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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
C'est un roman magnétique que celui de Laurine Roux. Sa lecture a été, pour moi, de l'ordre de l'expérience intime, de cette aventure secrète et mystérieuse qui engage la pensée dans un voyage immobile entre le territoire des mythes, celui de l'intériorité et celui du monde. le résumer, en parler, c'est peut-être prendre le risque de faire voler en éclat cette pureté cristalline dont je garde encore une sensation éblouie.
Dans un pays jamais nommé - s'agit-il de la Sibérie ? de la Mongolie ? - à une époque indéterminée, qui pourrait aussi bien se situer dans un passé millénaire que dans un futur post-apocalyptique, la jeune narratrice part sur les chemins mordus par la cruauté d'un hiver qui semble perpétuel, avec Igor, l'homme aimé au premier regard. Ils vont ainsi apporter leur aide aux humains disséminés dans un espace aux limites imprécises. Pêche, chasse, bois à couper, travaux que les anciens et les Invisibles, rescapés du Grand Oubli, n'ont plus la force, ni l'énergie d'effectuer.
Igor, Tochko, Kolia, l'ourse Tochka et la vieille Grisha peuplent ce monde, de la même manière qu'une constellation habite le ciel. Aux frontières du rêve, du cauchemar et du mythe, leurs histoires se rejoignent en filiations clandestines comme des rivières viennent épouser le fleuve. Aux côtés d'Igor, initiée par la vieille Grisha, la jeune femme apprend les gestes qui soignent ou qui blessent, les mots qui guérissent ou qui tuent, les êtres qui aiment ou qui maudissent. Son corps s'imprègne de sensations et des vies vécues bien avant sa naissance, alors que sa pensée se nourrit de cette mémoire préservée malgré le Grand Oubli nécessaire à la survie de quelques-uns après un fléau indéfini.
Poétique, incantatoire, l'écriture se fait tour à tour aquarelle, calligraphie, gravure, estompe, pour dessiner cet univers hors de tous les temps et inscrit dans tous les temps. Cette histoire qui engendre et embrasse d'autres histoires, elles-mêmes venant remanier l'histoire-cadre, nous engage dans un cycle sans fin à l'image de l'ouroboros et de la nature omniprésente. Puisque les humains "sont tous de passage", la mesure du temps devient dérisoire et seule compte cette "immense sensation de calme" que l'on peut goûter lorsque -comme pour cette narratrice sans nom - la lucidité, la connaissance et la mémoire conduisent non pas à la résignation, à la colère ou aux regrets mais à l'acceptation paisible.
J'ai lu le roman de Laurine Roux comme on va de l'ombre vers la lumière, comme on passe du chaos à l'harmonie, avec crainte et émerveillement.
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C'est un roman que l'on m'a passé, dont je ne savais même pas de quoi il parlait. Je me suis mise à le lire uniquement parce qu'il était court et que je venais de terminer un pavé... et je l'ai lu d'une traite.
Ni triste, ni joyeux... ni doux, ni violent... simplement magnifique.
Entre le conte, la fable et la légende, dans un pays et une époque non identifiés (mais plutôt XXème), une écriture à la précision chirurgicale où chaque mot est pesé, mais naturellement à sa place.
Mon sentiment en refermant le livre?
D'avoir passé la soirée à écouter un vieux sage conter l'histoire d'un peuple de la nature.
Beau, touchant... Calme...!
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Une immense sensation de calme de Laurine Roux est une merveille.
Un bijou de grâce, d'élégance et d'intelligence.
Un absolu
ahurissant de maturité
et une superbe leçon d'abandon.

C'est un texte qu'on lit la rage au coeur, et l'âme au bord des lèvres.
Et alors que le récit suit son cours, on surprend quelques sanglots se loger dans notre gorge.
On pourrait hurler,
Crier notre colère face à ces mots mais enfin…

Ils sont si beaux
qu'ils ne méritent qu'un silence des plus respectueux.
Et toute notre admiration.
Nous voilà là face à un texte immense, d'une poésie sans nom. Une histoire à couper le souffle narrée dans une langue incandescente.

