus léger.
Mais le vrai tour de force de cette saga à l'écriture simple, c'est qu'il nous plonge sans retenue dans la société turque (enfin le tour de force est relatif, il y a quand même un prix Nobel derrière). On ne la lit pas cette saga, on la respire et on la vit. J'ai été avec Melvut, sa famille, ses amis et ses emmerdes depuis le début. le genre de bouquin qui fait hésiter avec ses 6OO et quelques pages, mais on peut finir par regretter qu'il n'y en ait pas un peu plus.
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J'ai bien cru que je ne viendrais jamais à bout de ce pavé, et pourtant je m'en serais voulu de passer à côté. Quelle somme de travail, quelle fresque, monsieur Pamuk !

L'auteur justifie pleinement son prix Nobel de littérature avec ce nouveau roman (paru en 2014 mais traduit en Français cette année, merci Gallimard). Un roman qui va bien au-delà du simple récit pour tendre à la fois vers la chronique, le roman historique et la biographie d'un genre nouveau, celle d'une ville, d'une capitale, d'un centre névralgique : Istanbul.

Pour s'en convaincre, et avant même de débuter la lecture, il suffit de lire attentivement le titre complet du roman : "Cette chose étrange en moi. La vie, les aventures, les rêves du marchand de boza* Mevlut Karatas et l'histoire de ses amis, et tableau de la vie à Istanbul entre 1969 et 2012, vue par les yeux de nombreux personnages". Rien que ça. Donc, vous êtes prévenus, il s'agit d'un roman choral où pas moins d'une dizaine de narrateurs se succèdent, parfois en l'espace de quelques phrases. Voici mon seul vrai "reproche" : bien que n'ayant pas de problème particulier avec le narration polyphonique, le fait que seule celle de Mevlut, le personnage principal, soit impersonnelle alors que toutes les autres utilisent le "je narratif" m'a perturbée et n'a pas facilité mon immersion dans un univers pourtant fascinant. Ajoutez à cela une chronologie des événements qui tarde à se mettre en place, et des noms propres turcs difficiles à prononcer ou à retenir pour qui ne parle pas turc, je dois avouer que j'ai "galéré" avec les 250 premières pages, soit à peu près un tiers du roman.

Mais j'ai très bien fait de m'accrocher car une fois totalement immergée dans le bouillonnement d'Istanbul, une fois mes repères géographiques posés, une fois mon intérêt et mon affection attachés aux personnages des familles Aktas et Karatas, c'est allé comme sur des roulettes et je n'ai plus goûté que la beauté de la langue (chapeau à la traductrice), la magie des ambiances et l'authenticité du voyage intime proposé par l'auteur.

Bien plus qu'un roman, disais-je, "Cette chose étrange en moi" est un témoignage politique, sociologique, culturel et ethnologique d'une grande puissance. Ce n'est sans doute pas un hasard si Orhan Pamuk a défendu en 2013 le mouvement protestataire turc puis a écrit ce roman mettant à l'honneur un simple marchand ambulant de yaourt et de boza*, une figure tutélaire d'Istanbul (sa ville natale). Une façon, à mon avis, d'adresser un message fort à chaque Turc, humble ou puissant, pour lui révéler par un regard à la fois objectif et tendre les bouleversements profonds qui ont construit ou déconstruit la Turquie, et de lui montrer d'où il vient, de le questionner sur où il va. Orhan Pamuk, s'il avait été essayiste plutôt qu'écrivain, aurait pu intitulé son oeuvre "De l'importance des conséquences des flux migratoires", un sujet d'actualité, n'est-ce pas ?

Mais l'auteur ne se contente pas de décrire les situations du quotidien pendant presque quarante ans, le style n'est pas du tout journalistique mais bien romanesque. A partir de deux familles étroitement liées par les mariages et les cousinages, l'auteur déploie toute une gamme de sujets anodins ou graves, des petits boulots et des cancans de cuisine aux mariages des adolescentes, en passant par l'urbanisation, les mafias, les conflits d'intérêts, les guerres, l'occidentalisation... C'est véritablement le pouls d'Istanbul que renferment les nombreuses pages de son roman. J'ai eu la sensation de replonger dans l'atmosphère tendue de l'excellent film de Deniz Gamze Ergüven, "Mustang", qui mettait le doigt sur l'écartèlement de la Turquie entre émancipation et traditions.

Un grand roman, un précieux témoignage.


*Boisson fermentée faiblement alcoolisée

Challenge Nobel
Challenge Petit Bac 2017 / 2018
Challenge PAVES 2017
Challenge ATOUT PRIX 2017
Challenge AUTOUR DU MONDE
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Voici une vaste fresque foisonnante que l'auteur nous livre aussi bien documentaire que sociale, familiale et politique, à travers les apprentissages, la vie, les amours, les rêves, les modestes ambitions d'un humble vendeur de rues à Istanbul : Melvut Karakas , ce qui donne un côté plaisant , frais et romanesque au récit !

