Il est de ces romans dans lesquels il est difficile de se plonger. Il est de ces histoires avec lesquelles il est compliqué d'adhérer, d'avancer. On ne parvient pas à s'attacher ni aux personnages, ni aux situations, ni mêmes aux douleurs qu'ils portent.
Il est de ces romans pour lesquels il faut se brusquer, se bousculer, se faire mal. Il est de ces romans pour lesquels il faut un peu se forcer.
Comme tous les après-midi fait parti de ces romans dans lesquels j'ai eu du mal à me plonger. Je lisais sans vraiment comprendre le but, l'objectif recherché par l'auteur, par la plume. J'avais du mal avec le style simple mais si répétitif. Je me suis demandé si mon incompréhension, mon recul, mon rejet n'était pas lié à la traduction. Il faut dire que c'était une première pour moi, la littérature persane. Et puis finalement non, ça ne pouvait pas être ça.
Il y a des livres que l'on aime pas, que l'on aime moins. Et tant mieux. On ne peut pas apprécier tous les styles, tous les genres, toutes les histoires. Il en faut pour tout le monde ; tous les goûts sont dans la nature après tout.
Mais s'il y a une chose que je n'aime pas ; c'est de ne pas finir un livre. Qui a le droit de juger un livre sans avoir fini, sans avoir saisi le sens, sans avoir été au bout de l'histoire, sans avoir seulement essayer... sans avoir lu la dernière page, la dernière ligne, le dernier mot. Alors j'ai lu, j'ai continué.
Et pourtant, bien souvent, en se faisant un peu mal, on découvre une fêlure, un sentiment, un passage qui nous emporte, nous transporte. Parfois, un événement, parfois un changement de style, parfois la découverte d'une nouvelle histoire. Une histoire dans l'histoire. Un petit rien qui change tout et qui fait du bien.
Il est peut être temps de dire que ce roman n'en est pas vraiment un. Il s'agit d'un recueil de nouvelles. Comme un panier que l'on aurait empli d'histoires ; différentes les unes des autres et parfois si semblables. Comme un coffret dans lequel on enferme des secrets, des babioles que l'on aime, des souvenirs.
De courtes histoires narrant une à une la vie de femmes que l'on nomme parfois, auxquelles on s'identifie souvent, qui sont en quête d'indépendance, de liberté toujours.
Mon incompréhension et les "a priori" s'expliquent surement par la forme, le genre du livre que Zoyâ propose. Un recueil de nouvelles présente, par essence, différentes histoires qui plairont plus ou moins. Selon ce qu'elles dégagent, racontent ou ce à quoi elles invitent. Je n'ai juste pas saisi le sens ni la mesure des quelques premières histoires.
Me voilà donc perdu entre les lignes, parfois contrainte de devoir relire un passage plusieurs fois pour le comprendre, jusqu'à cette fêlure.
J'arrive page 99 difficilement, espérant vite arriver au bout de ce livre. Mais là, j'entrevois enfin autre chose. Je passe à la nouvelle suivante : " Mme F. est une femme heureuse ».
J'apprécie cette nouvelle. Je trouve une histoire qui me plaît, qui me parle et me captive. J'aime cette histoire, cette femme, cette fragilité. Et peu à peu, mon attirance pour le contenu, pour le fond se propage et me gagne pour la forme. Je commence à comprendre ; son style, son histoire, sa plume, son livre, son esprit.
Cette découverte me permet de reconsidérer tout l'ouvrage. Alors je remet en perspective mon avis et je savoure d'autant plus la suite de ma lecture.
Puisqu'il est un recueil, puisqu'il s'y trouve des aventures différentes ; il est légitime d'avoir des préférences. Et mon coeur, en accord avec mon esprit, s'attarde sur la dernière nouvelle : "Dépareillées". Zoyâ nous offre ici l'histoire d'une femme fragile et pourtant si forte, rêveuse autant qu'envieuse, drôle et si malheureuse. Une femme qui vit avec un mari qu'elle aime moins qu'au début, qu'elle n'aime plus peut-être, comment savoir ? Est-ce dont là la tragédie du mariage, du couple qui dure des années... l'évanouissement avec le temps des sentiments, de la passion ? le maintien du couple par habitude, par obligation ? le fait de ne pas faire pour garder un couple en vie, tout ce qui avait été fait pour le bâtir ?
Cette femme qui rêve d'un prince comme dans les dessins animés, les princes des contes de fées. Elle qui rêve de palais, d'amour... enfin simplement de quelque chose à quoi s'accrocher dans son quotidien triste.
Elle qui n'a pour prince qu'un homme à qui elle dit avoir dérobé, et ce depuis longtemps, le charme des yeux et la tendresse des sourires.
Au final, au dernier mot, à la dernière histoire ; Zoyâ nous offre un portrait de la femme persane en nous promettant une invitation à la quête du bonheur et de la liberté.