C'est mon frère qui m'a offert cette petite merveille. Il avait glissé dans l'exemplaire un billet sur lequel était écrit de sa très belle plume : « voilà un texte qui m'a beaucoup touché et transporté il y a quelques années, il m'habite encore. »
Et une chose est sûre, pour moi aussi, Une immense sensation de calme restera longtemps comme une broche accrochées aux chairs de mon coeur, une obsidienne à jamais rivée à mes songes, refuge éternel, ressac infini.
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Ayant lu le Sanctuaire précédemment, j'avais encore en tête le style d'écriture de Laurine Roux. La plume précise, aérienne, sans fioriture de l'autrice m'a à nouveau menée dans un autre monde !

La narratrice raconte une expédition avec Igor, l'homme qu'elle aime, dans les montagnes, supposément en Russie. Bordant sa randonnée, elle est envahie par les souvenirs de son enfance, de la vie d'errance qui l'a menée aux côtés de cet homme qu'elle considère presque comme un dieu. de lui, on ne sait que peu ; mais au fil des rencontres et des histoires de vie des uns et des autres, se dessine une origine, une explication, tant pour Igor que pour le monde étrange dans lequel ils semblent évoluer.

N'étant pas coutumière de récits se déroulant en Russie, j'ai été très dépaysée par cette lecture. Les personnages, héritiers d'un passé guerrier et meurtrier qu'ils ont préféré oublier, sont tous rompus à la survie. Dans le froid de Sibérie, chacun doit ou a dû affronter tour à tour la rudesse d'un environnement naturel inhospitalier et la rudesse des Hommes. Mais lorsque la réalité est si dure, que reste-t-il en dehors des souvenirs, des traditions et des légendes ?

Ce roman se présente comme un conte en contenant d'autres. le fil rouge étant la tranche de vie de la protagoniste, celui-ci est parsemé de petites histoires, la manière de pêcher en hiver ; les souvenirs de la Baba -la grand-mère- au coin du feu ; la légende de Kolia, la femme poisson... La plume poétique de Laurine Roux s'envole, questionne notre rapport au monde, la sagesse de vivre en accord avec la nature, la connaissance des plantes, l'amour omniprésent, l'acceptation de la fin.

Il s'agit d'une lecture particulièrement déroutante pour moi, que je peux rapprocher du surprenant de Pierre et d'os de Bérengère Cournut ou du délicat La Part des nuages de Thomas Vinau. Je me familiarise peu à peu avec des styles d'écriture plus bruts, pauvres en adjectifs et figures de styles, mais riches de sens et de construction impeccable. Laurine Roux, elle aussi, est artisane de la langue, poète gracieuse. Une immense sensation de calme se range au côté des romans d'un rythme particulier, dont la lecture à voix haute est délicieuse. de ceux qui disent la souffrance, qui regardent le mal dans les yeux, pour en retirer ensuite un amour immense. Que c'est beau et troublant !

Je ne saurais que trop conseiller ce roman /conte /fable, empli d'émotions pures et puissantes, à vous en décoller le cerveau. Attention cependant pour les âmes sensibles, certains passages peuvent être difficiles à lire tant la violence prend diverses formes.
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Sortir du sentier littéraire, un pas de côté, dans l'inconnu, tout autant poétique que terre-à-terre, là dans le froid de la Taïga, les mots heurtant les pupilles, forts et incroyablement enivrants ; le texte, l'histoire, celle de cette femme (jeune fille) dans les pas de son homme, Igor, géant silencieux. Ils côtoient la nature, font corps, face au froid de l'hiver, les foulées enneigées, le souffle chargé, il gèle, il craque, sur la peau et au coeur, il ne faut pas s'arrêter. Pourtant, Igor scie le bois d'une aînée, une vieille, et s'invite chez Tochko, l'invisible, êtres au passé lourd - caché – celui de la guerre, semble-t-il ; celle dont ils parlent quand l'ombre les saisit et les langues se délient. La guerre et ce pays qui juge et détruit comme il a détruit les saltimbanques, trop libres, trop différents, avec leur ourse et la nature au pied de leur savoir.
Quel texte !
Conte sur l'homme et la nature aux confins du possible, où les légendes se mêlent au réel, rappelant les éléments et l'idée de passage - l'homme si petit, insignifiant. Laurine Roux partage le silence, les chagrins et la vie. La mort. Si justement. Si merveilleusement bien.
Ce roman est une incroyable lecture.


