Fabrice Pichon est un artisan du polar. Il est de ceux qui rendent hommage aux racines de ce style littéraire, sans vivre dans le passé pour autant.
Fabrice Pichon est un artisan de l'écriture. Sa plume est soignée sans tomber pour autant dans la démonstration.
Fabrice Pichon est un artisan spécialisé dans la sculpture de personnages. Il prend grand soin à leur donner visage humain.
Retours amers débute à la mer et en haut d'une citadelle (et très vite en bas aussi…). le lecteur a donc la chance de respirer les embruns bretons et le bon air du Doubs. Que ça fait du bien aux poumons d'être loin de la pollution.
Quoi que, la pollution peut également être dans les têtes et les esprits. Personnages pollués par leurs passés, leurs secrets familiaux, les ombres qui obscurcissent le présent.
C'est le troisième polar à mettre en scène la commissaire Marianne Bracq (actuellement en disponibilité). L'enquête repose sur deux crimes que l'auteur joue à rendre particulièrement horribles. Il compose aussi son récit en intégrant ses enquêteurs au sein même de l'intrigue.
Point de hasard (comme le dit
Danielle Thiéry dans la préface), tout est lié. le personnel se fond dans le professionnel, l'intime se dissout dans la vie publique. Tenter de changer de vie, de changer sa trajectoire qui a été déviée par un malheureux événement. Essayer de changer le désespoir en un semblant d'espoir.
Ce n'est pas tant l'enquête en elle même qui m'aura séduite, mais bien les personnages. le polar traditionnel n'est pas ce que je préfère, mais le soin qu'a pris
Fabrice Pichon à dessiner ses protagonistes m'a notablement touché.
Parce qu'on peut décrire des meurtres atroces tout en faisant preuve d'une belle sensibilité à brosser des portraits de femmes et d'hommes qui gravitent autour. Marianne Bracq est un sacré petit bout de femme d'ailleurs. Qu'on la connaisse déjà ou qu'on la découvre ici, difficile de rester indifférent à sa personnalité et à son sort.
Et il y a aussi cette écriture agréable et fignolée. Classique parfois, mais qui se permet quelques envolées aussi imprévisibles que fascinantes (comme cette scène assez incroyable qui mélange amour et mort).
Retour amers est un polar traditionnel, qui vaut surtout pour son humanité. Ce n'est pas un ingrédient si commun de nos jours. de quoi donner envie de retourner dans l'univers de
Fabrice Pichon sans amertume aucune.