De la providence - De la constance du sage - De la tranquillité de l'âme - Du loisir

Les biens invisibles, la paix et la liberté, sont tout entier à tous autant qu'à chacun.

Ai-je mérité ce qui m'arrive ou non? Si je l'ai mérité, ce n'est pas une offense, ce n'est que justice; si je ne l'ai pas mérité, c'est le coupable qui doit rougir.

Toutefois, rien de saurait autant plaire à l'âme qu'une amitié tendre et fidèle. Quel bonheur de trouver un cœur au fond duquel un secret, quel qu'il soit, reste en sécurité; un confident plus sûr encore que soi-même; un compagnon dont les paroles adoucissent nos soucis, dont les avis nous tirent d'embarras, dont la gaieté dissipe notre tristesse, dont la vue est déjà un plaisir ! Cet ami, évidemment, nous le choisirons aussi exempt de passions que possible; le vice rampe, saute sur qui l'approche, et son contact est contagieux !

Ma situation n'est certes pas la pire de toutes, mais c'est la plus lamentable et la plus difficile à vivre : je ne suis ni malade, ni bien portant.

"Celui qui prend appui sur la raison pour avancer au milieu des accidents humains avec une âme divine n'offre pas de prise aux injustices; et je ne pense pas seulement à celles qui viennent des hommes - contrairement à ce que tu pourrais croire - mais aussi à celles de la Fortune, qui n'a jamais le dessus quand elle s'attaque à la vertu."

"Faute d'adversaire, le courage s'étiole; son étendue et sa puissance ne se manifestent qu'en des occasions où l'endurance peut être mise à l'épreuve. Sache que les hommes de bien doivent agir de même: ne pas craindre les peines et les difficultés ni se plaindre du sort, et s'accommoder de tous les événements quels qu'ils soient en les transformant en biens. L'important, ce n'est pas l'objet de la souffrance mais la façon dont on la supporte."

"Le bonheur qui n'a jamais connu de nuages ne supporte aucune atteinte; au contraire, quand on est habitué à se battre contre l'adversité, on s'endurcit, on ne cède jamais au malheur, et si l'on vient à tomber, on combat même à genoux."

"Je ne dis pas qu'il [l'homme de bien] ne le [l'adversité] sente pas, mais qu'il en triomphe; et, tout en demeurant calme et paisible, il se dresse contre les attaques. Tous les revers de fortune, il les regarde comme des occasions de s'exercer. Quel homme digne de ce nom, aspirant à la Vertu, ne désire une épreuve à sa mesure et ne court au-devant du danger pour accomplir son devoir? Quel homme actif ne considère pas le repos comme une punition?"

"Pourquoi les hommes de bien sont-ils victimes de tant de malheurs? Il ne peut rien arriver de mal à l'homme de bien: les contraires ne se rejoignent pas! Tous ces fleuves, toutes ces pluies qui tombent du haut du ciel, toutes ces sources médicinales, ne changent pas le goût de l'eau de mer, ne l'adoucissent même pas; de la même façon, le choc de l'adversité ne change rien chez un homme de valeur: il reste imperturbable et c'est lui qui communique à chaque événement sa propre couleur, car il est plus puissant que tout ce qui lui est extérieur."

"Le devoir de l'homme, c'est d'être utile aux hommes; à beaucoup si possible, sinon, à quelques-uns; sinon, à ses proches; sinon, à soi-même. En effet, quand on se rend utile aux autres, on sert la communauté: en s'avilissant, on n'est pas seulement nuisible à soi-même, mais aussi à tous ceux auxquels, en s'améliorant, on aurait pu rendre service; à l'inverse, quand on est bienfaisant envers soi-même, on est utile aux autres en ceci qu'on se met en état de leur être utile."