"Déjà la PG, la police géologique, prenait les empreintes des fougères"...
Bref recueil de
Jacques Prévert, paru en 1967, "
Arbres" illustre le travail collaboratif avec un artiste graphique que le poète affectionnait. Ici, 10 gravures de
Georges Ribemont-Dessaignes sont commentées ou mises en résonance par le biais de poèmes en prose allant d'une page à quelques pages.
C'est ici que figure notamment le célèbre:
"En argot les hommes appellent les oreilles des feuilles
c'est dire comme ils sentent que
les
arbres connaissent la musique
Mais la langue verte des
arbres
est un argot bien plus ancien
Qui peut savoir ce qu'ils disent
lorsqu'ils parlent des humains (...)"
ou bien la strophe souvent citée :
"Quand l'homme de lettres dit
qu'il couche quelque chose par écrit
et répète qu'une fois encore
il va jeter une idée sur le papier
qu'il la rejette de sa tête
de sa corbeille à idées (...)"
ou encore cette réminiscence du grand "Cortège" :
"Chansons des rusés des bois
des bois
bois des mâts de cocagne
et des manches de drapeaux
bois des carcans et des bagnes
bois des échafauds
bois des potences
des estrades des bastonnades
et des cages à oiseaux
bois de justice
et de guitares à sérénades
et de cadres à tableaux
bois d'
arbres dont on fait des flûtes
des flûtes dont on fait des chansons
Bois d'arbre
de la science du bien et du mal
appelé aussi arbre de transmission
des mauvaises pensées (...).
Une mention particulière aussi pour le bref fragment de roman d'anticipation arborescente "L'espoir vert" qui clôt le recueil, et pour le singulier "Déjà la PG, la police géologique, prenait les empreintes des fougères".
On a toujours un moment de vertige fasciné en compagnie de
Prévert...