L'auteur se penche avec talent et une bonne dose de travail sur l'histoire, le paysage, le souffle d'Istanbul, un portrait tout en mouvement où le temps s'écoule de 1968 à 2012 et la mégapole qu'elle est devenue ! Une Turquie moderne et contemporaine !
Attention: existent et accompagnent le roman, ajouté à la somme des pages et l'épaisseur , un arbre généalogique, un index, une chronologie qui pourraient rebuter nombre de lecteurs.......
Malgré tout, dès que nous faisons la connaissance de Melvut, un personnage sympathique, gai , naïf, transformé en portefaix, chargé de yaourt et de riz pilaf, friandise chère aux stambouliotes, et de boza, boisson fermentée , vendeur de rues avec son père, après un rapide passage au lycée , nous sommes conquis par son optimisme, sa capacité après une enfance rurale (il est arrivé à 12 ans à Istanbul ) , à connaître sur le bout des doigts la géographie de la ville , ses odeurs, son atmosphère , sa peur viscérale des chiens .

Beaucoup d'anecdotes familiales et des personnages multiples truffent le récit de détails domestiques qui dessinent le portrait de la ville et de ceux qui y vivent .

Au début du roman, Melvut enlève la jeune fille qu'il désire épouser mais.........je n'en dirai pas plus .

On découvre au fil du récit le nouveau visage d'Istanbul, nouveaux quartiers, nouvelles mœurs, irruption de l'Islamisme .......
Au final, un livre, genre grand roman d'apprentissage, dense, peuplé de personnages aux mille vies qui donnent corps et âme , avec beaucoup de fraîcheur romanesque, à l'évolution de la Turquie depuis quarante ans, les mutations et les métamorphoses d'Istanbul, à travers les tribulations d'un humble vendeur de boza , dont le trait le plus caractéristique est de voir la vie du bon côté même dans ses plus mauvais jours , un optimisme que certains taxeraient de naïveté !

Un récit choral, épique et talentueux, chaleureux !
Ce n'est que mon humble avis, bien sûr ..

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Dans cette saga familiale aux accents de conte initiatique, notre héros est le veilleur de nuit qui aime la solitude de petites heures et la mélancolie plaisante du silence.
Il est le dépositaire de la résilience, de l'honneur, de la détermination de s'accrocher à certaines valeurs essentielles malgré tous les changements auxquels il sera mené à s'adapter.

Peuplée de personnages étonnants et ponctuée de descriptions somptueuses sur la Turquie des années 50 aux années 80, cette fresque aux accents magiques réussit à créer une réalité oubliée avec une précision et un sens de l'incarnation hors norme.

Avec une émouvante délicatesse, Orhan Pamuk pénètre pas à pas l'épaisseur du temps qui passe, faisant au passage se frotter quelques secrets, éveillant la question : avons-nous les moyens de vivre sans interroger l'univers, sans inquiéter les coeurs, sans chercher à contrarier la vérité ni l'ajuster ?

Ce récit permet de savourer les multiples facettes de l'écriture foisonnante d'Orhan Pamuk, de la poésie, de l'humour noir à l'ironie, en passant par l'allégresse du roman d'initiation.


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Ce roman est intense, haut en couleurs, et très bien écrit dans lequel on fait la connaissance de toute une famille et d'une ville : Istambul.

L'histoire démarre par une action en 1982 : Melvut enlève dans des conditions rocambolesques une fille dont il est tombé amoureux après avoir croisé son regard lors d'un mariage, et à laquelle il a écrit de nombreuses lettres avec la complicité d'un cousin. A -t-il enlevé la bonne personne ?

La famille est intéressante : Mustafa, le père de notre héros Mevlut a quitté son village d'Anatolie en même temps que son frère Hasan, et chacun aura un destin et des conditions de vie différents, la femme et les enfants resteront au village alors que toute la famille de Hasan viendra vivre avec lui, ce qui modifiera leur évolution dans cette immense métropole qu'est Istamboul.

Orhan Pamuk rend un vibrant hommage à Istambul, en restant toujours lucide. J'ai adoré me promener dans cette ville, dans les pas de Mevlut, la voir évoluer, sur plus de trente ans. Ce héros qui reste pur, parfois naïf, alors que règne la corruption, la roublardise est touchant même si on l'aimerait parfois plus énergique, mais il reste fidèle à ses valeurs.