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Roman sublime à la lisière d'un conte dans les montagnes, une nature majestueuse et puissante, mystique, glacée et sauvage où après une guerre ancienne, les hommes sont morts, ne restent que femmes et enfants.
Une jeune femme rencontre Igor, un homme taiseux et sauvage et va le suivre, elle sait que c'est lui qui lui est destiné et tous deux vont braver la nature hostile et difficile.

A présent il faut que je vous raconte comment Igor est entré dans ma vie…….le roman commence et là je m'installe au coin de la cheminée, personne autour de moi, du calme, de la chaleur et….je me laisse bercée par ce très court roman Ô combien poétique. C'est comme cela que je relirai ce roman en savourant chaque phrase, en me laissant envoûtée. Je pense que c'est une auteure que nous reverrons.
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Je me souviens de ce moment d'errance dans les rues de Strasbourg, le temps était fade, humide, le ciel gris délavé presque translucide, à travers la pluie en sourdine se fige une journée d'automne quelconque, je déambule vers la librairie à la quête incertaine d'un livre, d'un titre, d'une couverture. Sur l'étale centrale, des livres pêle-mêle, à la merci des lecteurs attendent d'être enfin l'objet du désir, d'être convoité, de susciter l'envie, Une immense sensation de calme de Laurine Roux happe mes azurs, le titre, la couverture magnétise tout mon être, ce roman est là, dans mes mains, et sans réfléchir je l'achète, il viendra un moment où un autre apaiser mon esprit de cette sensation de plaisir, cet instant propice se présente à moi, j'entends les oiseaux chanter dans le calme de cette matinée de printemps, la nature est belle, comme un chant de ce roman venant prendre ce présent, je lis les premières pages, mon coeur est en suspens, l'écriture douce de Laurine Roux caresse l'émoi de cette héroïne rencontrant Igor, un coup de foudre.
Une immense sensation de calme de Laurine Roux est le fruit de son premier roman, publié aux éditions du sonneur en mars 2018, elle est professeur de lettres modernes dans les Hautes-Alpes. le titre est un prolongement d'une émotion, sans majuscule, c'est une sorte de virgule, une continuité qui se prolonge, sans début sans fin, une onde parcourant l'atmosphère du lecteur, une ligne temporelle dont nous sommes véhiculés vers les profondeurs des abysses de l'imagination.
Laurine Roux aspire les sensations de découverte dans un style narratif fabuliste moderne, un conte ensorcelant où l'espace habite un paysage inconnu, des lieux aux accents slaves, ces noms imaginaires caressent la volupté fantasque de l'auteur, embrasant les méandres de la curiosité du lecteur, ruisselant dans cette rivière Zolotaï, traversant Varatcha, pêchant sur le lac Taïgal des oumouls et des carpes, ramassant des feuilles de ramzek, de crisuble, portant des bracelets traditionnels Matralinka…Un univers brodé avec beaucoup de précision, faisant voyager le lecteur vers des cieux en terre inconnue, pénétrer l'univers magique de cette fable touchante, berçant les coeurs, dansant l'amour volatile de ces êtres innocents, de ces âmes exclus de la férocité humaine. Ce monde, terre des secrets, cache un passé terrible, juste des allusions par ci par là, Laurine Roux distille cette terre balayée par ce vent froid, le Knik, avec une pudeur presque majestueuse, une région marquée par une guerre relatée par Baba à sa petite fille, la narratrice, c'est un récit post apocalyptique, cette guerre effaça les mémoire, les survivants devenant la première génération du Grand-Oubli. Tout est légende, sacré, comme le peuple du Grand-Sommeil, le monde des morts, accueillant les âmes perdues, cristallisant ce lien unique entre les vivants et les morts où sommeillent Ama et Apa les parents de la conteuse, Baba, sa grand-mère qui vient de mourir, laissant la jeune fille solitaire de cette région froide et hostile, libre de ces terres et vierge d'un passé oublié.
Ce livre est le récit d'une femme, dont nous ne savons pas son âge, si cette histoire est ancienne ou récente, cette narration est comme un songe lointain, un écho du passé ricochant dans la chair de notre narratrice, s'évaporant au gré du vent, n'oubliant pas cette rencontre avec Igor, cet homme de la nature, épousant le paysage rude de cette terre escarpée, son corps à la rudesse des hivers de tempête, de neige , de froid translucide brulant la chair. le début du livre s'ouvre sur cette phrase significative, A PRÉSENT IL FAUT QUE JE RACONTE, en majuscule, comme un récit oral, une petite fable traversant le temps, raconté à des quidams ou des êtres proches, pour faire perdurer le mythe de ces personnes solitaires, amoureux d'une nature sauvage et aimante. Au début de chaque chapitre, les premiers mots sont majuscules, Laurine Roux installe encore plus le lecteur dans ce style narratif orale, comme les petites histoires que l'on raconte le soir à un enfant avant de dormir, ou lors d'une veillée autour d'un feu de bois, comme Baba et Grisha dans cette histoire raconter les secrets à la narratrice, nous sommes ce lecteur privilégié, lisant une scène de vie de cette narratrice, avec celles des autres caressant son existence.
