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Critique de moustafette


La première partie de ce roman nous entraîne dans un petit port du Danemark de l'entre deux guerres où vit la famille Mogensen. Magnus, le père est un homme effacé devenu malgré lui menuisier à la ville alors qu'il se rêvait paysan comme ses parents. Marié à Inge, une bigote qui compose des cantiques sur son piano, ils ont deux enfants, Jasper et sa petite soeur, la narratrice, dont nous ne connaîtrons jamais le prénom.

Trois ans les séparent et une tendre complicité unit depuis toujours les deux enfants . Pendant que Jasper a pour seule ambition de devenir un prolétaire socialiste rêvant de rejoindre les Républicains espagnols qui luttent contre Franco, sa soeur, très bonne élève, n'a qu'un souhait, celui de partir loin de leur univers étriqué jusqu'en Sibérie.

L'adolescence ne fait que renforcer ce lien. Pendant que l'un rêve de partir au Maroc, l'autre s'imagine voyageant dans le Transsibérien. L'invasion allemande va précipiter les choses. Résistant, Jesper passera les deux dernières années de la guerre en Suède avant de concrétiser son rêve et de partir pour le Maroc. Copenhague, Stockholm, Oslo seront les étapes qui attendent sa soeur à la sortie de la guerre. Elle y vivra de différents petits boulots, toujours tenaillée par l'espoir de revoir son frère. Après ces temps confus, ils auraient dû enfin se retrouver au domicile familial. de cette cruelle absence au rendez-vous découle sans doute ce prénom jamais cité, la soeur reste à jamais amputée d'une immense partie d'elle-même.

Voilà un joli roman d'apprentissage, celui d'une petite fille marquée à jamais par la personnalité intrépide de son frère et par le trouble attachement qui la lie à lui. La narratrice se rémémore par petites touches les moments clefs de leur enfance jusqu'à leur séparation. Loin d'être une histoire fouillée, ce qu'on pourrait regretter, le tableau s'apparente plus à une séries de fondus enchaînés qui se jouent de la chronicité pour ne retenir que les émotions et les sensations qui ont accompagné les principaux événements des enfants Mogensen.
On passe de la naîveté enfantine à l'audace adolescente, de l'insouciance à l'émancipation politique ou amoureuse, du futile au drame, sans pesanteur ni sentimentalisme, grâce à un subtil mélange d'humour et de nostalgie. Et çà et là, on croise au détour des pages quelques beaux noms de la littérature, Andersen, Ibsen, Stig Dagerman, Hemingway, Malraux.

Une pudique déclinaison du lien frère-soeur et un sobre et un beau portrait de femme. Une fille qui aime les livres et rêve de Sibérie et de Transsibérien ne pouvait me laisser indifférente !
Jusqu'en Sibérie est un des premiers romans de l'auteur et préfigure le thème de prédilection qui semble marqué l'oeuvre de Per Petterson. J'avais déjà beaucoup apprécié l'atmosphère de "Pas facile de voler des chevaux".
Le titre du dernier roman de l'auteur parle de lui-même - Maudit soit le fleuve du temps - et vient de sortir en poche. Il attend sagement dans ma pile.

Lien : http://moustafette.canalblog..
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