Eux [les "Monuments"] ce sont des modèles uniques qui sont nés sans mode d'emploi et en kit et qui ont dû se fabriquer seuls. Alors, bien sûr, ça donne des constructions très personnelles.
Parce que, quand il était à la maison, le truc du père avec nous, c’était de nous rendre tellement gros mes frères et moi qu’on ne pouvait plus sortir du lit. Et que le monde qui nous renvoyait le miroir de notre déchéance devienne inexplorable.
C’était important pour le père, eu égard à sa sécurité.
Il nous gavait avec tout ce qu’il pouvait trouver de plus gras. Sur chaque meuble, par terre, devant les portes de nos chambres, dans des sacs plastiques disposés çà et là, à tout moment, on trouvait de la nourriture : des quiches, des pizzas, des crèmes, des beignets ou des gâteaux en tout genre.
Alors, Didier a pris la parole :
"Tu ne peux pas mourir parce que tu dois nous écouter. Sinon le monde devient petit et les rêves ne s’accrochent pas aux pendules. Si tu ne m’écoutes pas je ne peux pas parler dans la bouche des députés à l’Assemblée nationale grâce au micro qui est caché dans ma télé. Si tu ne m’écoutes pas mon lit tangue comme un bateau la nuit pour me faire mourir. Et je ne veux pas mourir. Mais quand ça arrivera j’ai besoin que tu te souviennes de moi. Tu sais ? Pour parler de Didier ? Tu leur diras au monde que j’ai connu Elvis, Johnny, Just Fontaine, Chaban-Delmas, les Kennedy et tous les autres.Et puis tu rencontreras les chefs du couronne-ment français et algérien pour monter une école pour enfants handicapés à Constantine qui portera mon nom. Si tu ne m’écoutes pas je mourrai pour toujours au lieu de faire semblant.
Elle m’en a appris des choses, mon Elfe. Elle m’a fait faire des choses merveilleuses qui me faisaient très peur. Elle jouait de la harpe, elle voulait voir les étoiles, elle connaissait le nom des arbres et des fleurs. Je ne sais pas ce qu’elle n’aimait pas dans le monde sensible. Et elle m’a appris qu’il fallait vivre très vite avant que nos ailes se brisent.
Je l’ai senti dans l’air aussitôt. Un bruit imperceptible, ces bruits que font les rêves quand ils disparaissent tout d’un coup sans prendre la peine de s’estomper doucement, comme une bulle de savon qui éclate ou un os de fourmi qui se brise.
Je voudrais pas crever Avant d’avoir connu
Les chiens noirs du Mexique
Qui dorment sans rêver
Les singes à cul nu
Dévoreurs de tropiques
Les araignées d’argent
Au nid truffé de bulles
Je voudrais pas crever
Quand je disparais, ça ne veut pas dire que je n'existe plus, ou que tu n'existes plus.
Il y a toujours une fenêtre que je laisse ouverte pour que les Monstres puissent entrer.
J’ai déjà appris certaines choses, par-contre, depuis que je vis dans le Centre. Par exemple, il ne faut pas forcément dire la Vérité mais il faut apprendre à l’aimer. Pour pouvoir la transformer en autre chose.
Elle n'est pas prête pour la poésie, ma psychiatre.
Mais je ne peux pas lui en vouloir.
Ne devient pas fou qui veut.