L'idéale Basilique
Or, j'ai rêvé le Ciel comme une Cathédrale,
Avec des voûtes où pendaient des étendards
Et des lustres remplis de cierges en spirale.
Des vitraux flamboyaient ; au milieu des soudards.
Le Roi-Christ y tombait, portant sa Croix divine ;
Sébastien y saignait, percé de mille dards ;
Ulcérée, y priait dans l'angoisse, Lydwine ;
Jérôme, se frappant le cœur de durs cailloux,
Y sanglotait au fond d'une abrupte ravine ;
Tous les crucifiés de l'Amour, tous les fous.
Dont le front maintenant se nimbait de lumières,
Y paraissaient sous les clartés d'un soleil doux.
Des exemples sans fin coloraient les verrières :
Ici, Grégoire avec l'Oiseau divin ; plus loin,
Thomas d'Aquin rythmant les chantantes prières ;
Et, toujours enflammé du céleste Besoin
De fuir le Monde et d'être ignoré, Benoît Labre,
Tout loqueteux, était accroupi dans un coin,
Dan la rosace, en haut, le bon Roy Loys, glabre
Et pâle, d'une main sortant du bleu mantel
Refusait le Koran, et l'Empire, et le Sabre ;
Et les Rois : Ferdinand, défenseur de l'Autel,
Henry, Kanut, Etienne, Edouard d'Angleterre
Et d'autres, entouraient le Monarque immortel.
Quand même !
A mon ami J. R. de Brousse
Quand même, par delà les voiles d'ici-bas.
Nous ne trouverions point le Paradis céleste ;
Quand même il mentirait, cet immuable geste
Des Clochers, vers un ciel qui n'existerait pas ;
J'aurai du moins vécu, désireux du Trépas.
Travailleur obstiné pour faire œuvre qui reste,
Et, la lutte du siècle étant pour moi funeste.
Loin des sentiers impurs j'aurai porté mes pas !
J'aurai rêvé, près des Autels tout blancs de cierges,
C'es fresques de jadis où vont Martyrs et Vierges,
Dont les tons par l'encens furent atténués ;
Et j'aurai dit des vers aux rimes argentines,
Pieux, — comme ces vols d'Anges asexués
Sur le ciel d'or des mosaïques byzantines...
À ma Mère
Si, lisant mon œuvre, on s'arrête
Quelquefois, et l'on dit : « C'est bien ! »
Je m'écrierai, le cœur en fête :
« Mère, à toi l'honneur en revient !
L'Amour du Beau, la sainte Flamme,
La Bonté, le Savoir, la Foi,
C'est toi qui les mis en mon âme...
— Et le Mal ne vient que de moi. »