S'ouvre alors une douceur d'éternité, Laurine Roux aspire ces personnages dans un interstice du temps pour le fixer, tous sont des êtres à part, d'une communauté de l'exclusion, car différente, ils sont des êtres de chair de sang au coeur rythmant l'amour , comme les invisibles, des orphelins bruler au fer rouge par l'apocalypse d'une guerre, devenu des parias aux yeux blancs stigmates, des oiseaux de fers venus brûler la terre de leur oeufs de feux. Il y a aussi ces errants couleurs de peaux mates, donnant un spectacle de village en village, étranger par leur différence, puis coule la légende de la passion de Kolia, jeune fille devenue une créature des eaux et Tochko, cet être invisible, donnant naissance à Igor, l'amour de la narratrice. Laurine Roux distille merveilleusement cette histoire à travers le récit multiple par écho, celui de sa défunte grand-mère Baba, puis de la vieille Grisha, une triple onde traversent l'espace des légendes, des secrets pour effacer l'oubli, construire un présent peupler des contes anciens pour ne pas oublier.
Il y a dans ce roman, une forme de poésie de la nature en couple avec ces êtres déchus de la communauté humaine, une tragédie sourde tinte l'invisibilité sombre qui se cache dans la beauté de l'amour s'évaporant de mots de la narratrice, orpheline, recueilli par la famille Illiakov, soignée par Olga, cette jeune femme traversant cette histoire avec Igor, c'est surtout ce petit rayon de soleil, réchauffant les morsures noires, cette ode naturelle de cet amour rare, Igor et la narratrice inondant le paysage d'un léger voile de douceur et de magie, de deux êtres attirés l'un à l'autre par une alchimie inconnue, seul le corps épouse les contours de cette attraction, l'âme fécond d'un silence coule vers cette destinée légendaire d'un amour pure où le passé vient renforcer cet amour des autres, un amour communautaire.
Nous pouvons avoir une double lecture de ce roman, un message de Laurine Roux, de ces êtres différents, stigmatisés par la normalité, ces personnes vivant dans l'ombre, ces hommes et ces femmes dans la rupture des traditions, exposées à la folie humaine. Les orphelins abandonnés à leur sort lors de la guerre, dont nous ne savons rien, juste les dégâts qu'elle causa, ces enfants devenus des Invisibles, des parias, volant pour survivre, cachés pour ne pas être tués. Il y a aussi dans je le disais au préalable, ce camp de nomade, vivant le temps de leur spectacle sur la Terre-Morte, seul lieu octroyé par le village, l'eau non comestible, rendant malade chaque saltimbanques contagieux, mourant un par un, puis par la folie des habitants, les chassés, les massacrés, par bêtise et ignorance. Igor, Grisha, Tochko, Kolia et la narratrice errent dans cette terre comme des fantômes, ils sont prisonnier des autres, mais s'échappent de cette prison humaine par la liberté de leur vie, solitaires des autres, vivant en harmonie avec ce paysage, respectant l'autre.
Laurine Roux avec ce premier roman, enchante par une écriture douce et chantante, un style entrainant le lecteur dans un envoutement addictif, les personnages sont des fantômes d'un passé, animés par la magie de la narration fabuliste.
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« A présent, il faut que je raconte comment Igor est entré dans ma vie. C'était la fin de la saison froide, j'avais passé l'hiver dans la maison des frères Illiakov. » Une phrase qui amène une suite réelle, réaliste, idéalisée ou rêvée.
Baba, sa grand-mère « a rejoint le Grand-Sommeil ». Pour payer l'enterrement, elle cède au Comité la cabane et prend la route « Voir jusqu'où la route irait. ». Elle ira jusqu'à la cabane des frères Illiakov. Ils l'ont sauvée d'une mort certaine alors que son « corps avait déjà la raideur d'une planche de bois ». A leur contact et celui d'Olga, la femme de l'un d'eux, elle apprend les rudiments de la vie hors les villes. Elle y restera jusqu'à ce qu'Igor « Igor n'est pas un homme. Il répond à des instincts…. C'est un animal. » vienne payer le poisson séché qu'il a vendu pour eux. Elle est de suite magnétisée par cet homme rencontré près du lac « Mon désir tisse un fil vers lui et bourdonne tout autour de moi. Lui continue simplement de faire ce qu'il a à faire. ». Elle part avec lui, le suit jusqu'au bout.
Au fur et à mesure de ma lecture, j'apprends qu'il y a un avant et un après une guerre où beaucoup périr, les hommes ont été tués. Les terres sont laissées à l'abandon, certains vivent dans la montagne. Baba a raconté à sa petite-fille le grand secret des invisibles, victimes de cette guerre atroce ou créatures de contes ?
Dans cet univers quelque peu inquiétant où le temps ne se conjuguent pas au futur, ni au passé, les deux amoureux vivent pleinement et simplement leur vie au quotidien.
Un livre dur et tendre, sauvage et doux, oxymores, comme cette phrase « le regard d'Igor abolit mon être. Il m'absorbe et arase toute autre réaction qu'un immense afflux de sang… et c'est à la fois de la peur et de la glace, du miel et de la lavande. ». Un livre où il fait bon se couler, se laisser prendre dans la neige et la glace, puis réchauffer par le feu. La nature sauvage et hostile a la part belle, les humains sont humains, chaleureux.
Une histoire, un conte tragique empli de beauté, captivant et qui procure comme une immense sensation de calme. Comme une impression d'immersion dans un monde inconnu, tragique et pourtant si beau. L'hiver est son cortège, très présent semble enserrer la nature, les humains et les bêtes dans son étau de gel. Pourtant, la lumière y est belle, la longue nuit est éclairée par la cheminée et les bouffardes qui laissent échapper la fumée de l'oubli.
La mort côtoie la vie avec une puissance multipliée par l'environnement hostile et c'est pourtant un livre d'une très grande douceur et sensualité.

