Seules les fées suivaient leur propre mode, une mode de drapés souples et d'étoffes légères qui habillaient à peine des corps longilignes. Elles allaient tête nue, belles et pleines de grâce hautaine, les cheveux libres ou retenus en une lourde natte qui leur caressait les reins. On les regardait passer. Elles ne voyaient personne.
La mémoire est un ciment solide. Si solide et durable que la nostalgie survit parfois longtemps à l'amitié. Elle peut même s'y substituer et nous tromper. Combien de fois nous sommes-nous aperçus trop tard que rien ne nous attachait désormais à tel ou telle, sinon le souvenir d'une époque évanouie ? Quand cette idée frappe, douloureuse, le temps paraît faire un bond et nous nous découvrons subitement face à un étranger que les hardes de sentiments défunts ont cessé de déguiser. Cela, plus que les ans, fait que l'on vieillit. L'âge est le catalogue de nos désenchantements intimes.
Originaires de l’OutreMonde, les chats-ailés ne se contentent pas de parler. Ils sont savants, qualité qu’ils doivent à une longévité exceptionnelle et à une capacité unique : ils s’imprègnent de la matière des livres sur lesquels ils dorment. De la matière des livres ou des journaux, ou encore de tout écrit, imprimé ou non, correspondance comprise.
À ses yeux, une chance, même infime, de secourir autrui compte plus que la presque certitude de laisser sa peau dans l'entreprise. Il me semble que c'est une assez bonne définition du vrai courage.
- On ne se console jamais vraiment de rien. On supporte, on pardonne où on oublie, c'est tout.
Les bibliothèques sont des rêves.
Rêves de ceux qui les ont voulues et bâties. Rêves de ceux qui les fréquentent et les aiment. Rêves enchâssés en des milliers et des milliers de pages préservées. Rêves puisés à la source des désirs et des sciences, des imaginations fertiles, des ambitions, des lectures patientes, des nuits passées dans le secret des livres. Elles sont des portes vers le Troisième Monde. Certaines ne font que l'approcher, le frôler, apercevoir ses confins. D'autres les rejoignent puis s'éloignent au gré des astres et de leur caprice. Quelques-une, enfin, les lus belles et les plus émouvantes, appartiennent entièrement à l'Onirie.
Qu'on le prenne ou qu'on l'accorde, disposer du temps d'autrui est l'expression d'un pouvoir, d'une contrainte qui établit un rapport hiérarchique flagrant : le temps asservi est toujours une liberté confisquée.
Toutes les guerres ont leurs exploiteurs que les belligérants se promettent de punir un jour et qui, la paix revenue, s'avèrent trop puissants pour être inquiétés.
La vie est une tragédie dont il est permis de rire.
Il n'y a pas plus agaçant que ces intuitions de savoir quelque chose qui nous échappent dans l'instant. Cela fait comme une démangeaison à la mémoire et gratter ne sert à rien.