L'auteur découpe son histoire en plusieurs périodes, entre 1969 et 2012, et il entrecoupe son récit pour donner l'avis des différents protagonistes, ce qui est original et affine les différents ressentis. de plus, il s'adresse souvent au lecteur, et l'emporte, le fait participer.

On imagine sans peine cet enfant qui arpente les rues avec sa perche, ses plateaux de yaourts ou de Boza en équilibre, bien trop lourd pour lui, criant « Boo Zaa », dans les pas de son père, vendeur ambulant. le coeur de Mevlut bat au rythme de celui d'Istambul, dont il connaît le moindre recoin et il y a une telle osmose entre eux qu'ils ne font plus qu'un.

La ville a changé durant toutes ces années, les collines se sont recouvertes de maisons construites sommairement, sans permis : on borne la nuit, on rajoute des étages de manière à rendre la destruction difficile et obtenir un permis de la mairie. On retrouve les mêmes « arrangements » avec l'électricité, les lignes sauvages…

Le statut de la femme est bien abordé : les mariages arrangés, les fugues pour pouvoir y échapper, les enfants pas toujours désirés, les difficultés de la vie de tous les jours… les personnages féminins sont très différents et ma préférence va à Rayiha qui s'épuise dans la préparation du pilaf que Mevlut va vendre dans les rues, tout en s'occupant de la maison, des filles, et dont la sagesse, le sens des réalités et la lucidité viennent contrebalancer la « naïveté » de son époux…

Orhan Pamuk décrit les coups d'état, la montée de l'intégrisme, le tremblement de terre mais ne cite et ne juge personne, c'est au lecteur de se forger son opinion. Il évoque les communautés qui ont dû fuir : les Grecs chassés de la ville en une seule nuit, ou le sort réservé au Kurdes, Alevis qu'on accuse d'avoir placé une bombe à la mosquée pour se livrer à des expéditions punitives…

Il m'a fallu une cinquantaine de pages pour bien entrer dans l'histoire et me familiariser avec les noms turcs : noms de famille mais aussi noms des quartiers d'Istambul, de certaines spécialités… et ensuite, l'immersion a été totale, je n'avais plus envie de le lâcher et je tournais les pages au ralenti pour faire durer le plaisir.

L'auteur nous facilite la tâche en nous proposant d'entrée un arbre généalogique des familles de même qu'un glossaire comprenant leurs noms et les pages les plus importantes qui leur sont consacrées ainsi qu'un récapitulatif chronologique mêlant l'histoire d'Istamboul à celle de la famille.