« Chaque soir, la même histoire se répétait : le Soleil allumait ici ou là quelques brandons de colère, furieux de devoir quitter le monde, mais déjà la nuit mollissait l'incendie de ses vapeurs mauves, lénifiait sa violence pour laisser place au coassement gris du crapaud. » C'est nettement plus beau que d'écrire le soir tombe, la nuit arrive !
« J'ai caressé ses traits figés sur sa peau froide. Il me semblait que je devais le faire. Une caresse pour une vie. Mes doigts parcouraient son visage et je pouvais sentir tout ce qu'elle avait été. Avec ma main, je lui disais je prends. Elle me donnait sa droiture et sa fatigue, je lui disais je prends. Son passé et ses blessures, je lui disais je prends. Elle me donnait sa beauté et les rares joies arrachées à la vie. Je prenais. Son courage et sa vertu. Je prenais tout. C'était tout ce qui me restait. Longtemps ce serait mes seuls bagages. » Ce fut son dernier adieu à sa Baba avant que les homes l'ensevelissent.
Un coup de coeur pour cette lecture que j'ai ralentie pour mieux en savourer chaque mot, chaque phrase. Laurine Roux, vous m'avez envoûtée le temps de ma lecture et écrire, difficilement, cette chronique contribue à les laisser vivre en moi.
Monsieur Marc Villemain, vous avez le don pour nous faire découvrir de très beaux premiers romans.

Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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Êtes-vous « nature writing »?

Je vais être très franche. J'étais bourrée de résistances, de verrous. C'était presque un rejet. Quoi ? Un conte dans une forêt gelée ? Des scènes de pêche, un grizzli, des yourtes… mmmm génial, où est la corde que je me pende tout de suite ?
Entrer dans ce roman c'était pour moi faire l'expérience de l'inconnu. Pour ceux qui me connaissent, le taureau en moi n'aime pas trop ça, et encore moins le froid et les forêts désertes. Alors même si pendant les cinquante premières pages j'ai cherché une taverne hospitalière qui me servît un bon bourgogne et une planche de charcuterie, la suite de ce roman sublime a été une parfaite initiation à ce genre. Un vocabulaire riche et rare est au service d'une plume précieuse.

Bien sûr j'ai dû lire lentement les premiers chapitres. Apprivoiser les personnages très hormonaux, instinctifs. Lorsque j'ai découvert Igor, j'étais quelque peu décontenancée, comme la narratrice, sûrement un peu amoureuse aussi. J'ai dû reposer le livre quand je ne comprenais plus son attitude, lorsque je me sentais trop éloignée de l'ambiance et des champs lexicaux. Quand je l'ai rouvert le lendemain, c'était comme sortir après l'orage, j'ai retrouvé mes marques car j'avais pris confiance et trouvé du confort dans le récit. J'ai alors appris sans peine le nom des plantes et des outils, j'ai marché des jours entiers et supporté le froid, j'ai écouté les contes et les légendes de la vieille Grisha.
Jusqu'à ce que je me retrouve complètement envoûtée, l'auteure avait réussi à me plonger dans l'ambiance et le calme, mon coeur comme le wifi était déconnecté, j'avais dévoré goulûment le livre sans m'en apercevoir. Je vous l'avoue, Igor me manque un peu.

Ce roman rend hommage à la nature aride et froide contre laquelle l'homme ne peut rien, celle qui nous engloutit en une bouchée, en un rhume, en un coup de fusil. Malgré nos désirs, nos pulsions, notre travail, nous restons éternellement sous son joug.

A lire si vous voulez prendre l'air sans sortir de chez vous et faire l'expérience de l'absolu. Une belle lecture, soignée, littéraire et atypique.
Lien : https://agathethebook.com/20..
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Une histoire inclassable entre roman, légende, conte, un univers rude où survivent des personnages dans un état presque primitif. Leur vie s'organise autour d'un lac gelé, dans une taïga, quelque part, là-bas, dans l'est, après un événement dévastateur.
Il est question de lutte pour la vie, d'entraide, de secrets, d'amour, de croyances, d'endurance, de courage, de mort.
L'indicible beauté des gestes ancestraux nous rappelle combien ce qui est simple peut être merveilleux. le minéral, le végétal, l'humain se confondent pour célébrer la puissance de la nature parfois salvatrice, parfois dangereuse, jamais domptée. Les images frappent, transportent, envoutent, enchantent, chaque mot incroyablement précis. La poésie sensuelle de Laurine Roux résonne au plus profond de l'humain. Chaque phrase est ciselée, un bijou de littérature.
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