Ma sombre Vanessa

J’essaie d’imaginer comment ça se passe quand il fait ça, s’il jouit dans sa main, dans une serviette ou directement dans les draps. Je me dis que c’est vraiment dégueu pour les hommes, qui sont trahis par de la saleté à la fin. La pensée T’es carrément dégueulasse déferle sur moi.


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Lorsqu’ils remarquent que je les regarde, ils sont manifestement troublés, leurs sourcils se froncent tandis qu’ils cherchent à me décrypter. Seuls quelques-uns reconnaissent ce que je suis, et une dureté s’empare de leur visage quand ils me rendent mon regard.
 

Je trouve ça drôle que maman se soit à ce point trompée sur ce sujet. Parce qu’il existe une autre possibilité pour celles qui en ont le courage : court-circuiter les garçons, passer directement aux hommes. Des hommes qui ne vous feront jamais attendre, des hommes qui sont affamés et sont reconnaissants qu’on leur accorde des bribes d’attention, des hommes qui tombent tellement amoureux de vous qu’ils se jettent à vos pieds.

... j'ai dit à Strane que cela ne pouvait plus continuer. Le genre de sursaut de moralité qui s'est emparé de moi à plusieurs reprises tout au long de mes années de conneries - au gré des licenciements, ruptures et dépressions -, comme si bien me comporter pouvait réparer de manière rétroactive toutes les choses que j'ai cassées.

Il faut du temps pour qu’un garçon voie un peu plus loin que le bout de son nez, avait dit maman avant de se lancer dans une allégorie où il était question de pommes qui tombent des arbres et de garçons qui ramassent les plus accessibles mais finissent par comprendre que les meilleurs fruits exigent un peu plus d’effort. Je n’avais pas du tout aimé.

J’essaie parfois d’imaginer une autre fille agir comme moi – sombrer dans ce plaisir, le désirer, bâtir sa vie autour de lui – mais je n’y arrive pas. Mon cerveau se retrouve dans une impasse, le labyrinthe est englouti par les ténèbres. Impensable. Ineffable.
Je ne l’aurais jamais fait si tu n’étais pas aussi consentante, disait-il. Des propos qui paraissent délirants. Quelle fille voudrait de ce qu’il m’a fait ? Pourtant, c’est la vérité, quoi qu’en pensent les gens.

J’ai envie de lui demander ce pour quoi je ne suis pas faite, mais je ne veux pas lui montrer qu’en réalité je ne me connais pas, et je ne veux pas insister maintenant qu’il me tient de nouveau la main et penche son visage vers moi comme pour m’embrasser. Il ne m’a pas embrassée depuis que je suis arrivée ici.

« Le sexe, ce n’est pas anodin, ne cède pas à la pression, tu as tout le temps du monde ! » Alors je vais sur Internet et trouve sur un forum un fil intitulé « Conseils dépucelage », et la seule recommandation pour les filles est « Ne te contente pas de rester allongée sans rien faire ».

Éperdument amoureux de toi. Dès qu’il prononce ces mots, je deviens une personne dont quelqu’un d’autre est amoureux – quelqu’un d’autre qui n’est pas un bête garçon de mon âge, mais un homme qui a déjà vécu une vie entière, qui a fait et vu des tas de choses et pense malgré tout que je mérite son amour. Je sens qu’on me pousse de force par-dessus un seuil, que je suis éjectée de ma vie ordinaire et propulsée dans un monde où il est possible que des hommes adultes se sentent si éperdument amoureux de moi qu’ils tombent à mes pieds.

Les ébauches de baisers peuvent être oubliées, contrairement aux vrais. Sa main serre mon épaule, de plus en plus, et quelque chose dans mon corps commence à grandir. Je m’efforce de ravaler cette chose, car je crains sinon de bondir, de prendre M. Strane à la gorge et de tout gâcher.