Je suis sortie subjuguée de cette lecture, littéralement envoûtée, tant l'écriture est belle, musicale, pleine de poésie. J'ai adoré ce roman et je pourrais en parler pendant des heures, tant les thèmes abordés sont riches et multiples. Conquise par cet écrivain, qui a reçu le Nobel en 2006, je vais continuer à explorer son oeuvre. Un seul regret, avoir attendu si longtemps…
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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critiques presse (6)
LeDevoir
04 octobre 2017
Dans son nouveau roman, Cette étrange chose en moi, l’auteur de 65 ans trace un portrait de sa ville natale, Istanbul. Sur quatre décennies. Jusqu’à 2012. « Tellement de choses sont arrivées depuis », déplore-t-il, évoquant au premier rang le coup d’État raté de juillet 2016.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
LaLibreBelgique
05 septembre 2017
Le Nobel 2006 livre un merveilleux opus sur la vie d’un humble marchand de boza. Par là, il retrace la mutation d’Istanbul et de la Turquie depuis 40 ans.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LeMonde
04 septembre 2017
Dans « Cette chose étrange en moi », le Prix Nobel de littérature rejoue l’histoire passionnée qu’il entretient avec la mégapole turque, à travers les yeux d’un cœur simple – l’un des Turcs qui ont porté les islamistes au pouvoir.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LaCroix
01 septembre 2017
Le nouveau roman d’Orhan Pamuk donne vie à un migrant d’Anatolie, qu’il plonge dans le tumulte d’Istanbul.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LePoint
14 août 2017
Un magnifique roman sur les métamorphoses d'Istanbul.
Lire la critique sur le site : LePoint
Liberation
31 juillet 2017
Orhan Pamuk livre avec Cette chose étrange en moi un impressionnant récit épique et choral, dostoïevskien.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (78) Voir plus Ajouter une citation
Faire descendre un panier pour les courses était un usage ancien datant d'une époque où il n'y avait pas d'ascenseurs, pas d'interphones, et où il était rare de construire des immeubles de plus de cinq ou six étages à Istanbul. En 1969, quand Mevlut faisait ses premiers pas comme marchand ambulant auprès de son père, les femmes au foyer, qui n'aimaient pas descendre de chez elles et qui désiraient acheter de la boza mais aussi du yaourt tout au long de la journée, et passer leurs commandes au commis de l'épicier, accrochaient une clochette sous les paniers qu'elles suspendaient au-dessus du trottoir pour que, sans bouger de leur domicile qui n'était pas équipé de téléphone, l'épicier ou le vendeur de passage soit alerté de la présence d'un client dans les étages. Pour signaler que le yaourt ou la boza était correctement placés dans le panier, le vendeur agitait la clochette.
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Abdurrahman Efendi "Quel genre de père es-tu ? Est même allée jusquà dire Vediha. A-t-on jamais vu un père briser un foyer, vendre sa fille pour prendre l'argent de la dot ? . La charge était tellement violent que j'ai pensé qu'il valait peut-être mieux faire comme si je n'avais pas entendu. Je n'ai pas pu "Honte à vous ! La souffrance que j'ai endurée toutes ces années,le mépris dont j'ai été l'objet, est-ce que j'ai supporté tout cela pour vous vendre et gagner de l'argent ? Si je l'ai fait, c'est pour vous trouver un bon mari, capable de vous faire vivre correctement. Le père qui réclame de l'argent à l'homme qui veut épouser sa fille veut juste récupérer les frais qu'il a engagés pour l'élever, pour l'envoyer à l'école, la vêtir et qu'elle devienne une bonne mère. Cette somme, elle montre quelle valeur le prétendant accorde à sa future épouse et en même temps, c'est le seul argent qu'on verse dans la société pour l'éducation des filles. Vous avez compris maintenant ? Dans ce pays, pour avoir un garçon et non une fille, tous les pères même les plus modernes, vont sacrifier des moutons, consulter des cheikhs pour qu'ils leurs fassent des rituels magiques, supplier Dieu de mosquée en mosquée.
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Ah, trouillard de Mevlut, ah. Il me regarde, et en même temps il fait comme s’il ne me regardait pas. Du coup, je l’ai regardé de mes yeux ensorceleurs comme si je voulais le « retenir captif », de même que je l’avais fait vingt-trois ans plus tôt lorsque nous nous étions croisés au mariage de Korkut, et conformément à ce qu’il avait écrit dans ses lettres. Je l’ai regardé pour lui « barrer la route et voler son cœur tel un brigand », pour que mon regard dilate son cœur et y sème l’abondance. Ensuite, je l’ai regardé pour qu’il se voie dans le miroir de mon cœur.
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…on a coutume de dire que le plus difficile dans un mariage arrangé, c’est l’obligation pour la femme non pas d’épouser, mais d’aimer un parfait inconnu… En réalité, épouser quelqu’un qu’elle ne connaît pas est sûrement ce qu’il y a de plus facile pour une fille, parce que plus on les connaît, plus c’est dur de les aimer, croyez-moi.

(p. 284)
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La maison était une bicoque de bidonville, un gecekondu. Son père utilisait ce terme quand il s’énervait contre l’aspect frustre et miséreux de cet endroit ; lorsqu’il n’était pas en colère – ce qui était rare -, il employait davantage le mot « maison », ce qui lui donnait l’illusion de refléter quelque chose de la maison éternelle dont ils seraient un jour propriétaires, ici, en ce bas monde, mais il était difficile d’y croire. Le gecekondu consistait en une grande pièce. Avec des toilettes attenantes – un trou au milieu du sol. La nuit par la lucarne sans vitre des toilettes, on entendait les hurlements et les bagarres des chiens des quartiers éloignés.
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Vidéo de Orhan Pamuk
Le nouveau roman "Les Nuits de la Peste" de l'écrivain turc Orhan Pamuk se présente comme le théâtre d'une grande fresque historique qui résonne avec l'actualité. La pandémie mondiale est venue donner une actualité poignante au roman qu'il écrivait depuis trois ans.
Son récit mêlant fiction et réalité raconte les ravages une épidémie de peste dans l'île fictive de Mingher en 1901, contrée de l'Empire Ottoman en déclin. Un livre à la croisée des chemins et des genres. Roman historique, roman d'amour et roman politique, ce livre vient interroger notre rapport à la fiction et au réel, l'imaginaire se mélangeant au réel, et le romanesque à l'historique. La véritable prouesse d'Orhan Pamuk consiste à jouer avec les codes de la fiction et à rendre la frontière poreuse entre l'histoire et la grande Histoire. Au milieu de ce drame humain et politique, l'amour est un refuge pour ceux qui se battent contre l'épidémie.
Orhan Pamuk nous livre une réflexion sur le pouvoir et la liberté, à l'heure où s'amorcent le délitement de l'Empire Ottoman et les conflits de succession entre sultans.
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