Durant la dizaine de jours que j'ai passés à Vienne, je n'ai rien vu, je ne suis entré nulle part, sinon dans les cafés et les bistrots, et en dehors des serveuses et des garçons, je n'ai parlé à personne. J'ai seulement dit quelques mots, s'il m'en souvient bien, aux choucas des jardins de l'Hôtel-de-Ville, et à un merle tête blanche attiré avec les choucas par ma grappe de raisin et que j'ai appelé en secret Simurgh.
C'est pourquoi on ne devrait, conseille Beyle, acheter aucune gravure des beaux points de vue ou perspectives que l'on découvre en voyageant. Car une gravure a tôt fait d'occuper tout le champ du souvenir et l'on peut même dire, ajoute-t-il, qu'elle finit par le détruire.
Au fil des années, j’en suis arrivé à la conclusion que la vie désormais naît de tout ce fracas, celle qui vient après nous et qui lentement nous mènera à notre perte, comme nous menons lentement à sa perte tout ce qui a été là longtemps avant nous.
Au troisième jour de mon séjour à Vérone, mes pas me conduisirent pour le dîner dans une pizzeria de la via Roma. Je ne sais ce qui préside mon choix d'un restaurant dans une ville étrangère. D'un côté je suis très difficile et parcours pendant des heures les rues et les venelles avant de me décider ; de l'autre, je finis le plus souvent pas entrer n'importe où, pour absorber, mal à l'aise dans une ambiance sinistre, des mets qui ne me disent absolument rien qui vaille. Tel fut le cas en cette soirée du 5 novembre.
Je ne sais pas ce qui préside à mon choix d'un restaurant dans une ville étrangère. D'un côté je suis très difficile et parcours pendant des heures les rues et les venelles avant de me décider ; de l'autre, je finis le plus souvent par entrer n'importe où, pour absorber, mal à l'aise dans une ambiance sinistre, des mets qui ne me disent absolument rien qui vaille.
Il semblait assurément que notre espèce avait fait place à une autre ou du moins que si nous continuions à vivre, c'était dans une sorte de captivité.