AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Patsales


L'Académie royale espagnole a beau ne pas contester la mise à l'index de "L'Encyclopédie" de Diderot et D Alembert, elle se doit de posséder l'ouvrage dans sa bibliothèque. Perez-Reverte imagine donc le périple de deux admirateurs des Lumières françaises depuis Madrid jusqu'à Paris et retour, chargés de dégoter l'édition originale des 28 tomes et de les rapporter.
L'auteur est lui-même francophile et académicien; il va donc doubler les aventures de ses héros d'une mise en abyme à visée métalittéraire (au moins).
Ses héros se mettent en quête de l'Encyclopédie (mais l'édition originale est quasi-introuvable) ? Perez-Reverte fouille chez les bouquinistes et enquête auprès des spécialistes pour trouver ses informations.
Les faux grossiers sont légion ? Perez-Reverte s'invente une bibliographie fantaisiste et entremêle personnages fictifs et historiques.
Seuls les livres peuvent nous sauver de la barbarie (et encore, ce n'est pas sûr) ? L'hommage au rationalisme des philosophes se double d'un tribut à l'idéalisme mélancolique de Cervantes puisque Sancho Panza et Don Quichotte sont les modèles des deux académiciens voyageurs.
OK. So what? La prose de Perez-Reverte est suffisamment classique et élégante pour se glisser sans fausse note dans la bouche de personnages du XVIII°. Son érudition ne peut être mise en doute. Mais j'avoue avoir souri en lisant le passage suivant:
"Vous me rappelez ce froid géomètre qui, lassé d'entendre parler de Don Quichotte, se décide enfin à le lire et, à la fin du premier chapitre, s'exclame: mais qu'est-ce que ça démontre?"
Passage qui me paraît être une autocritique vicieusement muselée: Perez-Reverte nous interdit de penser que son livre ne sert à rien en nous suggérant que nous serions bien du genre à dénigrer Don Quichotte. Mais Perez-Reverte n'est pas Cervantes et j'insiste: je ne comprends pas à quoi sert son roman.
Pourtant, le thème à traiter affleure parfois grâce au personnage de l'abbé Bringas, futur compagnon de Robespierre : comment les Lumières ont-elles accouché de la Terreur? Ce qui, évidemment, nous forcerait à réfléchir sur la montée actuelle de l'irrationnel parmi la démocratisation du savoir ou de la nouvelle fureur religieuse au sein de la volonté mondialisée de jouissance.
Mais non, on en reste à un aimable récit languissant sur lequel je me suis assez souvent retrouvée à somnoler.
Mais il serait excessif de prétendre que j'ai perdu mon temps. J'avais entendu parler de "Thérèse philosophe", Perez-Reverte a eu l'amabilité de m'en fournir un extrait: "... j'avais saisi le trait, je le serrai légèrement dans ma main, qui lui servait d'étui, et dans laquelle il acheva de parcourir l'espace qui le rapprochait de la volupté."
Qu'en termes choisis ces choses-là sont dites! Je sens que je vais moi aussi me mettre en quête d'un livre interdit par l'Eglise...
Commenter  J’apprécie          386



Ont apprécié cette critique (35)voir plus




{* *}