Il y a des récits dont on souhaiterait, de toutes nos forces, qu'il s'agisse d'un roman. On voudrait même ne pas adhérer au roman, se dire que c'est tout de même un peu grossier, car la réalité ne peut pas être telle. Après les premières pages de «
Danser dans la mosquée », j'ai eu cette appréhension, cette crainte des sentiments que le récit d'
Homeira Qaderi allait pouvoir réveiller en moi.
J'ai vite rangé mes craintes. le parcours d'
Homeira Qaderi à travers l'histoire de la ville d'Herat est évidemment empreint de violence, de peurs, de tristesse et d'injustice. Mais à travers ses yeux de petite fille d'abord, de jeune fille ensuite puis de jeune femme, habituée à évoluer dans le chaos, elle porte un récit où la délicatesse, la poésie et la lutte l'emportent sur la crainte.
Dans l'ombre des mûriers en fleurs, dans la tendresse familiale, dans la solidarité et l'amitié, naissent des incendies qu'aucun fanatique ne parviendra jamais à éteindre.
Par son autobiographie et son combat pour son fils,
Homeira Qaderi nous transporte dans le quotidien de femmes qui grandissent en rasant les murs, qui ne côtoient que l'ombre des ruelles au gré des changements de diktats politiques et religieux. A ces scènes de terreur absolue et de lassitude succèdent des instants où les interdits sont bravés, des instants inconscients, sidérants et d'une infinie poésie.
Homeira Qaderi parvient à partager ses jeux d'enfant sous les balles russes, ses terreurs du régime taliban, la douceur du foyer familial, le miracle salvateur de la lecture, les amitiés, les solidarités, les désespoirs, les horreurs absolues et la rage qui naît de celles-ci.
Son histoire, c'est une révolte féministe qui bouillonne au coeur d'un pays « où il vaut mieux être une pierre qu'une femme ». C'est un combat qui s'accomplit dans la maternité, dans la lutte pour son fils et son amour absolu.
Son histoire, ce fut pour moi une découverte émotionnelle au gré des saisons, la saison des balles, la saison du vent, la saison des mûres.